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t-il aussitôt, qu'on vous traitât ainsi? Personne ne lui a appris cette maxime nous ne devons pas faire à autrui ce que nous ne voudrions pas qui nous fút fait à nous-mêmes il ne l'a lue que dans son cœur ; et sans l'avoir jamais mise à l'épreuve, il la réclame contre vous d'un ton ferme et avec une pleine confiance, bien sûr que c'est votre sentence qu'il prononce ; et que, quelque soit l'avantage que vous donnent sur lui les années, la force ou l'adresse, votre conscience n'osera pas en appeler. Et quel bonheur pour nous que les choses soient ainsi ! « Nous sommes en» tourés d'hommes plus forts que nous, dit Mon

tesquieu, ils peuvent nous nuire de mille ma>> nières différentes ; les trois quarts du temps ils > peuvent le faire impunément. Quel repos pour > nous de savoir qu'il y a dans le cœur de tous » ces hommes un principe intérieur qui combat ⚫en notre faveur, et nous met à couvert de leurs > entreprises! Sans cela nous devrions être dans >> une frayeur continuelle, nous passerions de> vant les hommes comme devant les lions, et > nous ne serions jamais assurés un moment de >> notre vie, de notre bien, ni de notre honneur.> (81 Lett., pers.)

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Ses priviléges à cet égard ne s'étendent pas plus loin que ceux des autres sentimens intérieurs et des idées claires de l'entendement. Mais de même que c'est à l'inattention et aux illusions qui nous séduisent, et non à ces deux sources de nos connoissances que nous devons imputer les erreurs dans lesquelles nous tombons en cherchant la vérité par leurs secours; de même ce n'est pas le sentiment moral qui nous égare, mais une voix trompeuse qui se fait entendre à sa place. Ecoutons là-dessus Rousseau qui n'a jamais parlé avec plus d'éloquence et de vérité, que dans la partie de sa Profession de foi, où il traite de la conscience: «< ce n'est pas assez, dit-il, que ce guide » existe; il faut savoir le reconnoître et le suivre. » S'il parle à tous les cœurs, pourquoi donc y » en a-t-il si peu qui l'entendent? eh! c'est qu'il » nous parle la langue de la nature que tout nous » a fait oublier. La conscience est timide, elle » aime la retraite et la paix ; le monde et le bruit » l'épouvantent; les préjugés dont on la fait naî» tre, sont ses plus cruels ennemis, elle fuit ou ✰ se tait devant eux; leur voix bruyante étouffe » la sienne et l'empêche de se faire entendre; le >> fanatisme ose la contrefaire et dicter le crime en » son nom. Elle se rebute enfin à force d'être » éconduite; elle ne nous parle plus, elle ne nous » répond plus; et après de si longs mépris pour » elle, il en coûte autant de la rappeler qu'il en >> coûta de la bannir. »

Que faut-il donc pour recevoir véritablement les réponses de la conscience? l'interroger avec un cœur pur et droit. Il n'en est pas des vérités morales et religieuses qu'elle nous enseigne ou auxquelles elle nous dispose comme des vérités mathématiques. Celles-ci n'ont par elles-mêmes aucune influence sur notre sort éternel; elles sont essentiellement bornées à la vie présente : par elles-mêmes encore elles ne servent de rien pour régler les affections de notre cœur elles peuvent occuper utilement et agréablement notre esprit; mais elles ne nous rendent ni meilleurs ni plus heureux: ainsi nous pouvons les ignorer sans qu'il en résulte aucune fâcheuse conséquence pour nous. Il est donc naturel qu'elles se rapportent à l'entendement seul, que la connoissance que nous pouvons en acquérir soit uniquement le fruit des talens et de l'application; et que, quelles que soient les dispositions de notre cœur, la lumière avec laquelle elles se présentent à notre esprit, n'éprouve aucun obscurcissement. Mais la connoissance des vérités morales et religieuses est pour tous les hommes sans exception d'une nécessité indispensable: il falloit pour cette raison que Dieu la fit dépendre, non de la force de l'esprit qu'il n'accorde pas à tous, mais de la pureté du cœur que tout homme peut obtenir. D'ailleurs, c'est une faveur bien précieuse qu'une telle connoissance, puisqu'elle est le principe de notre éternelle félicité; et c'est

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une punition terrible d'en être privé. Or, il ne peut y avoir ni mérite à posséder de grands talens, ni démérite à en être dépourvu. Au contraire un cœur droit est nécessairement agréable à Dieu; et un cœur corrompu ne peut que déplaire. C'est donc uniquement la disposition de notre cœur qu'il doit considérer, pour nous récompenser ou nous punir en nous accordant ou en retirant de nous ses lumières. Voilà pourquoi ceux qui cherchent sincèrement les vérités dont nous parlons, et plus encore ceux qui les pratiquent en obtiennent une vue si nette et si distincte, quelle que soit la médiocrité de leurs talens; tandis qu'il permet que par rapport à ces mêmes vérités, l'entendement des plus beaux esprits soit obscurci par les passions auxquelles ils s'abandonnent. Les premiers en conservent et en accroissent le sentiment: ceux-ci ne travaillent qu'à l'affoiblir et à l'éteindre. Les uns et les autres sont traités selon les désirs de leurs cœurs.

Nous ne disons rien ici sur l'affoiblissement du sentiment moral, sur les causes qui le produisent, sur les effets qui en résultent, et sur les moyens de le prévenir et d'y remédier, qui ne soit universellement reconnu. Prenez Diderot dans quelques-uns de ses momens lucides, et demandez-lui comment il se fait qu'il existe des athées: <«< il faut en convenir, vous répondra-t-il naïve» ment, l'existence de Dieu répugne à la raison » de ceux qui ne l'adorent pas. » (Nouv. pens.

philosophiques.) Demandez-lui encore, pourquoi les objections contre l'existence de Dieu, ont parues insoutenables au célèbre Sannderson : « c'est, » vous dira-t-il, qu'il avoit une pureté de mœurs >> et une ingénuité de caractère qui manquent aux >> athées ; » (Lett. sur les av.) et il vous dévoilera ainsi, sans s'en douter, le véritable principe de l'athéisme.

Rousseau est en cela parfaitement d'accord avec l'athée Diderot. « Tenez votre ame, dit-il, en >> état de désirer toujours qu'il y ait un Dieu, et » vous n'en douterez jamais. » ( Prof. de foi)

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Aussi quel moyen propose Pascal pour ramener un athée à la connoissance de Dieu! Veut

il qu'on étale à ses yeux les preuves sans nombre de l'existence de la Divinité qui nous environnent de toutes parts? Ce seroit une peine perdue. << Je ne me sens pas assez fort, dit-il, pour trou>> ver dans la nature de quoi convaincre des athées >> endurcis : » (Pens., part. 2, art. 3.) et il a raison. Comment donner à un aveugle quelque idée des admirables effets de la lumière ? il faut avant tout, que la vue lui soit rendue. Le sentiment moral par lequel les preuves de l'existence de Dieu doivent passer pour arriver jusqu'à l'entendement, est nul chez l'athée. Pascal l'exhorte à le rétablir; le moyen qu'il lui indique pour cela, est de mettre son ame en état de désirer qu'il y ait un Dieu; et il lui fait toucher au doigt que la chose en soi est d'une telle importance, qu'il

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