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nécessaire, au dedans par ses graces et son Saint-Esprit, au dehors par la protection angélique. Rien n'y manque, elle est impre nable, elle ne peut être prise que par trahison. Traîtres et perfides que nous sommes, nous la livrons à Satan, nous vendons à Satan le prix du sang de Jésus; à Satan son ennemi capital, qui a voulu envahir son trône, qui n'ayant pas pu réussir au ciel dans son audacieuse entreprise, est venu sur la terre lui disputer son royaume et se faire adorer en sa place. O perfidie! ô indignité ! c'est pour servir Satan que nous trahissons notre prince crucifié pour nous, notre unique libérateur.

Figurez-vous, chrétiens, qu'aujourd'hui au milieu de cette assemblée paroît tout à coup un ange de Dieu qui fait retentir à nos oreilles ce que disoit autrefois Elie aux Samaritains: « Peuples, jusqu'à quand chancellerez-vous entre deux partis? » Quousque claudicatis in duas partes 1? Si le Dieu d'Israël est le vrai Dieu, il faut l'adorer; si Baal est Dieu, il faut l'adorer. Chers frères, les prédicateurs sont les anges du Dieu des armées. Je vous dis donc aujourd'hui à tous, et Dieu veuille que je me le dise à moi-même comme il faut : Quousque claudicatis ? « Jusqu'à quand serez-vous chancelans?» Si Jésus est votre roi, rendez-lui vos obéissances; si Satan est votre roi, rangez-vous du côté de Satan. Il faut prendre parti aujourd'hui. Ah! mes frères, vous frémissez à cette horrible proposition. A Jésus, à Jésus! dites-vous; il n'y a pas ici lieu de délibérer. Et moi, nonobstant ce que vous me dites, je réitère encore la même demande : Quousque claudicatis in duas partes ? Eh! serez-vous à jamais chancelans, sans prendre parti comme il faut? «Si je suis votre maître, dit le Seigneur par la bouche de son prophète, où est l'honneur que vous me devez 2? » « Et pourquoi m'appelez-vous Seigneur, et ne faites pas ce que je vous dis, » dit Notre-Seigneur en son Evangile ? Que voulez-vous que l'on croie, ou nos paroles, ou nos actions?

Le Fils de Dieu nous ordonne que nous approchions de son Père en toute pureté et en tempérance. Et pourquoi donc tant d'infàmes désirs? Pourquoi tant d'excessives débauches? Il nous ordonne d'être charitables; et, fidèles, la charité pourra-t-elle jamais III Reg., XVIII, 21.- Malach., 1, 6. 8 Matth., VII, 21.

s'accorder avec nos secrètes envies, avec nos médisances continuelles, avec nos inimitiés irréconciliables? Le Fils de Dieu nous ordonne de soulager les pauvres autant que nous le pourrons; et nous ne craignons pas de consumer la substance du pauvre ou par de cruelles rapines, ou par des usures plus que judaïques : Quousque claudicatis? Mes frères, il ne faut plus chanceler; il faut être tout un ou tout autre. Si Jésus est notre roi, donnons-lui nos œuvres comme nous lui donnons nos paroles. Si Satan est notre roi, ô chose abominable! mais la dureté de nos cœurs nous contraint de parler de la sorte; si Satan est notre roi, ne lui refusons pas nos paroles après lui avoir donné nos actions. Mais à Dieu ne plaise, mes frères, que jamais nous fassions un tel choix ! Et comment pourrions-nous supporter les regards de cet Agneau sans tache, meurtri pour l'amour de nous? Dans cette terrible journée, où ce roi descendra en sa majesté juger les vivans et les morts, comment soutiendrions-nous l'aspect de ses plaies qui nous reprocheroient notre ingratitude? Où trouverions-nous des antres assez obscurs et des abîmes assez profonds, pour cacher une si noire perfidie? Et comment souffririons-nous les reproches de cette tendre amitié si indignement méprisée, et la voix effroyable du sang de l'Agneau qui a crié pour nous sur la croix pardon et miséricorde, et dans ce jour de colère criera vengeance contre notre foi mal gardée et contre nos sermens infidèles?

