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Holl. p. 157.

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VII. D'une grosse Maladie. ] Ce Groffe eft bien choisi. Si cette maladie étoit petite, on ne s'en embarrafferoit pas, mais ce mot Groffe intéreffe tout-à-fait. Malade d'une Groffe maladie. Ce pleonafme relevé par le mot Groffe, émeut la compaffion du Lecteur, le touche. Car quoi que malade de maladie foit un pleonasme décidé, pour me fervir de l'heureurfe expreffion de M. HOUDART de LA MOTTE, cela ne dit pourtant pas tant que malade d'une Groffe maladie. Cependant, j'ofe avancer que ce Groffe n'eft point original, je croi qu'on l'a fubftitué à Grande. Car il n'y a que depuis quelques années que l'adjectif Gros s'eft fou ré par tout en la place de l'adjectif Grand : ceux qui ont quelques lumiéres de la Critique ne l'ignorent pas; & ceux qui l'ignorent peuvent voir l'excellent Livre des Mots à la Mode, où pour fe moquer de l'abus qu'on faifoit de ce mot, l'on trouve l'Epigramme fuivante.

Une Groffe Beauté dérange la cervelle,
Et fait pouffer de Gros foûpirs;
La Groffe qualité peut flater nos defirs
On fe donne des airs, & l'on s'entête d'elle;
Mais avec un Gros bien l'on a ce qui s'appelle,
Un Gros bonheur, de Gros plaifirs.

Ainfi au lieu de Groffe, j'ofe dire, Meo periculo, lifez Grande.

VIII. Penfant mourir. ] Notre Poete auroit bien pû mettre, croyant mourir. ] Mais croyant n'auroit fignifié que la fimple croyance, & l'on fait que cette croyance eft fi peu de chofe, qu'elle reffemble tout à fait à une opinion legére qui n'a nul fondement, au lieu que penfant marque une croyance fondée fur la réflexion, une croyance réflechie.

Mourir eft ici dans le figuré, car mourir en terme d'amour, ne fignifie point rendre l'ame, d'où vient qu'un Poete a dit:

Faudra-t-il de fang froid, & fans être amoureux,
Pour quelqu'IRIS en l'air faire le langoureux;
Lui prodiguer les noms de Soleil & d'Aurore,
Et toûjours bien mangeant mourir par métaphore?

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C'est pourquoi BENSERADE trés- judicieusement remarqué dans fon Balet de La puissance de l'Amour, que

Ce n'eft pas tout qu'aimer, il faut de la pâture, Et bien des gens font morts d'amour

Qui réglement deux fois par jour

Ne laiffent pas d'avoir befoin de nourriture.

IX. Mourir, en Amour marque feulement l'excès de la paffion, foit que cet

(

excès jette l'ame dans une douleur exceilive, foit même qu'il lui caufe un plaifir extrême : on le voit par cette Chanfon, que je fis autrefois en Grec pour une belle perfonne, & pour qui je la traduifis enfuite en François.

Ma deftinée eft de mourir,

En vous aimant, belle SYLVIE,

Vos rigueurs m'ôteront la vie,

Ou je la finirai par l'excès du plaifir,
Si d'un parfait retour ma tendreffe eft fuivie.

Mais donnons-en un exemple plus étendu. Voyons la premiére Scene de la 3. entrée de l'Europe Galante, & nous entendrons Dom PEDRO Cavalier Efpagnol chanter fous le Balcon de fa Maîtreffe,

Sommeil, qui chaque nuit jouïffez de ma belle, Ne verfez point encor vos Pavots fur ses yeux, Attendez pour régner fur elle,

Qu'elle ait apris mes tendres feux,

Je vai parler, c'eft affez me contraindre, C'eft trop cacher les maux qu'elle me fait fouffrir ;. Du moins il est temps de m'en plaindre, Lors que je fuis prêt d'en mourir.

Ah! s'il plaifoit à l'objet que j'adore,
De foulager mon amoureux tourment,

Le

Le fort fatal que je déplore,

Deviendroit un deftin charmant.

Mais ma mort eft toûjours certaine, Quelque fuccès qu'Amour daigne me préparer, Que LUCILE foit inhumaine,

Ou fenfible à l'ardeur que je viens déclarer,
Il faudra toûjours expirer

De mon plaifir ou de ma peine.

Les Efpagnols, les Italiens, les Anglois, les Allemands, les Flamands 'même fe fervent de cette phrafe, & je ne doute pas que je n'en trouvaffe des exemples dans la Langue des Chinois, fi je la favois auffi bien que l'Illuftre Auteur de la feu Hiftoire Critique de la République des Lettres.

Mais quoi qu'il foit vrai que mourir en amour ne fignifie pas rendre l'ame, il faut pourtant remarquer que l'amour porte quelquefois à fe donner la mort. On voit dans le Spectateur, Tom. 2. p. 24. qu'un jeune homme de grande efperance, fut trouvé au deffous du Pont de Londres avec du plomb dans fes poches, qu'il y avoit mis dans le deffein de fe noyer; & cela parce qu'une Femme qu'il aimoit (c'étoit la Maîtreffe d'un Caffé) avoit voulu rincer la Taffe dans, laquelle elle avoit bû du Thé, avant que

d'en

d'en laiffer boire à ce jeune homme dans cette même Taffe. Je rapporterai les propres paroles par lefquelles on nous a affuré de cette Hiftoire. Certain it is, that a very hopeful young man was taken with leads in his pockets below Bridge, where he intented to drown himself, because his Idol would wash the dish in which she had just before drank Tea, before she would let him ufe it. Et ne voyons-nous pas dans les anciennes Hiftoires que MA CARIUS fe tua avec fa foeur CANA CE dont il é toit paffionément amoureux & aimé, de même qu'il arriva à PAPYRIUS avec fa foeur CANULIE. L'Amour porta MARC ANTOINE à s'ôter la vie lorfqu'il crut que CLEOPATRE l'avoit perdue. JULIE femme de P O MPE'E fut fi faifie de l'idée d'avoir perdu fon mari qu'elle en fit une fauffe couche & qu'elle en mourut. PORCIA privée du fecours du fer pour fe priver du jour après la mort de Brutus ne craignit pas d'avaller des charbons ardens. Pillules affurément qui doivent être très-difficiles à prendre. PANTHE'E la femme d'A BRADAT, fe tua fur le corps de fon' mari, comme fit THISBE' fur celui de fon cher PYRAME. PHILA femme de Demetrius, avala du poison. La femme de LIGA

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