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Marie

avait en nous un sentiment qui nous assurait que nous obtiendrions cette grâce difficile, mais nous sentions la nécessité d'attendre le moment où il plairait à la divine Providence de combler nos vœux. Nous écrivîmes à notre ami de ne pas se rebuter pour ce premier refus, d'attendre et de saisir un moment favorable, et de faire déposer notre requête aux pieds du Saint-Père par un laïque, si aucun ecclésiastique ne voulait s'en charger. Il y avait un an que la requête dormait à Rome, quand, dans les derniers jours de mars 1838, nous pensâmes à réclamer, par des prières spéciales de l'association, la protection de Marie pour le succès de cette affaire. Nous dîmes que nous recommandions aux prières de ncs associés un pieux dessein que nous avait inspiré pour sa gloire, que nous réclamions les communions qui se feraient pendant le mois d'avril à cette intention. Nous ne tardâmes pas à être exaucés. Dans les premiers jours d'avril, une dame, aussi illustre par sa piété que par sa haute naissance, entendant parler d'une manière tout à fait imprévue des prodiges de grâce obtenus dans l'église de Notre-Damedes-Victoires, et de la demande du curé, se charge de présenter cette demande au Pape, et sollicite une audience à cet effet. Dès que le Saint-Père eut lu la requête, il ordonne aussitôt qu'on fasse un bref par lequel il crée et érige à perpétuité dans l'église de Notre-Dame-desVictoires, à Paris, l'Archiconfrérie du très-saint et immaculé Cœur de Marie pour la conversion des pécheurs. Nous n'avions demandé cette faveur que pour la France, Sa Sainteté l'étend au monde entier 1.

Ainsi, dans cette circonstance, tout sort de l'ordre

1 Voir le Bref apostolique à la page x1, et sa traduction à la page XVI.

naturel les protecteurs naturels refusent leur appui, leur concours, et une femme qui n'a entendu parler de F'œuvre qu'en passant, qui sait à peine de quoi il s'agit, va traiter cette grande et importante affaire avec le souverain Pontife. Et le vicaire de Jésus-Christ, avare de ces sortes de faveurs, accorde, dans toute sa plénitude, une grâce qui n'avait été sollicitée qu'avec des restrictions. Disons encore que le doigt de Dieu est ici.

Jusqu'au moment où l'Archiconfrérie a été établie, l'association du saint et immaculé Cœur de Marie n'avait été exposée qu'à des railleries qui tendaient à ridiculiser sa dévotion et ses exercices. Mais depuis, surtout, l'apparition du Manuel, aux railleries, sont venus se joindre les injures, les mensonges, les calomnies dirigées spécialement contre la personne du directeur. Rien de tout cela ne nous a effrayé ni étonné; nous nous y attendions. L'Archiconfrérie fait la guerre à Satan, elle lui arrache des victimes. Il est naturel que Satan lui rende guerre pour guerre; il n'a pas trouvé de moyen plus propre à la décréditer, que de calomnier son directeur. Nous ne nous plaignons point de ces persécutions; nous savons que, comme disciple et prêtre de Jésus-Christ, elles sont notre partage. Nous les acceptons, et nous nous trouvons très-heureux de pouvoir lui offrir ces petites mortifications de la nature, en hommage de reconnaissance pour les grâces et les consolations inouïes dont sa divine bonté daigne nous combler. Nous ne regrettons que l'outrage fait à Dieu, la justice violée, la charité blessée, et les scandales irréparables pour certains esprits, donnés aux fidèles. Eh! cependant, cette œuvre, fondée dans un temps et des circonstances si critiques, établie dans un lieu si contraire à son esprit, à son développement, confiée à un si pauvre instrument, raillée, honnie, per

sécutée, cette œuvre a marché, et à pas de géant. En dix ans elle a parcouru l'univers, et elle s'est propagée dans tous les lieux que le soleil éclaire. Comme l'agneau sans tache est immolé à toutes les minutes du jour: Ab ortu solis usque ad occasum; de même, il n'y a point de moment dans le jour où, par toute la terre, il ne s'élève un concert de louanges adressé au Cœur immaculé de Marie. Des Antipodes, où nous avons des confréries établies, comme de Paris, comme de notre Europe, des vœux, des supplications montent sans cesse vers le trône de clémence sur lequel Marie est assise, et réclament de sa charité compatissante la conversion, le salut de nos pauvres frères égarés dans la foi et dans les mœurs.

