Et ce qui va bien plus vous étonner, Orean lui-même, Orcan vient de l'assassiner. Quoi! lui? ATALIDE. ZAÏRE. Désespéré d'avoir manqué son crime, Sans doute il a voulu prendre cette victime. ATALIDE. Juste ciel, l'innocence a trouvé ton appui! ZAÏRE. Par la bouche d'Osmin vous serez mieux instruite ; Il a tout vu. SCENE XI. ATALIDE, ACOMAT, ZAIRE, OSMIN. ACOMAT. Ses yeux ne l'ont-ils point séduite (8) ? Roxane est-elle morte? OSMIN. Oui ; j'ai vu l'assassin "Perfides, et sortez de ce sacré palais." Autorise ce monstre à ce double attentat. Près de ces lieux, seigneur, craignant votre secours, ACOMAT. Ah destins ennemis, où me réduisez-vous? Défendre jusqu'au bout leurs jours qu'ils m'ont com mis. Pour vous, si vous voulez qu'en quelque autre contrée Madame, consultez: maîtres de ce palais, SCENE XII. ATALIDE, ZAIRE. ATALIDE. Enfin, c'en est donc fait; et, par mes artifices, Qu'à lui survivre, hélas! je fusse condamnée? Vous, de qui j'ai troublé la gloire et le repos, Infortuné visir, amis désespérés, Roxane, venez tous, contre moi conjurés, Tourmenter à la fois une amante éperdue, prenez la vengeance enfin qui vous est due. (Elle se tue.) Et Ah madame !... Elle expire. Oh ciel! en ce malheur Que ne puis-je avec elle expirer de douleur ! FIN. REMARQUES SUR BAJAZET. Bajazet, comparé aux chefs-d'œuvre de l'auteur, est dans sa totalité un ouvrage de second ordre, qui n'a pu être fait que par un homme du premier. Défectueuse dans le plan qui n'est dans sa plus grande partie qu'une petite intrigue obscure, conduite par la fourberie et la dissimulation, et dans les caractères de Bajazet et d'Atalide qui n'ont rien de tragique, et qui, par conséquent, sont peu propres à exciter la terreur ou la pitié, cette tragédie seroit depuis long-temps tombée dans l'oubli, si les caractères de Roxane et surtout d'Acomat n'étoient pas d'une vérité et d'une beauté à faire passer sur les défauts. Ce sont ces deux rôles qui donnent occasion à Racine de peindre avec force les mœurs turques, la politique sanglante du serrail, la servile existence d'un peuple innombrable enfermé dans cette prison du despotisme, les passions des sultanes, le caractère et les intérêts des visis, qui se hâtent d'être les instrumens d'une révolutio'n, de peur d'en être les victimes, l'inconstance ordinaire des Orientaux, et cette servitude menaçante qui rampe aux pieds d'un despote, et s'élève tout à coup des marches du trône pour le frapper et le renverser. Tout cela se trouve peint ou annoncé dans la première scène, qui, outre cette peinture admirable de mœurs locales, a le mérite d'être la plus belle exposition qu'il y ait au théâtre. C'est là que commence à se déployer ce caractère d'Acomat qui paroît à Voltaire l'effort de l'esprit humain. "Je ne vois rien dans l'an 66 66 66 tiquité ni chez les modernes, ajoute-t-il, qui soit dans ce caractère, et la beauté de la diction le relève en66 core. Pas un scul vers ou dur ou foible, pas un mot qui ne soit le mot propre, jamais de sublime horsd'œuvre, qui cesse alors d'être sublime, jamais de "dissertation étrangère au sujet ; toutes les convenances parfaitement observées; enfin ce rôle me paroît d'autant plus admirable, qu'il se trouve dans la seule tra 66 |