FA BLE VI. La Géniffe, la Chévre & la Brebis, en fociété avec le Lion. La (1) Géniffe, la Chévre, & leur fœur la Brebis, Avec un fier Lion, Seigneur du voisinage, Et mirent en commun le gain & le dommage. Eux venus, le Lion par fes ongles compta," C'eft que je m'apelle Lion: A cela l'on n'a rien à dire. La feconde, par droit, me doit échoir encor: (1) Jeune vache. (2) Seigneur ou Roi, le Lion étant réputé Roi des animaux, comme l'Aigle celui des oifeaux. FABLE VII. Jupiter dit un jour : que tout ce qui refpire S'en vienne comparoître aux pieds de ma grandeur. Je mettrai reméde à la chose. Etes-vous fatisfait? moi, dit-il, pourquoi non? Mais pour mon frere l'ours on ne l'a qu'ébauché ; (1) Tout fage qu'il étoit, dit des chofes pareilles. Dame baleine étoit trop groffe. Dame fourmi trouva le (3) ciron trop petit, Jupin les renvoya s'étant cenfurés tous; Du refte content d'eux. Mais parmi les plus fous Notre espéce excella; car tout ce que nous fomunes, (1) Très-imparfaitement formé. (2) Vû fon extrême laideur. (3) Très-petit animal, qu'on ne peut voir que par le moyen d'un microscope. Linx (4) envers nos pareils, & taupes (5) envers nous, Nous nous pardonnons tout,& rien aux autres hommes. On fe voit d'un autre œil qu'on ne voit fon prochain. Le (6) Fabricateur fouverain Nous créa (7) befaciers tous de même maniere, Tant ceux du tems paffé que du tems d'aujourd'hui. Il fit pour nos défauts la poche de derriere, Et celle de devant pour les défauts d'autrui. (4) Animal aux yeux très-perçans. (5) On croit communément que les Taupes n'ont point d'yeux. (6) Créateur. (7) Gens portant befaces. FABLE VI I I. · L'Hirondelle & les petits Oiseaux. U ne Hirondelle en fes voyages Avoit beaucoup appris. Quiconque a beaucoup vû, Celle-ci prévoyoit jufqu'aux moindres orages, Il arriva qu'au tems que la (1) chanvre fe feme, (1) Chenevis, graine qui produit le chanvre, dont on fait la corde & le fil. (2) Un Païfan. (3) Terre élevée entre deux rayons dans un champ laboure Un jour viendra, qui n'eft pas loin, Prophéte de malheur, babillarde, dit on (6) La chanvre étant tout-à-fait cruc, L'Hirondelle ajoûta: ceci ne va pas bien, Mauvaise graine eft tôt venue. Mais puifque jufqu'ici l'on ne m'a crue en rien (4) Filets à prendre les oifeaux. (6) Selon le bel ufage, chanvre eft mafculin. La Fon taine a mieux aimé le faire féminin, comme il keft enco re dans quelques Provinces. (7) C'eft-à-dire enfemencée. Le mot couvert, pris dans ce fens là, eft un terme d'agriculture affez ufité à la campagne; mais qui n'eft pas fort connu dans les grandes Villes. (8) Reginglette, Sorte de piége pour attraper les ai I Attraperont petits oifeaux, Ne volez plus de place en place; Demeurez au logis, ou changez de climat: Imitez le canard, la gruë & la bécaffe. Mais vous n'êtes pas en état De paffer, comme nous, les déferts & les ondes, Ni d'aller chercher d'autres mondes: C'est pourquoi vous n'avez qu'un parti qui foit fûr, C'eft de vous renfermer aux trous de quelque mur. Les oifillons, las de l'entendre, Se mirent à jazer auffi confufément, Que faifoient les (9) Troyens, quand la pauvre (10) Caffandre Ouvroit la bouche feulement. Il en prit aux uns comme aux autres. Maint Oifillón fe vit efcave retenu. Nous n'écoutons d'inftincts que ceux qui font les notres Et ne croyons le mal que quand il eft venu. feaux. Ce mot ufité dans quelques Provinces, eft inconnu à Paris, où les Oifeliers difent Trebuchet, Collet, &c, au- lieu de Reginglette. (9) Les habitans de l'ancienne ville de Troye, dans le tems qu'elle étoit attaquée par les Grecs. (19) Fille du Roi Priam, dont on méprifoit les prophe ties qui cependant fe trouvoient toujours très véritables. F A BLEIX. Le Rat de Ville & le Rat des Champs. Autrefois utrefois le Rat de ville Invita le Rat des champs, A des reliefs (1) d'ortolans. (1) Reftes d'oifeaux d'un goût délicat, parmi lesquels 1 Ortolan paffe pour un des friands morceaux, * |