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montre au barreau ; et cette distinction, il l'exprime à la fin du passage que je viens de citer: Quæ, in veritate causarum, et rarius multo facimus, et certe occultius. Isocrate, dans l'éloge d'Athènes, a recherché curieusement, dit- il, tous ces ornements du langage, parce qu'il écrivait, non pour plaider devant les juges, mais pour flatter et délecter l'oreille des Athéniens. Non enim ad judiciorum certamen, sed ad voluptatem aurium scripsera. (Orat. )

C'est, selon moi, une marque de mépris que Cicéron donne à cette éloquence oiseuse des sophistes, que , que de lui laisser avec tant d'indulgence le luxe de l'élocution et le soin curieux de plaire. N'a-t-il pas observé lui-même qu'en éloquence, comme dans tous les grands objets de la nature, le beau et l'utile doivent se réunir, et que les ornements de l'édifice oratoire doivent contribuer à sa solidité? Columnæ et templa et porticus sustinent; tamen habent non plus utilitatis quam dignitatis... hoc in omnibus item partibus orationis evenit, ut utilitatem ac prope necessitatem suavitas quædam et lepos consequatur. (De Orat.)

N'a-t-il pas observé que, dans le style comme dans les mets, l'assaisonnement, qui d'abord pique le plus le goût, le lasse presque aussitôt et l'émousse, et qu'il n'y a pour l'esprit que les aliments simples dont il ne se lasse jamais? Difficile enim dictu est quænam causa sit, cur ea

quæ maxime sensus nostros impellunt voluptate, et specie prima acerrime commovent, ab iis celerrime fastidio quodam et satietate abalienemur. Et après avoir prouvé, par l'expérience de tous nos sens, que la satiété suit de près les raffinements du plaisir; Si omnibus in rebus voluptatibus maximis fastidium finitimum est ; n'a-t-il pas reconnu qu'il en était de même en éloquence? In qua vel ex poetis vel ex oratoribus possumus judicare concinnam, distinctam, ornatam, festivam, sine intermissione, sine reprehensione, sine varietate, quamvis claris sit coloribus picta vel poesis vel oratio, non posse in delectatione esse diuturnam. Enfin n'a-t-il pas établi, comme un principe général, que, dans un discours, les ornements doivent être semés légèrement et par intervalles, jamais accumulés ni également répandus? Ut porro conspersa sit (oratio) quasi verborum sententiarumque floribus, id non debet esse fusum æquabiliter per omnem orationem, sed ita distinctum, ut sint quasi in ornatu disposita quædam insignia et lumina.

Mais dans un sujet frivole et dénué d'intérêt et d'utilité, faut-il laisser à nu ce fonds aride, et ne pas le couvrir de fleurs? Il faut d'abord éviter un sujet dont l'indigence et la sécheresse ont besoin d'être sans cesse ornées ; ne jamais se réduire au futile métier de beau parleur ; avoir au moins l'intention d'instruire lorsqu'on cherche à plaire; et dans les choses où la raison et la vé

rité ne demandent qu'à se montrer dans leur simplicité naïve, se contenter d'un style naturel et décent. In propriis verbis illa laus oratoris, ut abjecta atque obsoleta fugiat, lectis atque illustribus utatur. Ainsi le simple se mêlera au tempéré, comme il s'allie même au sublime, sans détonner avec l'un ni avec l'autre, mais avec cette facilité d'ondulation, si j'ose le dire, qui doit régner dans tous les genres d'éloquence, et sans laquelle le haut style est roide, guindé, monotone et le style fleuri n'est qu'un papillotage de couleurs, toutes vives et sans nuances, dont l'éclat fatigue les yeux.

C'est au moyen de ce mélange que l'orateur, dans le genre temperé même, peut produire de grands effets. Je ne dis pas que le genre sublinie ne s'y mêle aussi quelquefois ; mais ce sont des accidents rares : et il me semble que Rollin s'est oublié, lorsque, à propos de l'habileté à orner et à embellir le discours, il rappelle ce que dit Cicéron du stoïcien Rutilius, qui avait dédaigné, comme Socrate, d'employer l'éloquence pathétique pour sa défense. Ce n'était pas des ornements de l'éloquence tempérée, mais de la force, de la chaleur de la haute éloquence de Crassus, qu'il s'agissait dans cette cause. C'est le genre sublime dans toute sa vigueur et dans toute sa véhémence, que Cicéron aurait voulu qu'on eût employé pour sauver l'innocence et la vertu même. Quum illo nemo neque integrior esset in civitate

dixisses....

neque sanctior... quod si tunc, Crasse, et si tibi pro P. Rutilio, non philosophorum more, sed tuo, licuisset dicere, quamvis scelerati illi fuissent, sicuti fuerunt, pestiferi cives supplicioque digni, tamen omnem eorum importunitatem ex intimis mentibus evellisses vi orationis tuæ. (De Orat.)

Mais dans un degré de chaleur et de force inférieur à l'éloquence de Crassus, la clarté, les développements, l'abondance, l'éclat des pensées et des paroles, joint aux charmes de l'harmonie, peuvent encore étonner et ravir. Et remarquez qu'en parlant de celui qui produit les plus grands effets, Cicéron ne lui attribue rien qui s'élève au-dessus de l'éloquence tempérée. In quo igitur homines exhorrescunt? quem stupefacti dicentem intuentur? in quo exclamant? quem deum, ut ita dicam, inter homines putant? qui distincte, qui explicate, qui abundanter, qui illuminate et rebus et verbis dicunt, et in ipsa oratione quasi quemdam numerum, versumque conficiunt: id est quod dico, ornate. (De Orat. 1. 3. >

Mais tout cela suppose un fond solide et riche, un sujet sérieux, utile, intéressant ; et si, sur des questions vaines, sur des objets futiles, on s'efforce d'être ingénieux et éloquent, on sera brillant tant qu'on voudra, on n'éblouira qu'un moment; et à cette enluminure rhétoricienne dont nos écoles et nos académies ont fait vanité si long-temps, j'appliquerai ce que Cicéron di

sait des tableaux modernes, comparés aux anciens: Quanto colorum pulchritudine et varietate floridiora sunt in picturis novis pleraque quam in veteribus; quæ tamen, etiamsi primo aspectu nos ceperunt, diutius non delectant; quum iidem nos in antiquis tabulis illo ipso horrido obsoletoque teneamur? (De Orat. I. 3.) Voyez SIMPLE et SUBLIME.

TON. Dans le langage, on appelle ton, le caractère de noblesse, de familiarité, de popularité, le degré d'élévation ou d'abaissement, qu'on peut donner à l'élocution, depuis le bas jusqu'au sublime. Ainsi l'on dit que le ton de la tragédie et de l'épopée est majestueux; que celui de l'histoire est noble et simple; que celui de la comédie est familier, quelquefois populaire.

Ton se dit aussi des autres caractères que l'expression reçoit de la pensée, de l'image, du sentiment. Le ton triste de l'élégie, le ton galant du madrigal, le ton léger de la plaisanterie, le ton pathétique, le ton sérieux, etc.

On voit par là, que non seulement le style peut avoir, mais qu'il doit avoir plusieurs tons, relativement aux sujets que l'on traite et aux personnages qu'on fait parler. Et non-seulement dans les divers genres et sur des sujets différents, mais dans le même genre et dans le même ouvrage, le style doit prendre, sans détonner, différentes modulations.

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