Elle a rapidement et merveilleusement grandi dans un si court intervalle, au milieu des mépris, des rebuts, des épreuves de tout genre. Abandonnée de tous, elle n'a eu à sa naissance que la bénédiction du vicaire de Jésus-Christ; mais cette bénédiction l'a remplie d'une sève qui, dans un instant, a changé le petit grain de sénevé en un arbre vigoureux et majestueux qui couvre l'univers entier de l'abondance de ses branches et de ses rameaux. Elle a marché, elle ne fait que commencer sa course, et elle a déjà posé ses assises aux quatre coins du globe. Dans l'histoire de l'ancien peuple, dans les annales de l'Église, dans les fastes du monde entier, rien n'est comparable à l'éterdue, à la rapidité de ses progrès. S'il y a encore des esprits qui ne veulent pas voir ici l'œuvre de Dieu, aveugles volontaires, qu'ils tremblent, car ils blas phèment l'œuvre de Dieu.

Le bref apostolique, donné à Rome le 24 avril 1838, nous fut délivré le dimanche 24 juin suivant, revêtu du visa de Mgr l'archevêque de Paris. Nous le publiâ

mes le même jour. Cette lecture répandit une sainte joie dans tous les cœurs. Tant de bénédictions de la * part du Père commun des chrétiens, la glorieuse faveur dont il honorait la petite association, faisait naître des pressentiments bien doux, portaient tous les cœurs à la reconnaissance envers la bonté divine. Nous étions pressés par le besoin de l'exprimer. Nous fimes le vœu d'offrir à Dieu une neuvaine d'actions de grâces et de vœux pour la conservation et le salut de N. S. P. le Pape. Nous choisîmes pour exprimer nos sentiments le Te Deum de Marie, le sublime cantique Magnificat, que nous chantâmes solennellement pendant neuf dimanches et fêtes après la bénédiction du Très-Saint Sacrement. Nous terminâmes cet exercice de reconnaissance le jour de la glorieuse Assomption de Marie. Le jour de la fête des glorieux apôtres saint Pierre et saint Paul, et le dimanche où nous en célébrons la solennité, de nombreuses communions furent faites en actions de grâces et pour le salut du Saint-Père.

Cette dignité d'Archiconfrérie universelle, à laquelle l'Église venait d'élever la petite association, lui préparait une destinée glorieuse, lui ouvrait une carrière immense. C'était le monde entier qu'il lui était donné de parcourir; c'était par toute la terre qu'elle devait arborer l'étendard du très-saint et immaculé Cœur de Marie; elle recevait la sainte mission d'inspirer à tous les cœurs chrétiens le désir et le vœu de la conversion de cette masse de pécheurs qui se perdent au milieu de tant d'indifférence. Nous le pressentîmes dès le commencement, et nous avouons que cette idée nous effraya; nous étions seul, absolument seul, et la sainte œuvre que la bonté divine avait daigné confier à notre faiblesse, était devenue un sujet de sarcarsmes et de risée. Un pauvre prêtre sans appui, sans crédit, isolé,

perdu au sein de cette capitale qui, elle-même, est un univers, ne pouvait espérer d'établir des relations qui sont tout à fait étrangères à son caractère et à ses habitudes. L'Archiconfrérie avait déjà des enfants répandus sur plusieurs parties du globe, dans la majeure partie des États européens; mais c'étaient quelques prêtres modestes, de pieux fidèles que la Providence ne paraissait pas destiner à être les hérauts de cette vaste entreprise. Il y avait de la présomption dans toutes ces réflexions. Nous étions aveuglé par cette idée que c'était nous que Dieu avait destiné à propager son œuvre.

Pendant qu'elle fatiguait notre esprit, la Providence préparait ses voies. Nous racontions souvent à de pieux confrères la grâce, les faveurs dont Marie récompensait les vœux que lui offrait l'Archiconfrérie. Un de ces nommes vénérables, dont la parole est puissante sur notre esprit, nous disait souvent que Dieu n'accordait point de telles grâces pour qu'elles soient ensevelies dans le silence et l'oubli, que nous devrions les faire connaître. Nous nous connaissions trop bien pour oser nous rendre à son conseil. Il revint à la charge et finit par en appeler à notre conscience. Cette espèce d'arrêt finit par nous déterminer. Dans le sentiment profond de notre insuffisance, nous priâmes Marie d'éclairer, de guider notre esprit, et ce Manuel fut le fruit de notre confiance dans la protection de la meilleure et de la plus excellente des mères.

Mais ce n'était pas assez d'avoir raconté dans un livre les nouvelles grâces que la bonté divine se plaisait à répandre sur les hommes, il fallait encore que ce livre fût répandu par toute la terre, qu'il fût présenté à tous les fidèles, puisque tous sont appelés à boire à la source de ces nouvelles délices d'amour et de miséricorde qui découlent du Cœur très-saint et immaculé de Marie.

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