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des chants et des danses mélodieuses, sous la conduite du soleil qui règle leurs concerts, ainsi que la poétique antiquité représentoit le choeur des Muses, sous leur beau maître Apollon, ou telles que les sept cordes de la lyre résonnoient sous les doigts d'Homère. Cette ame fortunée laisse bientôt derrière elle le grand essieu de cristal sur lequel roule harmonieusement l'univers. C'est là que trois anges, vêtus de robes plus blanches que la neige, chantent avec des voix éclatantes le passé, le présent et l'avenir. Leur ineffable symphonie forme cette triple voix du temps, que des sages ont quelquefois entendue sur la terre en approchant d'un tombeau, durant le silence des nuits; ou plutôt, c'est cette sorte de musique révélée par Pythagore, et qu'on ne peut ouïr avec l'oreille, mais avec l'entendement et la pensée.

>> Tantôt l'esprit bienheureux s'ouvre une voie glorieuse à travers des sables d'étoiles; tantôt il se plonge dans ces routes ignorées où les comètes promènent leurs pas vagabonds. Et cependant il n'est encore que sur les derniers confins du royaume de Jéhovah; et des soleils après des soleils sortent incessamment de l'immensité, à mesure qu'il avance; et des univers inconnus succèdent à des univers plus ignorés encore; l'infini suit l'infini, et l'espace succède à l'espace. Il voit des globes de toutes les formes, de tous les feux, de toutes les couleurs ; les uns avec des anneaux, les autres avec une multitude de satellites. Il atteint à ces étoiles reculées qu'habitent les exemplaires de ces amès qui doivent un jour animer des corps sur la terre et que Dieu créa toutes à la fois par sa féconde idée après avoir pensé les anges. Enfin une clarté plus vive, des harmonies plus riches et plus pures, lui annoncent la céleste Jérusalem. Cet immense séjour des bienheureux flotte dans la mer de l'immensité, et

n'a d'autre point d'appui que la volonté immédiate de Dieu. Ses murailles sont de jaspes, de pierres vivantes. Il a douze portes de perles, et douze fondements de saphir, de calcédoine, d'émeraude, d'onyx, de topaze, d'hyacinthe et d'améthiste: là, dans des campagnes d'un or pur, semblable à du verre très clair serpente un fleuve d'eau divine, ombragé par l'arbre de vie qui porte douze fruits, et donne son fruit chaque mois. Au bord de ce fleuve s'élèvent des forêts pleines de merveilles, et dont les arbres sont habités par des anges qui chantent sur des harpes d'or. Mais ces eaux et ces arbres n'ont rien qui ressemble aux nôtres, ce sont des ondes de perles, des arbres de corail avec des fruits de diamants, et qui toutefois surpassent la solitude, les charmes et la verdure de nos bois les plus délicieux.

>> Une musique ravissante s'élève sans fin de toutes ces choses. Tantôt ce sont des frémissements interrompus, et pareils aux vibrations rares d'une harpe éolienne, que la foible haleine du zéphyr toucheroit pendant une nuit silencieuse d'été; tantôt un mortel croiroit entendre les plaintes d'un harmonica divin, ces soupirs de verres, qui semblent ne tenir à rien de terrestre. Quelquefois encore des voix inconnues sortent longuement du fond des forêts, et leurs, ondulations lointaines imitent ces chœurs de bardes, dont les chants, à demi formés, venoient expirer à l'oreille d'Ossian solitaire. Ce n'est point, de même qu'ici-bas, un jour grossier et corporel qui luit sur ces régions de la souveraine beauté, c'est quelque chose d'enchanté, d'inexplicable : une molle clarté tombant sans bruit sur ces terres mystiques, s'y fond ainsi qu'une neige virginale, s'insinue dans tous les objats, en les faisant briller du jour le plus suave, et leur donnant à la vue une douceur et une rondeur par

faite. Aucun soleil ne se lève ni ne se couche sur ces royaumes de béatitude. Une espèce d'aurore éternelle ou d'ineffable orient en borde seulement les horizons entr'ouverts, s'attache aux arbres célestes, comme un phosphore. L'éther, si subtil, seroit trop matériel pour čes lieux; aussi l'air qu'on y respire est-il l'amour divin lui-même, et cet air mystérieux est une sorte de mélodie visible et lumineuse qui remplit de clarté et de concerts toutes les blanches campagnes des ames.