O Dieu éternel! combien dur, combien insupportable sera ce règne que Jésus commencera en ces jours d'exercer sur ses ennemis! Car enfin, fidèles, il est nécessaire qu'il règne sur nous. L'empire des nations lui est promis par les prophéties. S'il ne règne sur nos ames par miséricorde, il y régnera par justice; s'il n'y règne par amour et par grace, il y régnera par la sévérité de ses jugemens et par la rigueur de ses ordonnances. Et que diront les méchans, quand ils sentiront, malgré qu'ils en aient, leur roi en eux-mêmes appesantir sur eux son bras tout-puissant; lorsque Dieu frappant d'une main, soutenant de l'autre, les brisera éternellement de ses coups sans les consumer? Et ainsi toujours vivans et toujours mourans, immortels pour leur peine, trop forts pour mourir, trop foibles pour supporter, ils gémiront à jamais sur des lits de

flammes, outrés de furieuses et irrémédiables douleurs; et poussant parmi des blasphèmes exécrables mille plaintes désespérées, ils confesseront par une pénitence tardive qu'il n'y avoit rien de si raisonnable que de laisser régner Jésus sur leurs ames. Dignes certes des plus horribles supplices, pour avoir préféré la tyrannie de l'usurpateur à la douce et légitime domination du prince naturel. O Dieu et Père de miséricorde, détournez ces malheurs de dessus nos têtes.

Mes frères, ne voulez-vous pas bien que je renouvelle aujourd'hui le serment de fidélité que nous devons tous à notre grand roi ? O roi Jésus, à qui nous appartenons à si juste titre, qui nous avez rachetés par un prix d'amour et de charité infinie, je vous reconnois pour mon souverain. C'est à vous seul que je me dévoue. Votre amour sera ma vie, votre loi sera la loi de mon cœur. Je chanterai vos louanges, jamais je ne cesserai de publier vos miséricordes. Je veux vous être fidèle, je veux être à vous sans réserve, je veux vous consacrer tous mes soins, je veux vivre et mourir à votre service. Amen.

SECOND SERMON

POUR

LA FÊTE DE LA CIRCONCISION (a).

Deus autem rex noster ante sæcula, operatus est salutem in medio terræ. Dieu, qui est notre roi avant tous les siècles, a opéré notre salut au milieu de la terre. Psal. LXXIII, 12.

Quoique nous apprenions par les saintes Lettres que Dieu se considère dans tous ses ouvrages, et que ne voyant rien dans le

(a) On verra dans ce sermon quelques traductions triviales et quelques notes; mais on n'y trouvera ni division ni parties distinctes, pour ainsi dire ni commencement ni fin. C'est que la main de dom Déforis a passé par là: « Nous avons, dit-il dans une première note, supprimé de ce sermon plusieurs morceaux

monde qui ne soit infiniment au-dessous de lui, il ne voit aussi que lui-même qui mérite d'être la fin de ses actions; toutefois il est assuré qu'il n'augmente pas pour cela ses propres richesses, parce qu'elles sont infinies. Quelques beaux ouvrages que produise sa toute-puissance, il n'en retire aucun bien que celui d'en faire aux autres, il n'y peut rien acquérir que le titre de bienfaiteur; et l'intérêt de ses créatures se trouve si heureusement conjoint avec le sien, que comme il ne leur donne que pour l'avancement de sa gloire, aussi ne peut-il avoir de plus grande gloire que de leur donner. C'est pourquoi l'Eglise inspirée de Dieu nous apprend, dans le sacrifice, à lui rendre graces pour sa grande gloire Gratias agimus tibi propter magnam gloriam tuam, afin que nous comprenions par cette prière que la grande gloire de Dieu c'est d'être libéral à sa créature. C'est pour cette raison que le Fils de Dieu prend aujourd'hui le nom de Jésus et la qualité de Sauveur. Ce n'est pas assez que l'on nous enseigne que ce petit enfant est né pour les hommes, il faut que son nom nous le fasse entendre; et il en revient à notre nature ce grand et glorieux avantage, qu'on ne peut honorer le nom de Jésus sans célébrer aussi notre délivrance, et ainsi que le salut des mortels est devenu si considérable qu'il fait non-seulement le bonheur des hommes et le sujet des hymnes des anges, mais encore le triomphe du Fils de Dieu même.

