Je vais, fije le peux, reprendre mes efprits; GENGIS. Ciel! que m'avez-vous dit ? ô Ciel! vous m'aimeriez ? J'ai dit que ces vœux que vous me préfentiez N'auroient point révolté mon ame affujettie, Si les fages mortels, à qui j'ai dû la vie, N'avaient fait à mon cœur un contraire devoir. De nos parens fur nous vous fçavez le pouvoir: Du Dieu que nous fervons, ils font la vive ima◄ ge; Nous leur obéiffons en tous temps, à tout âge. Cer Empire détruit, qui dût être immortel, Seigneur, était fondé fur le droit paternel, Sur la foi de l'hymen, fur l'honneur, la juftice, Le refpect des fermens ; & s'il faut qu'il periffe, Si le fort l'abandonne à vos heureux forfaits, L'efprit qui l'anima ne périra jamais. Vos deftins font changés; mais le mien ne peut l'être. GENGIS, Quoi! vous m'auriez aimé ! IDAMÉ. C'eft à vous de connaître Que ce ferait encore une raifon de plus, me; Mon époux m'eft facré; je dirai plus, je l'aime. Je le préfére à vous, au trône, à vos grandeurs. Pardonnez mon aveu, mais respectez nos mœurs. Ne penfez pas non plus que je mette ma gloire. Permettez qu'à jamais mon époux les ignores GENGIS. Il fçait mes fentimens; Madame, il faut les fuivre ; Il s'y conformera, s'il aime encore à vivre. IDAMÉ. Il en eft incapable; & fi dans les tourmens GENGIS. Ce que je viens d'entendre, ô Dieux! ef croyable! Quoi! lorfqu'envers vous-même il s'est rendu coupable, Lorfque fa cruauté, par un barbare effort, Vous arrachant un fils, l'a conduit à la mort! IDAMÉ. Il eut une vertu, Seigneur, que je révère ; Je me respecte affez pour ne le point trahir. Tout m'étonne dans vous; mais auffi tout m'ou trage. Jadore avec dépit cet excès de courage. tez; Vous fubjuguez mon cœur, & vous le révoltez. Redoutez-moi: fçachez que malgré ma faiblessfe, Ma fureur peut aller plus loin que ma tendreffe. IDAMÉ. Je fçai qu'ici tout tremble, ou périt sous vo coups. Les loix vivent encore, & l'emportent fur vous, GENGI S. Les loix ! il n'en eft plus: quelle erreur obstinée Ofe les alléguer contre ma destinée? Il n'eft ici de loix que celles de mon cœur, Celles d'un Souverain, d'un Scythe, d'un vain queur. י Les loix que vous fuivez m'ont été trop fatales. Oui, lorfque dans ces lieux nos fortunes égales, Nos fentimens, nos cœurs l'un vers l'autre em portés, (Car je le crois ainfi malgré vos cruautés) Quand tour nous unissait, ves loix, que je détefte, Ordonnerent ma honte, & votre hymen funefte: Je les anéantis ; je parle; c'eft affez Imitez l'univers, Madame, obéïffez. Vos mœurs que vous vantez, vos usages auftè res, ; Sont un crime à mes yeux, quand ils me font contraires. Mes ordres font donnés ; & votre indigne époux Doit remettre en mes mains votre Empereur & vous; Leurs jours me répondront de votre obéiffance. Penfez-y, vous fçavez jufqu'où va ma vengean ce; Et fongez à quel prix vous pouvez défarmer Un maître qui vous aime, & qui rougit d'aimer. 000000000000000000000000 Il me fau SCENE V. IDAME, ASSELL IDAMÉ. L me faut donc choifir leur perte ou l'infamie O pur fang de mes Rois! ô moitié de ma vie ! Cher époux, dans mes mains quand je tiens votre fort, Ma voix fans balancer vous condamne à la. mort. ASSELI. Ah! reprenez plutôt cet Empire fuprême Qu'aux beautés, aux vertus attache le Ciel me me; Ce pouvoir qui foumit ce Scythe furieux IDAMÉ. Dans l'état où je fuis, c'est un malheur de plus. ASSELI. Vous feule adouciriez le deftin des vaincus. Dans nos calamités, le Ciel qui vous feconde, Veut vous opposer seule à ce tyran du monde. Vous avez vu tantôt fon courage irrité Se dépouiller pour vous de fa férocité. Il auroit dû cent fois, il devrait même encore naire Sur le débris du monde a craint de vous déplaire; Enfin fouvenez-vous que dans ces mêmes lieux Arrête; il ne l'eft plus ; y penser eft un crime, 4 |