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table explication. La loi montroit bien ce qu'il falloit faire, mais elle ne subvenoit pas à l'impuissance de notre nature. Elle frappoit les oreilles, mais elle ne touchoit pas le cœur. Ce n'étoit pas assez que Dieu, d'une voix tonnante et impérieuse, fìt annoncer au peuple ses volontés: il falloit qu'il parlât intérieurement et que par une opération toute-puissante il amollit notre dureté. Grand Dieu éternel, vous me commandez; il est juste que vous soyez obéi; mais ce n'est rien faire que me commander, si vous ne me donnez la grace par laquelle je puisse observer vos commandemens. Or cette grace n'est point par la loi c'est le propre don de l'Evangile, selon ce que dit l'apôtre saint Jean1, que « la loi a été donnée par Moïse, et la grace et la vérité a été faite par JésusChrist. » Qu'est-ce donc que faisoit la loi? Elle ordonnoit, elle commandoit, elle lioit les transgresseurs d'éternelles malédictions, parce que « maudit est celui qui n'observe pas les paroles qui sont écrites en ce livre ; » mais elle ne soulageoit en rien nos infirmités. C'étoit une eau foible et sans vigueur, capable de nous agiter, incapable de nous soutenir.

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C'est pourquoi le Sauveur Jésus ayant compassion de notre impuissance, vient nous donner un vin d'une céleste vigueur; c'est sa grace, c'est son Esprit-Saint dont les apôtres furent enivrés au jour de la Pentecôte. C'est ce saint et divin Esprit qui porte la loi au fond de nos cœurs et l'y grave par des caractères de flamme. Là il l'anime intérieurement et la remplit d'une force vivifiante; il change la lettre en esprit, et c'est la nouvelle alliance que Dieu contracte avec nous par son Evangile. C'est pour cette raison que, parlant par la bouche de Jérémie : « Voici, dit-il3, que j'établirai avec la maison de Juda un nouveau testament, non selon le testament que j'ai établi avec leurs pères; ils ne sont point demeurés dans mon testament, et moi je les ai rejetés, dit le Seigneur. Mais voici le testament que je disposerai à la maison d'Israël, » c'est-à-dire aux vrais enfans d'Israël et au peuple de la nouvelle alliance: « J'inspirerai, dit-il, ma loi dans leurs ames; et je l'écrirai non en des tables de pierre, mais je l'écrirai en leurs cœurs; et ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu. » Quelle 1 Joan., I, 17. • Deuter., XXVII, 26. 3 Jerem., XXXI, 31 et seq.

est donc cette vertu merveilleuse qui entre si profondément dans nos cœurs? D'où vient à cette loi nouvelle cette force si pénétrante? Chères sœurs, elle vient de l'Esprit de Dieu, qui est le vrai moteur de nos ames, qui tient nos cœurs en sa main, qui est le maître de nos inclinations. Mais par quelle sorte d'opérations la porte-t-il ainsi au fond de nous-mêmes? C'est par une charité très-sincère, par un puissant amour qu'il nous inspire, par une chaste délectation, par une sainte et ravissante douceur.