Sainte Mère de mon Sauveur, dont le Saint-Esprit s'est servi pour lui donner un nom si aimable, obtenez-nous de Dieu cette grace, que nous en sentions les douceurs que l'ange commença de vous expliquer, après qu'il vous eut ainsi saluée : Ave, Maria.

tirés mot à mot du précédent, qui pouvoient être retranchés sans interrompre l'ordre et la suite du discours. » Pardon, tout cela est interrompu; mais on n'a pu dans cette édition rétablir le plan de l'auteur, parce qu'on a vainement cherché le manuscrit original.

Cependant on peut dire avec la plus grande probabilité que notre sermon a été prêché à Metz vers 1656. Malgré les suppressions du premier éditeur, il renferme encore plusieurs passages qui se trouvent littéralement dans le sermon précédent, et Bossuet n'auroit pas fait dans la grande époque de sa mission apos tolique des emprunts pareils à ses compositions de Metz. On y remarque aussi certaines expressions qu'il a bannies plus tard, par exemple : « Le prince Jésus, rien ne se derobe de son empire, il lui plait établir; ce qu'il daigne régner sur nous, c'est miséricorde, » etc.

Encore que le mystère de cette journée cachant à nos yeux la divinité, nous représente le Fils de Dieu, non-seulement dans l'infirmité de la chair, mais encore dans la bassesse de la servitude, et que les cris, les gémissemens et le sang de cet enfant circoncis semblent plutôt exciter en nous les tendresses de la pitié que les soumissions du respect: néanmoins la foi pénétrante, qui ne peut être surprise par les apparences, nous découvre dans ses foiblesses des marques illustres de sa grandeur et des témoignages certains de sa royauté. C'est, fidèles, cette vérité chrétienne que je me propose de vous faire entendre avec le secours de la grace. J'espère que vous verrez aujourd'hui dans le nom que l'on impose au Sauveur des ames et dans les prémices du sang précieux qu'il commence à verser pour l'amour des hommes, une expression évidente de la souveraineté très-auguste que son père céleste lui a destinée. Et vous reconnoîtrez que cette doctrine nous est infiniment fructueuse, puisqu'en établissant la gloire du maître et les droits de sa royauté, elle nous apprend tout ensemble les devoirs de l'obéissance.

Entrons donc en cette matière sous la conduite des Lettres sacrées, et disons avant toutes choses que le nom de Jésus est un nom de roi, et qu'il signifie une royauté qui n'est pas moins légitime qu'elle est absolue. Pour mettre cette vérité dans son jour, je suppose premièrement que la royauté est le véritable apanage de la nature divine, à laquelle seule appartient la souveraineté et l'indépendance. Or, entre tous les divins attributs, il y en a trois principaux qui établissent le règne de Dieu sur ses créatures, la puissance, la justice, la miséricorde. Que Dieu règne par sa puissance, c'est une vérité si constante, qu'elle entre par elle-même dans tous les esprits sans qu'il soit besoin d'alléguer des preuves. En effet c'est par sa puissance qu'il dispose des créatures, ainsi qu'il lui plaît, sans que rien puisse résister à ses volontés; et par conséquent il en est le roi avec une autorité qui n'a point de bornes. C'est pourquoi l'apôtre saint Paul en parlant de Dieu : C'est, dit-il, «le bienheureux et le seul puissant; » et il ajoute aussitôt après : « Le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs'; » comme ayant I Timoth., VI, 15.

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