Obrazy na stronie
PDF
ePub

* Relation

de la conférence de

Bossuet avec le ministre Claude.

Bossuet crut remarquer que cette objection faisoit impression sur ceux qui l'écoutoient; mais il en montra bientôt toute la foiblesse, quelque spécieuse qu'elle parût d'abord.

>>

[ocr errors]

<< * Pour peu qu'un pareil argument pût avoir quelque force, reprit Bossuet, il auroit fallu >> qu'au moment où JÉSUS-CHRIST fut condamné » par la synagogue, il n'y eût eu aucun moyen » extérieur, aucune autorité certaine à laquelle » on dût nécessairement céder; mais qui oseroit » le dire, puisque JÉSUS-CHRIST étoit lui-même » sur la terre et paroissoit visiblement au milieu >> des hommes pour confirmer sa mission? Jésus>> CHRIST ressuscitoit les morts, guérissoit les aveugles-nés, et faisoit tant de miracles, que les Juifs >> confessoient eux-mêmes que jamais homme » n'en avoit tant fait. Il y avoit donc un moyen » extérieur pour connoître la vérité, une auto>> rité visible pour la confirmer. Mais cette au>> torité étoit contestée. Il est vrai, mais elle » étoit infaillible. Je ne prétends pas que l'auto» rité de l'Eglise ne soit jamais contestée. Je vous » écoute, vous, Monsieur, qui la contestez. Mais » je dis qu'elle ne doit pas l'être par les Chrétiens; » je dis qu'elle est infaillible..... Je dis qu'il n'y » eut jamais aucun temps où il n'y ait eu sur la » terre une autorité visible et parlante, à qui il » faille céder. Avant JÉSUS-CHRIST, nous avions

>> la synagogue; au moment où la synagogue >> tombe, JÉSUS-CHRIST paroît lui-même; quand » Jésus-ChrisT abandonne la terre et monte au » ciel, il laisse son esprit à son Eglise. Faites re» venir JÉSUS-CHRIST enseignant, préchant, fai»sant des miracles, je n'ai plus besoin de l'Eglise; mais aussi ôtez-moi l'Eglise, il me faut » JÉSUS-CHRIST en personne, parlant, préchant, » décidant avec des miracles et une autorité in

[ocr errors]
[ocr errors]

faillible. Nous avons l'Ecriture, dites-vous; » oui, sans doule, nous avons cette parole divine; » mais qui se laisse expliquer et manier comme » on veut, et qui ne réplique rien à ceux qui l'en»tendent mal. Or, il faut un moyen extérieur » de se résoudre sur les doutes, et que ce moyen » soit certain; et il ne peut se trouver que dans » une Eglise infaillible ».

Le second article, où le ministre Claude ne montra pas moins de talent et de subtilité, fut celui où Bossuet avoit établi, que par le baptême et la profession du symbole commun à tous les Chrétiens, ils étoient excités et s'engageoient à croire à l'autorité de l'Eglise, que c'étoit ensuite par l'Eglise qu'ils recevoient les Ecritures avec les interprétations qu'il appartenoit à l'Eglise seule de donner aux livres sacrés.

«<* Mais, reprit le ministre Claude, par ce rai- * Ibid.

* Relation

de la confé

rence de

» sonnement, vous feriez conclure à chacun en
>> faveur de son Eglise. Les Grecs, les Arméniens,
» les Ethiopiens, nous-mêmes que vous croyez
» dans l'erreur, chacun de nous a reçu l'Ecriture
»sainte de l'Eglise où il a été baptisé. Chacun la
» croit la vraie Eglise énoncée dans le symbole,
» et dans les commencemens on n'en connoît
» même d'autre. Si, ayant reçu sans examen
» l'Ecriture de cette Eglise où nous avons été bap-
» tisés, il faut aussi en recevoir aveuglément tou-
»tes les interprétations, c'est un argument pour
>> conclure que chacun doit rester dans sa reli-
» >> gion »>.

pas

C'étoit en vérité, dit Bossuet dans sa relation, tout ce qui se pouvoit objecter de plus fort; et quoique la solution de ce doute me parút claire, j'étois en peine comment je pourrois la rendre claire à ceux qui m'écoutoient; je ne parlois qu'en tremblant, voyant qu'il s'agissoit du salut d'une ame; et je priois Dieu qui me faisoit voir si clairement la vérité, qu'il me donnát des paroles pour la mettre dans tout son jour; car j'avois affaire à un homme qui écoutoit patiemment, qui parloit avec force et netteté, et qui enfin poussoit les difficultés aux dernières précisions.

Bossuet répondit «* que premièrement il fal»loit distinguer la cause des Grecs, des Armé

le ministre

>niens et des autres communions chrétiennes, de Bossuet avee >> celle des Protestans; que dans ces communions, Claude. » ils errent à la vérité en prenant une fausse église » pour l'Eglise véritable; mais que du moins elles » établissent en principe qu'il faut croire à la vé» ritable Eglise quelle qu'elle soit, et qu'elle ne >> trompe jamais ses enfans; au lieu que les Pro>> testans établissent en principe, qu'on n'est pas obligé de soumettre son jugement particulier » à celui de l'Eglise qu'on reconnoît être la véri>> table ».

[ocr errors]

Ainsi, lorsque les Catholiques ont à discuter avec des Grecs et des Arméniens, c'est aux premiers à prouver qu'ils sont dans la véritable Eglise, et que les autres l'ont abandonnée. Mais les Protestans sont entièrement étrangers à cette discussion, puisqu'ils refusent à toute église quelconque une autorité de décision.

« De cette différence dont vous ne pouvez pas » contester la justesse, reprit Bossuet*, voici l'a» bîme où va vous jeter l'opinion où vous êtes, qu'on ne doit pas même croire à la véritable

[ocr errors]

>>

[ocr errors]

Eglise. Car il s'ensuit de votre principe que le fidèle ne peut pas même croire sur la foi de

l'Eglise que l'ECRITURE est la parole de DIEU. » — Il le peut d'une foi humaine, et non d'une » foi divine. Qui dit une foi humaine, dit une

* Ibid.

[merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small]
[ocr errors]

qu'il est dans le doute. Douter, c'est ne savoir

» pas

» ter.

[ocr errors]

si une chose est ou non. M. Claude répon>> doit toujours que c'est là ignorer, et non douEh bien, laissons là les mots. Il ne doute » pas, mais il ne sait pas si l'ECRITURE SAINTE est » une vérité ou une fable. Il ne sait pas si l'E» vangile est une histoire inspirée de Dieu, ou un » conte inventé par les hommes. Il ne peut donc » pas faire sur ce point un acte de foi divine; il » n'a donc qu'une foi humaine à la parole même » de Dieu ».

M. Claude en convint; Eh bien! Monsieur, c'est assez, lui dit Bossuet. Il y a donc dans votre religion un point où un Chrétien ne sait même si l'EVANGILE est une fable ou une vé

pas

rité.

M. Claude ne répondit rien, tout le monde se leva, et il n'y eut plus que quelques légères discussions sur des points moins importans. Bossuet avoit dès la veille annoncé à M."le de Duras qu'il ameneroit, bon gré malgré, le ministre Claude à cet étrange aveu, et elle n'avoit jamais pu le croire.

Bossuet revit le lendemain M.lle de Duras, et il la trouva dans les dispositions qu'il en avoit

« PoprzedniaDalej »