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talité, la joie de Notre-Seigneur n'entrera pas tant dans notre ame que notre ame entrera tout entière dans cette joie de Notre-Seigneur comme dans un abîme de félicité. Elle en sera pénétrée, elle en sera possédée (a); tout ce qui est mortel sera englouti par la vie, comme dit l'apôtre saint Paul 1; et l'ardeur des joies de la terre étant tout à fait éteinte, il ne restera dans les cœurs que l'attrait immortel de la vérité, et un amour chaste, un amour suprême, un amour immuable pour la justice: Gaudium de veritate, dit saint Augustin.

« Donc, mes frères, dit le saint Apôtre, efforçons-nous d'entrer promptement dans ce repos éternel: » Festinemus ergo ingredi in illam requiem 3. Vous tous qui avez cherché dans la participation des saints sacremens, dans les œuvres de pénitence, dans la grace du jubilé, dans le calme de vos passions, le repos de vos consciences, tournez maintenant tous vos désirs à ce repos éternel où vous n'aurez plus aucune tentation à combattre (b): Festinemus : « Hâtons-nous. » Le paresseux repose dans son crime. Il désespère de pouvoir vaincre. Je ne puis atteindre si loin; toujours des difficultés: Leo est in vid. - Non certes vous ne pourrez point faire un second pas tant que vous n'aurez pas fait le premier. Mais faites un premier effort, passez le premier degré ; vous verrez insensiblement le chemin s'aplanir et se faciliter devant vous: Erunt prava in directa. Vous dites que la vertu est trop difficile: contez-nous donc vos travaux ; dites-nous les efforts que vous avez faits. Mais que vous ne cessiez de nous dire que l'entreprise est impossible, avant que de vous être remué (c); que vous serez accablé d'un travail que vous n'avez pas encore commencé, et fatigué d'un chemin où vous n'avez pas fait encore le premier pas, c'est une lâcheté inouïe (d): Festinemus ergo ingredi in illam requiem.

Il faut travailler. Ceux qui s'imaginent que le temps fera tout seul leur conversion.....; folie et illusion! Il est vrai, je le reconnois, il y a une certaine ardeur de la jeunesse et je ne sais quelle 111 Cor., V, 4.- Confes., lib. X, cap. xxIII, n. 33.- Hebr., IV, 11.— ↳ Prov., XXVI, 13. Luc., III, 5. (a) Var. Absorbée. (b) A combattre aucune tentation. d'avoir fait le moindre effort. — (d) Sans exemple.

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(c) Avant que

force trop violente de la nature que l'âge peut tempérer. Mais cette seconde nature qui se forme par l'habitude, mais cette autre nouvelle ardeur encore plus insensée qui naît de l'accoutumance, le temps ne l'affoiblit pas, mais plutôt il la fortifie. Ainsi vous vous trompez déplorablement, si vous attendez de l'âge et du temps le remède à vos passions, que la raison vous présente en vain. Les vices ne s'affoiblissent pas avec la nature, les inclinations ne se changent pas avec la couleur des cheveux; et, comme dit sagement l'Ecclésiastique, « la vieillesse ne trouve pas ce que la jeunesse n'a pas amassé 1. » Je sais que le temps est un grand secours; mais, Messieurs, il en faut juger comme des occasions. Dans les affaires du monde, chacun attend les momens heureux pour les terminer; mais si vous attendez sans vous remuer, si vous ne savez pas profiter du temps, il passe vainement pour vous et ne vous apporte en passant que des années qui vous incommodent. Ainsi, dans l'affaire de la conversion, celui-là peut beaucoup espérer du temps, qui est actif et vigilant pour s'en servir et le ménager. Mais pour celui qui attend toujours et ne commence jamais, que lui apporte le temps, sinon une atteinte plus forte à sa vie, un plus grand poids à ses crimes, une violence plus tyrannique à ses habitudes? Festinemus ergo: « Hâtonsnous, efforçons-nous. » Il faut combattre, il faut faire effort. Ce sont ici les jours malheureux, les jours de l'ancien Adam, où il faut gagner par nos sueurs et par notre travail le pain de vie éternelle, où les vertus sont sans relâche aux mains avec les vices. Viendra le temps de poser les armes et de recevoir les couronnes, de se refaire du combat et de jouir de la victoire, de se délasser du travail et de goûter le repos : Amodo jam dicit Spiritus ut requiescant à laboribus suis2.

