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juncunde, cum senibus graviter, cum juventute comiter, cum facinorosis audaciter, cum libidinosis luxuriose vivere (1). ( Pro Cœl. v, 6.)

(1) « Cœlius a été attaché à Catilina, je l'avoue; mais un grand nombre de gens de bien, de tout rang, de tout âge, l'ont été comme lui. Catilina, vous vous en souvenez, Romains, n'avait pas les vrais caractères de la vertu; mais il en avait les apparences. Il se servait des plus méchants des hommes; mais il affectait un entier dévouement pour les meilleurs des citoyens. On trouvait chez lui les appas de la licence et de la débauche; mais il y avait des aiguillons pour les talents et l'amour du travail. Si les vices et les passions y déployaient toute leur ardeur, dans toute sa vigueur y dominait aussi l'émulation pour l'étude de la science militaire. Je ne crois pas que jamais sur la terre ait existé un monstre composé comme celui-là de qualités et d'inclinations contraires et incompatibles. Qui plus que lui, dans un certain temps, fut agréable à nos plus grands hommes ? qui fut plus étroitement lié avec des hommes diffamés et perdus ? Quel citoyen se montra plus zélé que lui quelquefois pour le bien de la république? Quel ennemi plus noir et plus atroce a-t-elle porté dans son sein? Qui fut plus infame dans ses plaisirs? qui fut plus patient dans ses travaux, plus avare dans ses rapines, plus libéral dans ses profusions? Ce qu'il y eut, Romains, d'étonnant, de merveilleux dans un tel homme, ce fut de s'attacher un grand nombre d'amis, de les défendre, et de les cultiver par toute sorte de complaisance, de leur rendre commun tout ce qu'il possédait, de les servir, dans l'occasion, de son argent, de son crédit, de son travail, de son audace, et par le crime, si le crime et l'audace leur étaient nécessaires; de maîtriser son propre naturel, dele régler selon les temps, et tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, de le tordre et de le fléchir; de vivre enfin sé

Que l'on rapproche ce morceau de celui de Salluste; et des deux côtés on aura un modèle de perfection dans l'art de peindre en orateur et en historien.

Mais pour ceux qui n'entendent point la langue de Cicéron et de Salluste, voici, dans la nôtre, de grands exemples de l'un et de l'autre genre d'écrire. Le cardinal de Retz, dans ses Mémoires, fait ainsi les portraits du grand Condé et de Tu

renne.

« M. le prince, né capitaine, ce qui n'est jamais arrivé qu'à lui, à César, et à Spinola, (cela est-il bien vrai?) a égalé le premier et a surpassé le second. L'intrépidité est l'un des moindres traits de son caractère. La nature lui avait fait l'esprit aussi grand que le cœur : la fortune, en le donnant à un siècle de guerre, a laissé au second toute son étendue; la naissance, ou plutôt l'éducation dans une maison trop attachée et soumise au cabinet, a donné des bornes trop étroites au premier. On ne lui a pas inspiré d'assez bonne heure les grandes et générales maximes.... Ce défaut a fait, qu'avec l'ame du monde la moins méchante, il a fait des injustices; qu'avec le cœur d'Alexandre, il n'a pas été exempt, non plus que

rieusement avec les gens austères, gaiement avec les enjoués, gravement avec les vieillards, poliment avec la jeunesse, hardiment avec les scélérats, voluptueusement avec ceux qui se plongeaient dans les plaisirs.

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lui, de faiblesses; qu'avec un esprit merveilleux, il est tombé dans des imprudences.

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M. de Turenne a eu dès sa jeunesse toutes les bonnes qualités, et il a acquis les grandes d'assez bonne heure, Il ne lui en a manqué aucune que celles dont il ne s'est point avisé. Il avait presque toutes les vertus comme naturelles, et il n'a jamais eu le brillant d'aucune. On l'a cru plus capable d'être à la tête d'une armée que d'un parti; et je le crois aussi, parce qu'il n'était pas naturellement entreprenant: mais toutefois qui le sait? Il a toujours eu en tout, comme en son parler, de certaines obscurités, qui ne se sont développées que dans les occasions, mais qui se sont toujours développées à sa gloire. Voilà l'historien, voici l'orateur.

