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CHAPITRE III.

De l'esclavage.

LES défenses contenues dans le dernier chapitre doivent aussi s'appliquer aux esclaves, puisqu'elles sont fondées sur un principe indépendant du contrat entre le maître et le domestique.

Je définis l'esclavage : « l'obligation de tra>> vailler pour le bénéfice du maître, sans le » consentement du serviteur. »

Cette obligation, sans violer la loi de nature, peut naître de ces trois causes.

1. Des crimes.

2. De la captivité.

3. Des dettes.

Dans le premier cas, la durée de l'esclavage, comme celle de toute autre punition, doit être proportionnée au crime. Dans le second et dans le troisième elle doit cesser aussitôt que les prétentions de la nation injuriée, ou du créancier particulier, sont satisfaites.

Aucun de ces principes ne justifie la traite des nègres sur les côtes d'Afrique. Lorsque, dans ce pays, l'on présente un esclave au marché, je ne pense pas qu'il soit fait aucune question sur le titre du vendeur. On peut donc présumer que ce titre n'est pas

toujours si du moins il l'est quelquefois fondé sur quelqu'une des causes dont nous venons de parler.

Mais le défaut de droit dans le premier achat est le moindre des crimes que l'on peut imputer à ce trafic. Les naturels du pays sont excités à la guerre et à des déprédations mutuelles, afin de remplir leurs engagemens et de fournir des esclaves au marché. C'est là que commence le mal. Les esclaves, arrachés à leurs parens, à leurs femmes, à leurs enfans, à leurs amis et à leurs compagnons, à leurs champs et à leurs troupeaux, à leurs habitations et à leur patrie, sont transportés en Amérique, sans autre nourriture, sur les vaisseaux, que celle que l'on accorde aux brutes. Voilà le second degré de cruauté. Les misérables en sont délivrés, pour être soumis, et cela pour leur vie, à une domination et à des lois les plus tyranniques et les plus impitoyables qu'on ait jamais supportées sur la face de la terre. Et d'après le récit de ceux qui en ont été les témoins, cette autorité arbitraire, que les lois des plantations accordent au maître sur les esclaves, est exercée, surtout par les maîtres anglais, avec une rigueur et une brutalité extrêmes.

L'on se fonde sur la nécessité. C'est par ce mot que l'on a toujours voulu justifier les plus grands abus. Et, après tout, quelle est cette nécessité? A-t-il jamais été prouvé que la terre

ne peut pas être cultivée dans ce pays, comme dans le nôtre, par des domestiques gagés L'on dit que, par ce moyen, l'on n'obtiendrait ni la même commodité ni la même économie; en sorte qu'une livre de sucre, que le planteur donne maintenant à dix sous, ne pourrait se donner qu'à onze: - et voilà quelle est la

nécessité.

La grande révolution arrivée dans les Indes Occidentales conduira probablement ( et qui sait si ce n'était point là un dessein de la providence) à la chûte complète de cette abominable tyrannie. Et maintenant que cette lutte, et les passions qu'elle avait fait naitre ne sont plus, il peut venir un temps où l'on se demandera si une législation, qui a si longtemps prêté son assistance à une institution si féconde en malheurs, était bien propre diriger un empire, le plus étendu, peut-être,' qu'il y ait eu dans aucun âge et dans aucune partie du monde.

à

L'esclavage faisait partie de la constitution civile de la plupart des états, lorsque le christianisme parut. Cependant on ne trouve pas dans l'écriture sainte un seul passage, où il soit condamné ou défendu. Cela est vrai; car la religion chrétienne, voulant être reçue dans tous les pays du monde, dut éviter de se mêler des institutions civiles d'aucun. Mais s'ensuit-il du silence de l'écriture à leur égard,

que toutes les institutions civiles, alors en vigueur, étaient également bonnes? ou qu'il n'était utile d'échanger la plus mauvaise contre la meilleure?

pas

Outre cela, si l'on avait dégagé les esclaves de toute obligation d'obéir à leur maître; ou, ce qui revient au même pour la conséquence, si l'on avait prononcé que l'esclavage est illégitime, l'on n'aurait fait que déchaîner une moitié du genre humain contre l'autre moitié. Les esclaves auraient probablement embrassé une religion, qui défendait hautement leurs droits à la liberté. Les maîtres auraient été difficilement conduits à satisfaire à des prétentions fondées sur une telle autorité. La conséquence en aurait été peut-être la plus grande de toutes les calamités, une guerre d'esclaves, pour la honte, et pour l'extinction peut-être du nom chrétien.

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La vérité est que l'émancipation des esclaves devrait être graduelle; elle devrait s'exécuter suivant des règlemens publics, et sous la tection du gouvernement civil. Le christianisme ne peut qu'adoucir. Par la douce effusion de sa lumière et de son influence, les esprits sont insensiblement préparés à reconnaître et à corriger les abus, que la folie, la méchanceté, ou le hasard ont introduits dans les établissemens publics. C'est ainsi que l'esclavage des Grecs et des Romains, et ensuite l'esclavage

de la tyrannie féodale, ont disparu devant lui. Et nous espérons qu'à mesure que la connaissance et l'autorité de cette même religion feront de nouveaux progrès dans le monde, elles en banniront ce qui reste de cette odieuse institution.

CHAPITRE IV.

Charité.

Secours qu'un homme peut accorder par sa profession.

On doit attendre principalement ce genre de bienfaisance des membres de la législature, des magistrats, et de ceux qui exercent une profession judiciaire, médicale, ou sacerdotale.

1. Le soin des pauvres doit être le principal objet de toutes les lois, par cette raison toute simple, que les riches sont en état de prendre soin d'eux-mêmes.

Les lois de ce pays ont fait beaucoup, et pourraient faire plus encore, pour soulager les infirmes, et soutenir ou encourager les pauvres industrieux. Quiconque s'applique à rassembler des observations sur l'état et l'influence des lois concernant les pauvres; à chercher des remèdes pour les imperfections et les abus qui se présentent à lui; à rédiger ces amélio

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