Monseigneur, quoique votre Altesse sérénissime aille être rejetée plus que jamais dans ce glorieux exercice, dans ces illustres fatigues, dans ce noble tumulte de la guerre, je ne crains pas de me tromper ni de parler à contre-temps, en lui proposant pour objet ce grand et éternel repos. Quand je médite attentivement tout l'ordre de votre conduite et les grands événemens dont elle 1 Eccli. XXV, 5. - Apoc., XIV, 13.

est suivie, j'en découvre quelque peinture dans ces paroles d'un prophète : Princeps verò ea quæ digna sunt principe cogitabit, et ipse super duces stabit1: « Le prince prendra des pensées qui seront dignes d'un prince, et il commandera à la tête des chefs et des capitaines. » En effet votre Altesse a pris des pensées qui seront dignes de son rang, de sa naissance et de son courage, quand elle s'est fidèlement attachée au plus grand monarque du monde, et que cherchant son honneur dans sa soumission, elle n'a médité que de grands desseins pour sa gloire et pour son service: Princeps ea quæ digna sunt principe cogitabit, et ipse super duces stabit.

CINQUIÈME SERMON

POUR

LA FÊTE DE LA CIRCONCISION (a).

Vocabis nomen ejus Jesum: ipse enim salvum faciet populum suum à peccatis eorum.

Vous donnerez à l'enfant le nom de Jésus, c'est-à-dire celui de Sauveur; car c'est lui qui sauvera le peuple de ses péchés. Matth., I, 21.

Un nom donné par l'ordre de Dieu doit aussi être expliqué par le même ordre; jamais nous ne serons capables d'entendre les mystères admirables du nom de Jésus, si le Saint-Esprit ne nous les découvre. Il le fait aussi, chrétiens; et il nous apprend dans mon texte que la raison précise et essentielle pour laquelle ce divin nom est dû par excellence au Fils de Marie, c'est qu'il est envoyé pour sauver son peuple de la tyrannie du péché. De même

1 Isa., XXXII, 8.

(a) Prêché probablement en 1669.

Les premiers éditeurs avoient supprimé l'exorde, fait du premier point un morceau détaché, mêlé le troisième point avec le même point du sermon précédent et mis bout à bout les deux péroraisons, auxquelles Déforis avoit joint une autre péroraison qu'on trouvera plus loin, et l'allocution au prince de Condé.

que s'il disoit: Il y a plusieurs Jésus et plusieurs Sauveurs. Les uns ont mérité ce beau titre pour avoir délivré les peuples d'une longue captivité, les autres pour les avoir sauvés ou des périls de la guerre ou des horreurs de la famine. Celui-ci est Sauveur par un autre titre; son caractère particulier, c'est qu'il nous sauve de tous nos péchés; et c'est pour cela que nous délivrant du plus grand de tous les malheurs, il mérite d'être nommé et le Sauveur véritable, et l'unique libérateur, et le Jésus par excellence: Ipse enim salvum faciet populum suum à peccatis eorum1. Ainsi toute la grandeur du nom de Jésus, c'est de nous désigner personnellement celui qui est envoyé de Dieu pour ôter les péchés du monde, et c'est aussi cette délivrance que j'ai dessein de vous faire entendre pour célébrer dignement la gloire d'un nom si auguste.

