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m'y ont poussé, et qui pouvaient m'y pousser, car personne au monde ne m'était plus cher que mon neveu. Puisque vous me refusez le corps du Sauveur, je le reçois en esprit, et je me recommande à lui.

L'évêque irrité contre cet homme de fer, voulut quitter la place; mais il n'eut pas plus tôt ouvert la porte que le mourant lui cria:

Mon père, découvrez votre ciboire et voyez, si le Seigneur s'y trouve encore.

L'évêque découvrant le ciboire le trouva vide. Le bourgmestre ouvrit alors la bouche et lui montrant la sainte hostie sur sa langue, lui dit:

Celui que vous ne vouliez pas me donner, s'est luimême donné à moi, et maintenant je serai plus tranquille là-haut, auprès de lui.

Et en disant ces mots il retourna la tête et son âme s'envola.

MANNEKEN-PIS.
(Bruxelles.)

C'est le nom du plus ancien bourgeois de Bruxelles. Son histoire qui est des plus curieuses nous dédommage bien du sentiment de dégoût que nous éprouvons en le voyant pour la première fois.

Un riche seigneur habitait Bruxelles avec son épouse, étaient encore tous deux à la fleur de l'àge, cependant aucun rejeton n'était venu bénir leur union, ce qui leur causait beaucoup de chagrin. Ils avaient beau prier des

journées entières à l'église, invoquer la Vierge et les saints, le ciel resta toujours sourd à leurs prières.

Cette épreuve durait déjà longtemps, lorsqu'un jour l'évêque vint à Bruxelles. Il avait prèché dans les environs où les habitants n'étaient pas encore convertis. Le seigneur averti de l'arrivée de ce prince de l'église, courut l'inviter à venir et à séjourner même dans son château.

L'évêque accepta et devint en peu de jours comme un ancien ami de la maison. Le seigneur lui confia le chagrin qu'il ressentait de ce que le ciel ne lui avait point accordé d'héritier.

Le prélat lui fit entendre des paroles consolantes, et lui promit même de penser à son voeu pendant la messe du jour suivant et de demander au ciel de l'exaucer.

Il tint parole et Dieu parut enfin exaucer sa prière, car quelque temps après, la noble dame conçut l'espoir d'arriver enfin au terme de ses désirs. Dès lors il n'y eut point d'époux plus heureux dans tout Bruxelles, ils ne savaient comment remercier Dieu de ce bienfait.

L'enfant étant né, on le transporta en grande pompe à Nivelles pour le baptiser dans un couvent fondé par Sainte Gertrude.

Ste. Gudule était à cette époque abbesse de ce couvent; avertie de l'arrivée de ce seigneur, elle prépara tout pour lui faire la réception dûe à son rang et surtout lorsqu'elle connut le but de sa visite. Elle alla audevant de lui et le reçut poliment. Elle-même, aidée de l'aumonier du couvent, ordonna la cérémonie et le lendemain

l'enfant (c'était un garçon) reçut le saint sacrement du baptême, et Ste. Gudule elle même le plongea dans l'eau, comme cela se pratiquait alors, de sorte qu'elle fut sa marraine.

Le lendemain le seigneur se remit en route pour retourner chez lui, mais il était loin d'être aussi content que lorsqu'il était venu. Le retour vers son épouse qu'il avait tant aimée jusqu'alors, n'avait plus de charmes pour lui, son enfant lui était devenu indifférent. Un amour impur avait enflammé son coeur; qui le croirait? Cette passion avait pour objet Ste. Gudule.

La noble dame le reçut avec des transports de joie, mais il n'y répondit que par une froideur glaciale. Ses jours si heureux jusqu'alors, ne furent plus pour lui qu'un insupportable fardeau. La chasse seule dans les profondeurs de la forêt lui apportait quelque distraction.

Enfin ne pouvant y tenir plus longtemps, il monta à cheval et prit la route de Nivelles.

Sainte Gudule le reçut d'une manière très-aimable, car elle était loin de se douter des mauvais désirs qui l'amenaient chez elle; mais à peine furent-ils seuls qu'il se jeta à ses pieds en lui faisant connaître son amour.

Ste. Gudule tâcha par des paroles pleines de douceur, de le détourner de ses mauvaises pensées, et de l'engager à retourner auprès de son épouse qu'il devait seule aimer, comme il l'avait juré au pied de l'autel. Elle l'engagea à renoncer à ses projets, d'autant plus qu'étant elle-même épouse du Seigneur elle ne pouvait rompre ses voeux.

De telles raisons auraient dû rappeler ce seigneur à son devoir, mais le contraire arriva; et lorsque Ste. Gudule lui parla plus sévèrement pour le remettre dans la bonne voie, il eut l'insolence de porter la main sur elle. La religieuse épouvantée s'enfuit de sa cellule dans l'église qui y était contigüe pour y demander à Dieu aide et secours.

Mais avant qu'elle eut atteint l'autel, le chevalier la saisit par la robe auprès d'une colonne. La sainte femme s'écria en embrassant la colonne :

O Jésus et Marie, secourez-moi! Au même instant la pierre cèda, la colonne s'ouvrit, et Sainte Gudule y étant entrée elle se referma sur elle. Le seigneur tenant à la main un bout de la robe de la religieuse, resta comme foudroyé ne pouvant prononcer un seul mot. Une voix partant du milieu de la colonne frappa ses oreilles: „Ton fils portera la peine de ton crime, aussi vrai qu'il y a un Dieu vivant."

Sans savoir comment cela se faisait, le seigneur se retrouva tout-à-coup chez lui. Il conçut un sincère répentir de ses fautes, mais il était peut-être trop tard. Un nouvel amour l'attacha de nouveau à son épouse et fondant toutes leurs espérances sur leur fils, ils continuèrent à couler en paix des jours dignes d'envie. Quelque fois cependant de sourds remords venaient altérer ce bonheur, comme un nuage obscur qui passe devant le soleil, mais alors il pensait à son repentir, et à l'espérance d'être absous par la confession.

La croissance du petit garçon fut extrêmement tardive; dans sa dixième année il n'était guère plus grand qu'un enfant de trois ans.

Il n'en fut pas de même de son esprit. Autant il était vif, autant son coeur était mauvais et perverti. Il n'y avait point de jours, que de nouvelles plaintes n'arrivassent, au seigneur de la part des bourgeois et des paysans. Mais il aimait trop son fils pour le châtier de ces escapades. Enfin le ciel se lassa et prépara au père et au fils une terrible punition.

Un jour ce dernier était allé au bois avec ses camarades pour cueillir des baies. Ils passèrent devant l'ermitage d'un anachorète centenaire.

Nous allons jouer un tour à cette barbe grise, s'écria le gamin; mais les autres enfants le retinrent par le bras en disant:

Pour l'amour de Dieu, ne fais pas cela, le ciel te punira.

Je le ferai malgré cela, répondit le petit entèté; les enfants se sauvèrent à ces paroles, car ils craignaient l'ermite qui passait dans toute la contrée pour un saint. Ce méchant petit garçon éclata de rire en voyant la peur de ses camarades. Il se plaça contre la porte et se mit à lacher l'eau.

A peine eut-il commencé que la portè s'ouvrit, et le religieux poussa sa tète blanche et vénérable en disant:

„Pisse, petit, ne te gêne point, pisse seulement, tu le feras encore longtemps!"

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