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FABL E I I I.

Le Rat qui s'eft retiré du monde.

Les (1) Levantins en leur (2) légende,

Dilent qu'un certain Rat, las des foins d'ici - bas,
Dans un fromage de Hollande
Se retira loin du tracas.

La folitude étoit profonde,.
S'étendant par-tout à la ronde.

Notre hermite nouveau fubfiftoit là-dedans.
*Il fit tant des pieds & des dents
Qu'en peu de jours il eut au fond de l'hermitage,
Le vivre & le couvert: que faut-il davantage ?-
Il devint gros & gras: Dieu prodigue fes biens
A ceux qui font vœu d'être fiens.

Un jour, au dévot perfonnage,
Des députés du peuple rat

S'en vinrent demander quelque aumône légere:
Ils alloient en terre étrangere

Chercher quelque fecours contre le peuple chat:
(3) Ratapolis étoit bloquée :

On les avoit contraints de partir fans argent,
Attendu l'état indigent

De la république attaquée.

Ils demandoient fort peu, certains que le fecours Seroit prêt dans quatre ou cinq jours.

(1) Les peuples du Levant.

(2) Livre qui contient les Vies de plufieurs Saints. *Il fit tant des pieds des dents, &c.

C'est ainsi que La Fontaine l'a imprimé. On dit plus com. munément des pieds & des mains, il s'eft exprimé encore de même. Liv. v, 11. p. 22. Vers 19. Le, Cerf reprit ainfi, Sire, le temps de pleurs, &c.

(3) La Ville capitale des Rats.

Mes amis, dit le Solitaire,

Les chofes d'ici- bas ne me regardent plus:
En quoi peut un pauvre rcclus

Vous affifter? Que peut-il faire,

Que de prier le ciel qu'il vous aide en ceci?
J'efpere qu'il aura de vous quelque fouci.
Ayant parlé de cette forte,
Le nouveau Saint ferma fa porte.

Qui défignai-je, à votre avis,
Par ce Rat fi peu secourable?

Un Moine? non, mais un (4) Dervis.

Je fuppofe qu'un Moine eft toujours charitable.

(4) Religieux Turc.

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n jour fur fes longs pieds alloit je ne fçai où, Le Héron au long bec ennmanché d'un long cou. Il côtoyoit une riviére. (jours, L'onde étant tranfparente, ainfi qu'aux plus beaux Ma commere la carpe y faifoit mille tours Avec le brochet fon compere.

Le Héron en eut fait aisément fon profit;
Tous approchoient du bord, l'oifeau n'avoit qu'à'
prendre:

Mais il crut mieux faire d'attendre
Qu'il eût un peu plus d'appétit.

Il vivoit de (1) régime; & mangeoit à fes heures.
Après quelques momens l'appétit vint: l'oifeau
S'approchant du bord, vit fur l'eau

Des tanches qui fortoient du fond de ces demeures.
Le mets ne lui plut pas, il s'attendoit à mieux,
Et montroit un goût dédaigneux

Comme le (2) rat du bon Horace.

Moi des tanches? dit-il, moi Héron que je fasse
Une fi pauvre chére? Et pour qui me prend-on?
La tanche rébutée, il trouva du (3) goujon.
Du goujon! c'est bien - là le diner d'un Héron!
J'ouvrirois pour fi peu le bec! aux Dieux ne plaise.
Il l'ouvrit pour bien moins: tout alla de façon
Qu'il ne vit plus aucun poisson.

La faim le prit: il fut tout heureux & tout aise
De rencontrer un Limaçon.

Ne foyons pas fi difficiles:

Les plus accommodans, ce font les plus habiles. On hazarde de perdre en voulant trop gagner. Gardez-vous de rien dédaigner,

Sur-tout quand vous avez à peu près votre compte. Bien des gens y font pris: ce n'eft pas aux Hérons Que je parle: écoutez, Humains, un autre conte. Vous verrez que chez vous j'ai puisé ces leçons.

Certaine

ertaine fille un peu trop fiére, Prétendoit trouver un mari

Jeune, bien fait, & beau, d'agréable maniére, Point froid & point jaloux: notez ces deux point-ci.

(1) C'eft manger avec précaution.

(2) Le Rat de Ville, qui goûtoit d'un air dédaigneux tout ce que lui préfentoit le Rat de campagne, pour le régaler de fon mieux.

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Cupiens varia faftidia cana
Vincere, tangentis malè fingula dente fuperbo.
Horat. Sat. vi. L. 2.

(3) Espéce de petit Poisson.

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Cette fille vouloit auffi

Qu'il eût du bien, de la naiffance,

De l'efprit, enfin tout: mais qui peut tout avoir?
Le destin se montra foigneux de la pourvoir;
Il vint des partis d'importance.

La Belle les trouva trop chétifs de moitié.
Quoi moi? quoi ces gens-là? l'on radote, je pense;
A moi les propofer? hélas, ils font pitié.

Voyez un peu la belle espéce!

L'un n'avoit en l'efprit nulle délicateffe,

L'autre avoit le nez fait de cette façon - là :.
C'étoit ceci, c'étoit cela,

C'étoit tout; car les précieufes
Font deflus tout les dédaigneufes.

Après les bons partis, les médiocres gens
Vinrent se mettre fur les rangs.
Elle de fe moquer. Ah vraiment je fuis bonne
De leur ouvrir la porte: ils pensent que je fuis
Fort en peine de ma perfonne.
Grace à Dieu, je paffe les nuits

Sans chagrin, quoiqu'en (4) folitude.

La Belle fe fçut gré de tous ces fentimens.
L'âge la fit déchoir: adieu tous les amans.
Un an se passe & deux avec inquiétude.

Le chagrin vient enfuite: elle fent chaque jour..
Déloger quelques ris, quelques jeux, puis l'amour :
Puis fes traits choquer & déplaire :

Puis cent fortes de fards. Ses foins ne purent faire
Qu'elle échappât au temps, (5) cet infigne larron.
Les ruines d'une maifon

Se peuvent réparer: que n'eft cet avantage
Pour les ruines du vifage!

Sa préciofité changea lors de langage..
Son miroir lui difoit, prenez vîte un mari:
Je ne fçais quel défir le lui difoit auffi:

(4) Sans mari..

(5.) Qui, comme à la dérobée, détruit infenfiblement toutes chofes.

Le défir peut loger chez une précieuse :
Celle-ci fit un choix qu'on n'auroit jamais cru,
Se trouvant à la fin toute aife & toute heureufe
De rencontrer un (6) malotru.

(6) Un mari mal fait de corps & d'efprit.

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Tiennent la maison propre, ont foin de l'équipage, Et quelquefois du jardinage.

Si vous touchez à leur ouvrage,

Vous gâtez tout. Un d'eux près du (2) Gange autrefois,

Cultivoit le jardin d'un affez bon bourgeois.

Il travailloit fans bruit, avoit beaucoup d'adresse,
Aimoit le maître & la maîtresse,

Et le jardin fur-tout. Dieu fçait fi les (3) Zéphirs,
Peuple ami du démon, l'affistoient dans fa tâche.
Le folet, de fa part, travaillant fans relâche,
Combloit fes hôtes de plaifirs.
Pour plus de marques de fon zele,

Chez ces gens pour toujours il fe fût arrété,
Nonobftant la légéreté

A fes pareils fi naturelle:

Mais fes confreres les Efprits

Firent tant, que le chef de cette république,

Par caprice ou par politique,

Le changea, bien - tôt de logis.

(1) Certains Efprits familiers.

(2) Grande Riviére des Indes."

43) Vents doux, favorables aux plantes & aux fruits

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