Or, Messieurs, j'ai appris de saint Augustin que cette grace de délivrance de tous nos péchés a trois parties principales et essentielles. Jésus, dit-il, est l'Agneau de Dieu, et il ôte les péchés du monde en trois façons différentes, «et parce qu'il remet ceux qu'on a commis, et parce qu'il nous aide pour n'en plus commettre, et parce que par plusieurs périls et par plusieurs exercices il nous mène enfin à la vie où nous ne pouvons plus en commettre aucun : » Et dimittendo quæ facta sunt, et adjuvando ne fiant, et perducendo ad vitam ubi fieri omnino non possint".

Et en effet, chrétiens, si nous méditons attentivement comment le péché nous tient captifs, il nous sera aisé de connoître que cette misérable servitude consiste en trois choses. Lorsque nous l'avons commis, il a sa tache inhérente en nous et sa coulpe qui nous infecte. Et quand elle est effacée, il a encore ses appas trompeurs et ses tentations qui nous attirent. Et dans la plus grande rigueur de la résistance, voire même dans le sanctuaire et dans l'honneur du triomphe, encore que nous vivions sans péché, nous ne vivons pas sans péril, ayant toujours en nous-mêmes non-seulement la liberté malheureuse, mais encore la facilité tout entière, et certainement très-entière, de céder à cet ennemi. Ainsi ce divin Jésus, pour être notre Jésus et nous sauver du péché dans toute 1 Matth., 1, 21. — Oper. imperf. Cont. Julian., lib. II, n. 84.

son étendue, doit nous délivrer par sa grace, premièrement de la coulpe, secondement de l'attrait, troisièmement du péril. C'est ce qu'il fait, chrétiens; et il efface la coulpe par la grace de la rémission, il nous sauve de l'attrait du crime par la grace de son soutien, il nous tire de tout péril en nous conduisant à la vie heureuse où nous n'avons plus à craindre aucune foiblesse. C'est pourquoi le même saint Augustin rapporte toujours à ces trois effets les trois opérations de la grace qui nous sauve de la tyrannie du péché; et il dit que la coulpe en est effacée par la grace qui nous régénère (a), que l'attrait et sa puissance est bridée par la grace qui nous assiste, enfin qu'il est guéri sans retour et déraciné tout à fait par la grace qui nous récompense. (b) Voilà, Messieurs, les trois graces par lesquelles le Fils de Dieu nous délivre de nos péchés et se montre notre Sauveur : par la première il nous justifie, par la seconde il nous exerce, par la troisième il nous couronne. En ces trois graces est renfermé tout le salut que nous espérons en Notre-Seigneur. Voyons donc aujourd'hui, Messieurs, combien chacun de ces trois bienfaits nous rend redevables au Sauveur des ames, et célébrons-les par ordre dans les trois points de ce discours..

PREMIER POINT.

Quand nous considérons la première idée que jette dans nos esprits le nom de Sauveur, rien ne nous paroît ni plus beau, ni plus grand, ni plus désirable. Ce nom met tous les hommes aux pieds de Jésus, lui donne autant de sujets et de créatures nouvelles qu'il délivre de captifs et qu'il affranchit d'esclaves, les attache à sa personne sacrée par les plus aimables de tous les liens, c'est-àdire par les bienfaits, le fait les délices du genre humain et l'objet éternel de notre amour. (c) Mais certes quand on regarde à quoi

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(a) Var. Justifie. (b) Note marg. : Dei gratiâ regenerante impetrandum, Dei gratia juvante frenandum, Dei gratiâ remunerante sanandum (Lib. II Cont. Julian., cap. IV). — (c) Il naît comme un banni. Il va à la cité de David, à la source de son extraction royale; mais les siens ne l'ont pas reçu. Une étable..... Comparatus est jumentis. Il s'égale aux animaux par la demeure, parce que les hommes se sont ravilis jusqu'à leur condition par leurs brutales convoitises..... Il ne se sauve point à main armée, il se sauve comme un esclave par la fuite. (Cette note sert à ramener le discours à la fête de Noël.)

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