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décida enfin que l'on proposerait à Vandevelde que, s'il achevait promptement l'ouvrage, on l'enterrerait en terre sainte, et on ne laisserait pas séjourner son cadavre à la potence. Le sculpteur se mit à rire à ces paroles: Allez dire à ces messieurs, dit-il, que je m'inquiète fort peu de ce qu'on fera de mon cadavre; qu'on me donne la vie et la liberté, et avant quinze jours le cheval Bayard aura une tête, comme aucun sculpteur ne pourrait en tailler une. Le magistrat fut longtemps indécis, cependant l'honneur de la ville parla plus haut que la justice, et le conseil accorda la chose.

La veille de la fète, le maître se présenta suivi de deux hommes portant la tète de Bayard. Lorsqu'il leva le voile qui la couvrait, tous jetèrent un cri d'admiration et ne purent en détacher leurs regards; le lendemain elle fut exposée aux yeux du peuple qui ne se lassa point d'admirer ce magnifique chef-d'oeuvre. Cette nouvelle s'étendit, au loin dans le pays et une foule de curieux afflua bientôt à Termonde. Maître Liévin Vandevelde avait, dès sa sortie de prison, changé de conduite, il vécut encore longtemps à la joie de ses amis et concitoyens.

Lorsqu'à l'occasion de la fête on promène le cheval Bayard, on se dirige d'abord du côte du grand marché, dans les quatre angles duquel sont placés de petits mortiers que l'on décharge aussitôt que Bayard est au milieu de la place. Le noble coursier se cabre, fait semblant de combattre, se tourne d'un côté et d'autre, jusqu'au dernier coup. Alors il salue le peuple qui le

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couvre d'applaudissements comme vainqueur. Après avoir parcouru son itinéraire dans la ville de Termonde, il rentre à l'hôtel de ville où il attend dans un grenier le retour de nouvelles fêtes.

LA VIANDE DE PORC DÉFENDUE.
(Zéle. Malines - Gand.)

On sait que la viande de porc est défendue aux juifs comme nourriture; En voici la cause:

On rapporte que notre seigneur Jésus Christ, dans les excursions qu'il fit avec St. Pierre, visita aussi la Flandre et arriva un jour au bourg de Zéle. C'était le jour du sabbat et les juifs se promenaient par douzaines dans les campagnes et discouraient sur la nouvelle doctrine de la terre sainte, sur le nombre infini de ses convertis et sur les miracles qu'elle opérait journellement.

Parmi eux se trouvait un Souabe de la Moselle *) qui ayant quitté son pays, était venu s'établir à Zéle. Lorsqu'il aperçut le Seigneur il dit tout bas à ses compagnons: Voyez, le voila justement avec ses disciples."

"

Tous se retournèrent et regardèrent le Seigneur qui venait de loin. „Attendez," dit tout-à coup un vieux rabbin barbu, „je voudrais bien avoir un échantillon de son savoir faire. Nous allons lui jouer un tour, et prouver à ses disciples que ses miracles ne sont que

*) Les Souabes passent pour les Béotiens de l'Allemagne.

des bagatelles. Je vais me cacher sous cette tonne, et vous lui demanderez qui est là-dessous; je gage qu'il ne le saura pas."

Ainsi dit, ainsi fait. Le rabbin se glissa sous le tonneau et les autres se placèrent en cercle à l'entour pour attendre Jésus.

Lorsque le Seigneur fut auprès deux, l'un des juifs lui dit:

,,N'es-tu pas le prophète dont on raconte tant de merveilles."

„Je le suis," répondit le Seigneur.

,,Dis-nous," continua le juif, „ce qu'il y a sous ce tonneau : si tu nous l'apprends, nous proclamerons partout que tu es un prophète qui sait plus que de manger du pain.“ "Sous cette tonne" dit le Seigneur en souriant il y a un porc."

Alors tous les juifs éclatèrent de rire, et se moquèrent de Jésus disant: „Voyez-vous, nous l'avons bien dit, c'est un imposteur!"

Pierre se fàcha en voyant injurier son maître: „Levez le tonneau, imbéciles que vous êtes,“ s'écria-t-il, „et vous verrez qui a raison de vous ou du Christ."

,,Tout doux, tête chauve" répliqua le juif „regarde ce qui sous la tonne" et il souleva le tonneau, cependant o terreur! le rabbin avait disparu, un porc avait pris sa place, le juif était changé en un cochon qui gagna le bois en grognant et en tournant la queue piteusement. Les juifs convaincus par ce miracle se firent tous baptiser.

Cette nouvelle s'étant répandue dans le monde, aucun juif ne voulut plus manger de la viande de porc, car il craignait de tuer le rabbin ou quelqu'un de sa famille; cette coutume s'est conservée jusqu'à nos jours.

LES DEUX BOSSES.

(Wetteren. Malines-Gand.)

Il y avait jadis à Wetteren des géants, dont nous comptons parler ailleurs. Ils y occupaient un château aux environs duquel on n'était pas en sûreté. Pendant la nuit une musique bizarre et un bruit semblable à la danse joyeuse d'une troupe nombreuse s'y fesait entendre. On ignora longtemps ce que ce pouvait être, lorsqu'un jour le hasard l'apprit de la manière suivante:

Dans un bourg voisin demeurait un ménestrel bossu, personnage très-gai jouant du violon du matin au soir, et grand faiseur de calembourgs.

Un jour revenant du village voisin, il retournait chez lui, et comme il avait l'escarcelle bien garnie,, il entra partout où Notre Seigneur avait étendue sa main bienfaisante pour y faire des libations de bierre. S'étant arrêté dans un cabaret près de Wetteren, il ne s'en tint pas à la boisson, il se mit au jeu, et comme il n'aimait pas moins les cartes que son violon, il ne put de sitôt leur dire adieu. Le bonheur ne le favorisa pourtant pas, il perdit bas et souliers, habit et pantalon, chapeau et veste; enfin il ne lui restait plus que sa chemise.

Pour peu que je reste encore ici pensa-t-il en luimême, je ne retournerai pas avec honneur chez moi, car il est tard et les paysans se rendent de bonne heure à leurs travaux.

Et prenant son instrument sous le bras il sortit en trébuchant et dandinant à droite et à gauche; il arriva bientôt auprès du château de Wetteren. Il entendit le bruit des danses et de la musique et fut curieux de savoir ce que c'était, d'autant plus qu'il n'entendait pas de violons.

„Ah! se dit-il en lui-même, je pourrais bien regagner ici tout ce que j'ai perdu, et fesant une pirouette, il entra dans le château en brandissant son archet au dessus de sa tête.

Il vit dans la cour un grand nombre de personnes richement vêtues, les unes dansaient les autres étaient à table.

Il fut accueilli par un hourra général, cependant un monsieur s'approcha de lui et lui parla amicalement :

Ecoute, mon garçon tu danseras avec nous, et tu joueras ensuite. Nous savions que tu allais venir, c'est pourquoi nous n'avons pas fait venir de violons.

Bravo, cela me va, dit le musicien qui, comme on le pense, avait un peu trop aimé à voir le fond de son verre, et il fit des sauts si drôles que tous les convives en rirent jusqu'aux larmes. Un instant après le monsieur s'approcha de lui et le prenant par le bras:

En voilà assez, dit-il, tu vas maintenant jouer.

Bravo! cela me va, s'écria-t-il en prenant son archet.

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