Dieu exerce deux sortes d'opérations sur nos ames, qui font la différence des deux lois. Premièrement il les effraie, il les remplit de la terreur de ses jugemens; et en second lieu il les attire, il les enflamme d'un saint amour. La première opération, qui est la crainte, ne peut pénétrer au fond de nos ames: elle les étonne, elle les ébranle; mais elle ne les change pas. Par exemple, que vous rencontriez des voleurs, si vous êtes le plus fort, ils ne vous abordent qu'avec une apparence de civilité feinte; ils n'en sont pas moins voleurs, ils n'en ont pas l'ame moins avide de carnage et de pillerie. La crainte étouffe les sentimens, elle semble les réprimer; mais elle n'en coupe pas la racine. Voyez cette pierre sur laquelle Dieu écrit sa loi: en est-elle changée pour avoir en soi de si saintes paroles? en est-elle moins dure? Rien moins. Ces saints commandemens ne tiennent qu'à une superficie extérieure. Ainsi en est-il de la loi de Dieu : quand elle n'entre dans nos ames que par la terreur, elle ne touche que la surface; tant qu'il n'y a que cette crainte servile, le fond ne peut être changé comme il faut. Il n'y a que l'amour qui entre au plus secret de nos cœurs; lui seul en a la clef, lui seul en modère les mouvemens. Vous avez de méchantes inclinations, vous avez des affections déréglées jamais elles ne pourront être chassées que par des inclinations contraires, que par un saint amour, que par de chastes affections du vrai bien; ainsi l'ame sera tout autre. L'amour la dilate par une certaine ferveur; il l'ouvre jusqu'au fond pour recevoir la rosée des graces célestes. Ce n'est plus une pierre sur laquelle on écrit au dehors, c'est une cire pénétrée et fondue par une divine chaleur. C'est ainsi que le Sauveur Jésus est véritablement gravé dans toutes les facultés de nos ames. Il est dans nos

volontes toutes transportées de son saint amour. Il est dans la mémoire, car on ne peut oublier ce qu'on aime. Il est dans l'entendement, car l'amour curieux et diligent n'a point d'autre satisfaction que celle de contempler les perfections du bien-aimé qui l'attire. De là il passe dans les corps par l'exercice des vertus et par de saintes opérations, qui prenant leur origine de l'amour de Jésus, en conservent les traits et les caractères.

Tel est, mes très-chères sœurs, l'esprit de la loi nouvelle. C'est pourquoi Dieu ne vient point à nous avec cette apparence terrible qu'il avoit sur le mont de Sina. Là cette montagne fumoit de la majesté du Seigneur, qui « fait distiller les montagnes comme de la cire1; » ici il ne rompt pas seulement un roseau à demi brisé3, il est tout clément et tout débonnaire. Là on n'entend que le bruit d'un long et effroyable tonnerre; ici c'est une voix douce et bénigne : « Apprenez de moi, dit-il, que je suis doux et humble de cœur 3. » Là il est défendu d'approcher sous peine de la vie : « N'approchez pas, dit-il, de peur que vous ne mouriez; et les hommes et les animaux qui approcheront de la montagne, ils mourront de mort. » Ici il change bien de langage: « Venez, venez, ditil 3, approchez, ne craignez pas, mes enfans; venez, oppressés, je vous soulagerai, je vous aiderai à porter vos fardeaux; venez, malades, je vous guérirai; pécheurs, publicains, approchez, je suis votre libérateur; ne chassez pas ces petits enfans, à de tels appartient le royaume de Dieu. » D'où vient ce changement, mes très-chères sœurs? Ah! c'est qu'il se veut faire aimer. Il vient changer la terreur en amour, cette eau froide de la crainte qui resserroit le cœur par une basse et servile timidité, en un vin d'une divine ferveur qui le dilatera, qui l'encouragera, qui l'échauffera par de bienheureuses ardeurs. C'est l'esprit de la loi nouvelle. Je vous ai dit les changemens qu'a faits le Sauveur. L'eau, vous ai-je dit, est fade et insipide. Ainsi étoit la loi dans ses ombres et dans ses figures, si Jésus ne la change en la vérité de son Evangile, vin doux et savoureux qui nous remplit de délices célestes. L'eau n'a point de force pour nous émouvoir. Ainsi

1 Psal. XCVI, 5.
- Matth., XII, 20.— 3 Ibid., XI, 29. —
Matth., XI, 28, et alibi. • Marc., X, 14.

Exod., XIX, 12, 13.

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SERMON POUR LE II DIMANCHE APRÈS L'ÉPIPHANIE.

étoit la loi par sa lettre inutile et impuissante, si elle n'est accompagnée du vin de la loi nouvelle, c'est-à-dire de l'esprit de la grace. Ces deux premiers changemens ne sont que pour le troisième. Assez et trop longtemps nous avons été abreuvés de cette froide terreur; il est temps que nos cœurs soient échauffés de l'amour de Dieu.

