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tateurs, je n'entreprendrai pas de juftifier une chose profane par des exemples tirés de ces Livres. Je me contente pour juftifier COLIN de rapporter ces beaux Vers de la Traduction du Songe de BOCACE.

Le Soleil ici bas ne voit que vanité, D'ignorance & d'erreur toute la Terre abonde; Mais aimer tendrement une jeune beauté, C'est la plus douce erreur des vanitez du monde.

XII. A fes Amours. ] COLIN peu femblable à ces gens qu'on nomme faux dévots, gens pétris d'orgueil, d'hypocrifie & de curiofité, ne s'inquiétoit point des intrigues du tiers & du quart. Il ne s'échauffoit pas non plus comme les ScuDERIS, à mettre des Heros à la. Sauce douce; ainfi qu'on a fait du Grand CyRUS & de plufieurs autres. COLIN n'étoit occupé que de fes Amours. Ses, qui vient du pronom poffeffif, fuus, fua, fuum, fait clairement voir que les Amours dont il s'occupoit, n'étoient point des Amours étrangères.

XIII. Ne peut dormir.] NE PEUT, il n'eft pas en fon pouvoir de dormir. Je fuis perfuadé qu'il n'y a perfonne qui ne fente que peut dans cet endroit vaut infiniment mieux que fauroit, car foit que C S

ce

ce dernier vienne de fapere, fapio, ou de fcire, fcio, il n'a point la force de pouvoir, je puis, il peut, qui vient de poffe, poffum, avoir la puifance, la faculté.

Peut d'ailleurs eft fort ufité, nos meilleurs Auteurs s'en font fervis. Il est vrai qu'elle a été écrite avec quelque forte de gayeté, dit M. de BALZAC, mais elle peut être luê par les Triftes mêmes. Mr. RACINE dit dans MITHRIDATE, A&t. I. Sc. I.

Ou MONIME à ma flamme elle-même contraire, Condamnera l'aveu que je prétens lui faire, Ou bien quelques malheurs qu'il en puisse avenir, Ce n'eft que par ma mort qu'on la peut obtenir.

XIV. Dormir. ] Il n'y a point de fi mauvais Auteur qui n'ait quelque expreffion heureuse c'eft l'effet du hazard & non de l'habilité. Ceux qui ont bien voulu perdre du temps à lire COTIN, ont 'trouvé des exemples de ce que je dis, ne fut-ce que celui-ci, tiré de l'apparition du Comte DE LA SUSE.

La nuit tombe du Ciel, la nuit qui lui préfente L'image de LISIS pompeufe & triomphante, Et telle qu'il étoit, quand malgré les hazards, Il arrachoit la foudre à l'Aigle des Céfars.

Ce

Ce dernier Vers eft d'une beauté extrême, mais comme je viens de le dire, c'eft l'effet du hazard, & non de l'habileté.

La différence qu'il y a donc entre un Auteur habile & un ignorant, c'est qu'un Auteur habile fe foûtient également par tout, comme fait le nôtre. Songer avoit été mis pour nous amener l'idée de Songe, il falloit par conféquent mettre ne peut dormir, & non pas, ne peut fom meiller. Car il auroit pû fommeiller & fonger, rêver, tout à la fois. Les Songes font ordinaires dans le fommeil. Mais lors que l'on dort, c'eft à dire, lors que l'on eft profondément affoupi, ( car c'eft ce qu'emporte avec foi le verbe neutre dormir) on ne rêve point. Ceux qui fe connoiffent à la force des expreffions fentiront bien la jufteffe de cette remarque.

•XV. Il veut. ] Ce verbe marque trèsbien l'ardeur de COLIN, il ne souhaite pas feulement il n'eft pas fimplement dans les difpofitions de tenir celle qu'il aime; dans des velleitez, comme on par、 le en Théologie, mais il veut. Sa volonté eft abfolument determinée. Si c'étoit par prémotion phyfique ou non, c'eft ce que je laiffe à examiner aux Tho

miftes & aux Moliniftes; je d'éclare donc à ces Meffieurs, que par cet abfolument déterminé je ne prétens point prendre, de parti en leurs quérelles, & pour l'amour des uns ou des autres, devenir ou perfécuteur ou perfécuté. J'aime mieux dire, felon l'expreffion de l'Apôtre, à altitudo divitiarum, que de déclarer auquel des deux Partis je donne raifon.

XVI. Il veut tenir celle qu'il aime. ] Voici encore un exemple de la force & de la beauté du choix dans l'expreffion, ce verbe tenir qui eft à l'infinitif, exprime parfaitement que COLIN ne veut pas que celle qu'il aime, foit feulement auprès de lui, mais qu'il veut s'en affurer d'une maniére indubitable, d'une maniére tout-à-fait forte. C'eft ce que fignifie le verbe Latin, Tenere, teneo d'où vient tenir, je tiens. Auffi l'Abbé DANET dans le Dictionnaire Latino Gallicum, qu'il a compofé pour l'ufage de feu M. le Dauphin, interpréte ce verbe Tenere par ces expreffions Françoifes, tenir, avoir en fes mains, occuper, être le maître d'une chofe, la posséder, en jouir comme on peu le voir au titre TEN de la page 442. col. 2. Edit. de Holl.

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XVII. Celle qu'il aime. ] Ces paroles font bien voir, que l'Auteur de ce CHEF

D'OEU

D'OEUVRE eft auffi habile à peindre un caractère, qu'à choisir une expreffion. COLIN eft malade jufques à mourir pour trop penfer à fes Amours. Il doit donc fentir une fi forte paffion pour l'objet qu'il aime qu'aucun autre ne puiffe faire diverfion dans fon cœur, ni ne puiffe le dédommager de l'abfence de fa Maîtreffe.

Quand on aime parfaitement, de bonne foi, le cœur ne fouffre point de partage. La Coquetterie feule le permet, parce qu'elle n'eft animée que par la fourberie & le goût pour le plaifir.

On lit dans JEHAN MONIOT:

Qui aime fans tricherie,
Ne penfe n'a trois, n'a doz,
D'une seule est desiroz,
Cil que loyax amors lie,
Ne voudroit d'autre avoir mie,
Ses vouloir tot a eftros,
Car nuls folas n'a fa vie,
Guerd ami s'il n'a amie,
Celuy qui tient a favoros,
Qu'il contient par druerie.

Ainfi que faut-il à COLIN? celle qu'il

aime.

D'ailleurs › par ces paroles le Poëte

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