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fait connoître que cet Amant n'est pas un Cynique, qui n'aime les biens de la vie que pour l'ufage; mais qu'il eft un homme délicat, qui veut qu'un certain goût, qu'une certaine volupté, dont la fource eft dans le cœur, affaifonne tous fes plaifirs. Un MECENAS qui ne voudroit pas troquer, pour toutes les ri cheffes du monde, un cheveu de sa chére LYCYMNIE.

Num tu, que tenuit dives Achæmenes,
Aut pinguis Phrygia Mygdonias opes,
Permutare velis crine Lycymnia

Plenas aut Arabum domos. HOR. lib.
2. Od. 12.

On objectera pent être que ce que je dis ici de COLIN, tombe, ou qu'il faut corriger le Texte; puis qu'on y voit que cet Amant n'étoit pas occupé d'un Amour, mais de plufieurs Amours.

De trop fonger à fes Amours.

La

A cela je répons deux chofes. premiére que l'ufage veut que l'on dife Songer à fes Amoirs, plûtôt que fonger à fon Amour. La feconde que cette difficulté marque en ceux qui la font une grande ignorance de la chofe dont ils.

veulent

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veulent parler. S'ils étoient habiles, s'ils avoient lû ANACREON, ils y auroient apris qu'nn feul Amour devient (fi je puis me fervir de ces termes) une legion d'Amours. Voici l'Ode dans laquelle ANACREON nous l'apprend. Elle est adreffée à l'Hirondelle.

Εἰς Χελιδόνα.

Σὺ μὲν, Φίλη χελιδών,
Ετησίη μολούσα,
Θέρει πλέκεις καλιήν,
Χειμώνι δ' εἰς ἄφαντα
Η Νείλον και 'πί Μέμφιν
Ερως δ' ἀεὶ πλέκει μεν
δει
Εν καρδία καλιήν.
Πόθος δ ὁ μὲν πλεροῦται,
ο δι τόν ἐςιν ἀκμὴν,
ο οι ημίλεπτο ήδη
Βοὴ δὲ γίνετ ̓ αἰεὶ
Κεχηνότων νεοτιών.
Ερωτιδεῖς δὲ μικροὺς
Οι μείζονες τρέφεσιν.
Οἱ δὲ τραφέντες ευθύς,
Πάλιν κύεσιν ἄλλους.
Τί μήχα. εν γένηται ;
Οὐ γὰρ σθένω τοσούτος
Έρωτας ἐκβοῆσαι.

En

En voilà la Traduction par le Poëte fans fard. Cette traduction fuffit pour faire entendre la penfée d'AN ACREON, à ceux qui n'entendent pas le Grec, & à leur faire comprendre en même tems la jufteffe de l'expreffion dont fe fervoit COLIN.

Chére HIRONDELLE, tous les ans
Tu reviens d'une aîle légere;
Tu fais ton nid dans le Printemps,
Pendant l'Eté tu deviens Mere ;
Et laffe de tant de travaux,
Tu vas l'Hyver aux Païs chauds.
Ah! que n'ai-je ta de tinée?

Mais CUPIDON pour mon malheur,
Pendant tout le cours de l'année,
Fait fon nid au fond de mon cœur.
A peine hors de la Coquille
Les premiers Amours font fortis,
Que pour augmenter fa Famille,
Il fonge à de nouveaux petits.
L'un fous le duvet eft encore,
Que l'autre eft fur le point d'éclore:
Les jeunes, dont jentens les cris,
Par les plus âgez font nourris,
Et les plus forts ne tardent guere
A fuivre l'exemple du Pere.

En un mot, je fens tous les jours

Renaitre en mon cœur tant d'Amours,.

Que

Que malgré cette amitié tendre
Que j'ai pour des hôtes fi doux :

Je ne fai plus comment m'y prendre,
Pour les pouvoir contenir tous.

Il n'eft pas hors de propos de remarquer ici, que cette Ode d'A NACREON fit naître à LYSIS l'idée du commencement d'un Billet doux qu'il écrivit à la belle CHARITE, on trouve ce Billet à la page 289. du 4. Livre de fon Hiftoire. LYSIS y badine fur le double fens du mot Poulet, qui fignifie quelquefois un jeune Coq, & quelquefois un Billet doux. Il y déguife la pensée d'ANACREON, & la tourne ainfi felon fes vûës.

Billet de LYSIS à la belle CHARITE:

Depuis que l'Amour, qui eft un des plus tegers Oiseaux du monde, eft venu faire fon nid dedans mon fein, il s'eft trouvé fi gros de germe, qu'il a fallu que je l'y aye Laiffe pondre. Il lui eft forti un œuf du ventre qu'il a couvé long-temps, & à la fin il én a fait éclore ce petit Poulet que je vous envoye. Il ne vous coûtera guére à élever: il ne faut rien pour le nourrir que des careffes & des baifers. Il eft fi bien inftruit qu'il parle mieux que ne fauroit faire un Ꭰ

Perros

Perroquet, & vous apprendrez aussi bient de lui que de moi-même les peines que je fouffre pour vous, &c.

Voilà ce que c'eft que de favoir imiter les Anciens. Quelle agréable idée l'Ode d'A NACREON n'a-t-elle pas fait naître à LYSIS? L'on voit par là que les Anciens ne font pas feulement la fource du bon & du beau, mais auffi de l'agréable; & qu'à tous égards on doit fuivre ce précepte d'HORACE:

--Vos exemplaria Graca

Nocturna verfate mmu, verfate diurna. Feuilletés nuit & jour les Auteurs Grecs.

NB. les Auteurs Grecs, dit HORACE, car fi on ne fait qu'en lire des imitations ou des copies, on ne parvient jamais à cette beauté, qui doit étre puifée dans la fourçe même. Les Livres modernes fournif fent mille preuves de cette vérité, & je n'en aporterois point d'exemple s'il ne s'en préfentoit un à ma mémoire extremement analogue avec le Billet de LySIS, & par conféquent, quoi qu'un peu de loin, analogue auffi avec l'Ode d'ANACREON. Ce font des Vers qu'une Demoiselle Françoife ajouta à la fin d'un Billet qu'elle écrivoit à un Miniftre du S.

Evan

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