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A saisir ces rapports un génie exercé,

La baguette à la main, comme une autre Circé,
Transforme tous les mots et les tourne en images,
C'est par-là que Voltaire eut droit à nos hommages,
Et que des écrivains il parut le plus grand,
Même en ces vers légers qu'il dictait en courant.
La Métaphore égaye, embellit et varie

De ses moindres billets l'élégance fleurie;

Jamais un goût plus pur n'orna mieux la raison 1.

» faire une métaphore d'une chose qui est métaphorique, >> comme un poëte italien, qui appelle un paon un avril » ailé. » CARPENTARIANA, pag. 109.

L'auteur de la Henriade, de Zaïre, et de Mérope, célébre à tant d'autres titres, n'a pas besoin que l'on parle spécialement du charme de ses pièces fugitives; mais elles auraient suffi à la gloire d'un seul homme, et l'on peut les citer toutes comme les meilleurs modèles du bon choix des Métaphores. Cette abondance d'images, qui rend si étincelantes les pièces de sa jeunesse, ne l'a pas abandonné même au déclin de son âge. Voyez comme on les retrouve, et toujours coulant de source, dans ses vers à DESMAHIS, aimable cajolerie, qu'il a souvent répétée sans se redire jamais :

Vos jeunes mains cueillent des fleurs,

Dont je n'ai plus que les épines, etc.

Dans sa lettre à VOISENON, Sur Isabelle et Gertrude, un de ses contes charmans que FAVART venait de mettre, avec succès, au théâtre; ce qui fournit à VOLTAIRE plusieurs images flatteuses:

J'avais un arbuste inutile

Qui languissait dans mon canton;
Un bon jardinier de la ville
Vient de greffer mon sauvageon.

Mais ici, devant nous, un immense horizon S'ouvre, et plus on le voit, plus il semble s'étendre: L'embrasser d'un coup d'œil, ce serait trop prétendre. Je ne veux pas non plus de tout l'art des rhéteurs Accabler, en un jour, mes jeunes auditeurs.

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Et dans ces dernières stances à madame DUDEFFANT, véritable chant du cygne, où il dépeint sa vieillesse avec des couleurs si fraîches, si vives et si touchantes!

Eh! quoi, vous êtes étonnée,
Qu'au bout de quatre-vingts hivers,
Ma muse, froide et surannée,

Puisse encor fredonner des vers!

Quelquefois un peu de verdure
Rit sous les glaçons de nos champs;
Mais les bergères, les amans,
N'en composent point leur parure.

Après la saison des beaux jours,
Un oiseau peut se faire entendre;
Mais ses chants n'ont plus rien de tendre,
Il ne chante plus ses amours.

Ainsi je touche encor ma lyre,

Qui n'obéit plus à mes doigts;

Ainsi j'essaye encor ma voix,

Au moment même qu'elle expire, etc.

Il faudrait tout copier, si l'on voulait reproduire tous les

Leur âge, ni le mien, ne permet pas sans doute
De franchir d'une traite une si longue route.
Eh bien! prenons haleine! et nous pourrons après,
Nous remettre en chemin sur des coursiers plus frais.

morceaux de ce genre. Ce sont de pareils exemples qui peuvent former le goût et enrichir la mémoire, où ils se gravent sans peine.

Il serait à désirer que l'on fît un bon extrait des OEuvres de ce grand homme. Les VOLTAIRES PORTATIFS que nous possédons déjà sont tronqués outre mesure. Il y aurait un milieu entre cette sécheresse des abrégés étranglés, et les superfluités des éditions complètes. Le choix pourrait être exquis ensemble et irréprochable. VOLTAIRE, rendu classique, orné de très-peu de notes, et imprimé avec soin, serait un des beaux présens qu'on pût faire à la jeunesse.

C'est à lui qu'il faut surtout appliquer le sage avis de QUINTILIEN, qui veut qu'on trie avec le plus grand scrupule non-seulement les auteurs, mais les morceaux des ouvrages destinés à être mis dans les mains des jeunes gens : Non authores tantùm, sed authoris partes elegeris, et par une raison bien digne de cet excellent rhéteur, qui trouvait dans HORACE même quelques endroits dont il n'aurait pas voulu se permettre l'explication: Flaccum in quibusdam nolim interpretari.

Voyez aussi ce que nous disons de l'Euphémisme, à la fin du troisième chant des TROPES.

FIN DU PREMIER CHANT.

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TROPES QUI SONT DES DÉVELOPPEMENS DE LA MÉTAPHORE. L'allégorie; son usage dans l'antiquité, DANS LA RELIGION, DANS LES ARTS. LA FABLE. LE FABLIAU. LA PARABOLE. L'ÉNIGME; son danger. Le PROVERBE. LES Vers devenus proverbes.

LA

A muse qui des mots suit les métamorphoses,
Changeant à volonté les épines en roses,
D'un secret important vous a déjà fait part,
Amis! la Métaphore est la clef de son art.
Si vous voulez descendre à ses divers usages,
Ce Protée étonnant prendra plusieurs visages;
Et d'un fond si brillant, bientôt de tous côtés,
Vont éclore' a l'envi de nouvelles beautés :
Tant cette règle unique est puissante et féconde!

Que votre attention de nouveau me seconde,
O mes jeunes amis!' vous ne vous doutez pas
Du succès qui s'attache à votre premier pas :
Le premier pas en tout est le plus difficile.
Le sujet est conquis; si votre esprit docile

A bien saisi comment deux termes comparés,
Des mots propres, soudain, font des mots figurés;
Les Tropes n'ont plus rien d'ambigu, ni d'oblique ;
La Métaphore, à tous, heureusement s'applique.

A son gré, dans son cours, laissez-la s'allonger!
L'Allégorie en fait son vêtement léger 1.
Comme sous une gaze artistement tissue
Se cache une beauté qui veut être aperçue,
Ou comme on voit reluire à travers le succin
La mouche qui se trouve enfermée en son sein,
Quand la nature veut, étonnante architecte,
Prodiguer tout son luxe au tombeau d'un insecte
Ainsi, l'aveugle amour lance au hasard ses traits;
Le même amour languit sans Bacchus et Cérès 3.

Le mot Allégorie n'est pas dans ARISTOTE. CICERON l'emploie en grec; saint PAUL s'en sert dans l'Epitre aux Galates. QUINTILIEN donne à l'Allégorie le nom d'inversion. D'autres grammairiens latins l'appellent Diversiloquium.

⚫ Cette comparaison est prise de saint AUGUSTIN: Quemadmodum multa per vitrum aut succina pellucent jucundiùs, ità magis delectat veritas per Allegoriam relucens. D. AUGUST. ep. 119. J'ai eu aussi en vue l'épigramme de MARTIAL Sur une vipère qui était dans du succin. 395 Jis Ne tibi regali placeas, Cleopatra, sepulcro,

Vipera si tumulo nobiliore jacet! MARTIAL, L. 4, ep. 48.

3 Refrain d'une ballade de madame DESHOULIÈRES, tiré de ce vers de Térence:

Sine Cerere et Libero friget Venus.

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TERENT, Eunuch. 4,15.

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