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<< Vit-on jamais en deux hommes, dit Bossuet, les mêmes vertus avec des caractères si divers, pour ne pas dire si contraires? L'un paraît agir par des réflexions profondes; et l'autre, par de soudaines illuminations: celui-ci par conséquent plus vif, mais sans que son feu eût rien de précipité; celui-là d'un air plus froid, sans avoir jamais rien de lent, plus hardi à faire qu'à parler, résolu et déterminé au-dedans, lors même qu'il paraissait embarrassé au-dehors. L'un, dès qu'il paraît dans les armées, donne une haute idée de sa valeur, et fait attendre quelque chose d'extraordinaire, mais toutefois s'avance par ordre, et vient comme par degrés aux prodiges qui ont

fini le cours de sa vie : l'autre, comme un homme inspiré, dès sa première bataille, s'égale aux maîtres les plus consommés. L'un, par de vifs et continuels efforts, emporte l'admiration du genre humain, et fait taire l'envie; l'autre jette d'abord une si vive lumière, qu'elle n'oserait l'attaquer. L'un enfin, par la profondeur de son génie et les incroyables ressources de son courage, s'élève au-dessus des plus grands périls, et sait même profiter de toutes les infidélités de la fortune; l'autre, et par l'avantage d'une si haute naissance, et par ces grandes pensées que le Ciel envoie, et par une espèce d'instinct admirable dont les hommes ne connaissent pas le secret, semble né pour entraîner la fortune dans ses desseins, et forcer les destinées, etc. >>

Rien n'éblouit tant les lecteurs superficiels que les portraits de fantaisie; rien ne décèle mieux l'ignorance de l'écrivain aux yeux de l'homme instruit et clairvoyant. Sans même consulter les faits et avoir présent le modèle, un lecteur judicieux distingue un portrait qui ressemble, d'un portrait vague et imaginaire. Par exemple, lorsque le cardinal de Retz dit de madame de Longueville: « Elle avait une langueur dans ses manières, qui touchait plus que le brillant de celles même qui étaient plus belles; elle en avait une même dans l'esprit, qui avait ses charmes, parce qu'elle avait des réveils lumi

neux et surprenants. Elle eût eu peu de défauts, si la galanterie ne lui en eût donné beaucoup. Comme sa passion l'obligea de ne mettre sa politique qu'en second dans sa conduite; héroïne d'un grand parti, elle en devint l'aventurière »; lorsqu'il dit de madame de Chevreuse: « Si le prieur des Chartreux lui eût plu, elle eût été solitaire de bonne foi»; lorsqu'il dit du président Molé : «< Il jugeait des actions par les hommes, presque jamais des hommes par les actions »; lorsqu'il dit de M. d'Elbœuf: « il a été le premier prince que la pauvreté ait avili..... la commodité ne le releva point; et s'il fût parvenu jusqu'à la richesse, on l'eût envié comme un partisan, tant la gueuserie lui était propre et faite pour lui»: on voit que tout cela ressemble, parce qu'il y a je ne sais quoi d'original et de naturel, qu'il faut que le peintre ait réellement vu, et qu'il n'a point imaginé.

Mais lorsque le même écrivain trace le portrait de la régente, il s'étudie à le nuancer avec une finesse si recherchée, si minutieuse, si artificielle, que l'air de vérité n'y est plus: toutes ces antithèses graduées ne sont plus rien bel-esprit, et du faux bel-esprit.

que du

PREUVE. Dans un discours qui tend ou à suader ou à dissuader l'auditeur, la

per

preuve est

l'emploi des moyens propres à opérer l'effet qu'on

Élém. de Littér. IV.

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