» Sur les rivages de l'éternité, les passions, filles du temps, ne pénètrent jamais. Quiconque recueilli en soi-même n'a eu avec son corps que le moindre commerce possible, quiconque apprenant de bonne heure à méditer et à mourir s'est retiré pur au tombeau des pollutions de la chair, celui-là s'envole aussitôt à ce lieu de vie; délivrée de ses craintes, de son ignorance, de ses tristesses, cette ame parfaite, dans les ravissements infinis de ce séjour, contemple à jamais ce qui est vrai, divin, immuable et au dessus de l'opinion. Elle s'enchante d'une espérance heureuse, et atteint sans cesse à cette espérance qui renaît sans cesse et qui la nourrit toujours. Le bonheur de cet héritier des béatitudes se compose de la quadruple extase, du jeune homme qui pour la première fois conçoit l'amour, du vieillard qui contemple le soleil couchant, en méditant les plus belles lois pour un peuple, et du poète et de l'artiste qui sentent toutes les fureurs du génie, toutes ces grandes pensées qui noyèrent de délices un Homère, un Phidias, un Michel-Ange. Toutefois si les prédestinés n'ont plus les passions du monde, ils ont encore le sentiment de leurs tendresses, car que seroit l'éternité, si nous y perdions la mémoire de nos amis! Dieu, la source de l'amour, a laissé à ses élus toute la sensibilité, même

ce qu'elle peut avoir de foible; les plus houreux comme les plus grands saints sont sans doute ceux qui ont beaucoup aimé,

>> Ainsi s'écoulent rapidement les siècles des siècles pour ces hommes de la vertu. Tous leurs moments sont remplis par des délices sans fin et sans mesure; ils pensent, ils voient tout en Dieu, et les torrents de félicité dont cette union intime les remplit sont indicibles. A la source de la vraie science, ils y puisent sans cesse à longs traits et pénètrent dans tous les artifices de la sagesse. Les secrets les plus cachés et les plus sublimes de la nature sont déroulés à leurs yeux. Ils connoissent les causes des mouvements de l'abîme et de la vie des mers; avec le grand chimiste ils voient l'or se filtrer dans les entrailles de la terre; avec le premier astronome, ils font le dénombrement de l'armée des soleils; ils savent les raisons de l'existence et les lois de la mort; ils assistent à la contexture du vermisseau, et à celle de l'éléphant, leur oil suit la sève dans les canaux des plantes; et le cèdre du Liban et l'hysope de la vallée ne peuvent leur dérober la navette qui croise le fil de leur écorce, ou de leurs feuilles. Ils peuvent parcourir l'ate-lier où l'air est tissu, et le feu jeté en moule; mais le plus merveilleux spectacle dont ils jouissent, c'est celui du cœur de l'homme, de cet organe mystérieux de la douleur et de la joie; de ce tout contracté dans un point, de cette fabrique mortelle où se travaille l'immortalité, de ce métier, vivant de lui-même comme le char qui porte le Fils de Dieu; de ce cœur, enfin, à la fois chef-d'œuvre et ouvrage le plus imparfait du grand maître.

A des distances incommensurables, par delà toutes ces régions trois fois fortunées, se retire la Première Essence. Les puissances célestes les plus sublimes, les roues à

quatre visages, l'un de chérubin, l'autre d'homme, le troisième de lion, le quatrième d'aigle, les faces impétueuses qui portent quatre ailes, et comme une main d'homme sous leurs ailes; ces autres esprits qui ne sont qu'un seul bras, tel que celui qui saisit Ezechiel par les cheveux, ou traça les mots sinistres sur la muraille de Balthazar; toutes ces hautes Ardeurs ne pourroient cependant entrer dans les espaces du Père sans être anéanties; le Fils seul peut y pénétrer; ces régions formidables retentissent éternellement de la mécanique des êtres, ou du bruit des mondes qui se font et qui se détruisent. La voix de la vertu monte aussi jusqu'à ce lieu; et à travers le fracas des sphères et des mugissements de l'abîme, le vermisseau qui demande son grain de blé s'y fait entendre. Dans la profondeur la plus ignorée de ces gouffres sublimes, où sont les poids, les leviers cachés de l'univers, réside le Saint des Saints; une nuée vivante le couvre à jamais de son épaisse obscurité. Dans cette nuée se lit en caractères de feu le nom mystérieux, le nom redoutable de Jéhovah. Ces mots aussi s'en vont flamboyant à l'entour: Je suis le serment, Jesuis celui qui est, l'ancien des jours est mon nom. Un terrible J trois fois multiplié par lui-même, brille et retentit comme la foudre à trois pointes, dans ces abîmes de vie. Derrière la nuée, on découvre, de temps en temps, l'arche avec ses douze voiles d'azur. Du fond de l'arche, sortent une voix et un fleuve de lumière, c'est Jéhovah.

Dans les moments de conception ou de travail du grand principe, le Verbe se plonge dans la nuée ardente, qui se referme sur lui avec des éclairs, le Père reçoit le Fils dans ses bras et s'unit à lui au centre de l'arche. L'Esprit descend à son tour et se mêle aux deux Essences; alors le grand mystère s'accomplit; à l'entrée du Saint des Saints

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