Mes sœurs, nous ne sommes plus sous la loi de crainte; nous sommes sous la loi d'amour, parce que nous ne sommes plus dans la servitude; nous sommes dans la liberté des enfans de Dieu. Jésus, qui est la vérité, nous a délivrés. Partant servons notre Dieu d'un amour libéral et sincère. Aimons la justice, aimons la vérité, aimons la vraie et solide raison, aimons l'unique repos. Tout cela c'est Jésus aimons donc Jésus de toute l'affection de nos ames. Qui n'aime pas Jésus, je l'ose dire, il n'est pas chrétien. Un chrétien, c'est un homme renouvelé : nous ne pouvons être renouvelés sans l'esprit de la loi nouvelle; l'esprit de la loi nouvelle, c'est la charité : qui n'a pas la charité n'est pas chrétien. Ah! que le siècle se réjouisse dans les débauches et dans les banquets, dans les vins friands et délicieux! Nous avons un vin dont il nous est permis de nous enivrer; vin qui nous échauffe, mais d'une ardeur toute spirituelle; qui nous fait chanter, mais des cantiques d'amour divin; qui nous ôte la mémoire, mais du monde et de ses vanités; qui nous excite une grande joie, mais une joie que le monde ne comprend pas. Buvons de ce vin, mes très-chères sœurs. Jour et nuit ne respirons que Jésus. Vous particulièrement qu'il a retirées du siècle, goûtez Jésus dans la solitude; c'est là qu'il se communique aux ames fidèles.

Et vous, chères sœurs, que par sa miséricorde infinie il a miraculeusement délivrées des ténèbres de l'hérésie, c'est à vous, c'est à vous que je parle; et quelles paroles pourroient vous exprimer la tendresse que mon cœur a pour vous! Rendez-lui à jamais vos actions de graces. Voyez combien l'erreur est répandue par toute la ville. Dieu vous a triées deux ou trois qu'il a appelées à sa sainte Eglise donc ne soyez pas ingrates à cet inestimable bienfait. Persévérez dans cette bienheureuse vocation. Voyez la pureté, voyez l'innocence et la candeur de ces saintes filles avec lesquelles vous

I conversez. O Dieu, quelle différence de cette véritable dévotion qu'elles vous enseignent en toute humilité et simplicité, avec le i faste et l'orgueil et la piété contrefaite de l'hérésie ! Persévérez, mes très-chères sœurs: n'écoutez ni les larmes ni les reproches de vos parens. Dieu vous fasse la grace d'expérimenter combien sa sainte maison est plus douce que la maison paternelle ! Voyez Eces redoutables autels : les sacremens que nous y distribuons, ce I ne sont pas des ombres ni des figures: nous ne sommes plus sous la loi judaïque; c'est la réalité, c'est la vérité, c'est la propre chair de Jésus autrefois pour nous déchirée; c'est son sang vivifiant épanché pour l'amour de nous. Jouissez des délices de cette chair de laquelle l'hérésie s'est privée pour se repaître de la vanité d'une cène imaginaire, etc.

E

FRAGMENT

POUR

LE SERMON PRÉCÉDENT (a).

Je dis donc avant toutes choses que la loi n'a que des ombres et des figures, selon ce que dit l'apôtre saint Paul : «Toutes choses leur arrivoient en figure 1. » Pour éclaircir cette vérité par la doctrine du saint Apôtre, posons premièrement ce principe: Tout ce qui agit par intelligence, se propose nécessairement une fin à laquelle elle rapporte ses actions; et d'autant plus que la cause est parfaite, d'autant plus ce rapport est exact. Et la raison en est évidente; car si la cause est plus excellente, il s'ensuit que l'opération est mieux ordonnée. Or il est certain que l'ordre consiste dans l'accord de la fin avec les moyens; et c'est de ce concert que résulte cette justesse qu'on appelle l'ordre. Cette vérité étant supposée, passons outre maintenant et disons: La loi est une œuvre d'intelligence et d'une intelligence infinie, parce que c'est une 1 I Cor., X, 11.

(a) Se rapportant au premier point.

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