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Conferve au moins le jour au dernier de mes fils.
Jugez fi mes fermens, & mon cœur l'ont promis;
Jugez de mon devoir quelle eft la voix preffante.
J'ai fenti ranimer ma force languiffante;
J'ai revolé vers vous. Les raviffeurs fanglans
Ont laiffé le paffage à mes pas chancelans;
Soit que dans les fureurs de leur horrible joie,
Au pillage acharnés, occupés de leur proie,
Leur fuperbe mépris ait détourné les yeux;
Soit que cet ornement, d'un Miniftre des Cieux,
Ce fymbole facré du grand Dieu que j'adore,
A la férocité puiffe impofer encore;
Soit qu'enfin ce grand Dieu, dans fes profonds
deffeins

Pour fauver cet enfant, qu'il a mis dans mes

mains,

Sur leurs yeux vigilans répandant un nuage,
Aît égaré leur vue, ou fufpendu leur rage.

IDAMÉ.

Seigneur, il ferait temps encor de le fauver :
Qu'il parte avec mon fils; je les peux enlever.
Ne défespérons point, & préparons leur fuite.
De notre prompt départ qu'Etan ait la con-
duite:

Allons vers la Corée, au rivage des mers,
Aux lieux où l'Océan ceint ce trifte univers;
La terre a des déferts & des antres fauvages:
Portons-y ces enfans, tandis que les ravages.
N'inondent point encor ces afyles facrés,
Eloignés des vainqueurs, & peut-être ignorés.
Allons, le temps eft cher, & la plainte inutile.
ZAMTI.

Hélas! le fils des Rois n'a pas même un asyle! J'attends les Coréens; ils viendront, mais trop tard..

Cependant la mort vole au pied de ce rempart.
Saififfons, s'il fe peut, le moment favorable
De mettre en fûreté ce gage inviolable.
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SCENE III.

ZAMTI, IDAMÉ, ASSELI, ÉTAN.

ÉTAN

ZAMTI.

TAN, où courez-vous, interdit, consterné

IDAMÉ.

Fuyons de ce féjour au Scythe abandonné.

ÉTAN.

Vous êtes obfervés, la fuite eft impoffible.
Autour de notre enceinte une Garde terrible
Aux Peuples confternés offre de toutes parts
Un rempart hériffé de piques & de dards.
Les vainqueurs ont parlé; l'esclavage en filence
Obéit à leurs voix dans cette Ville immense.
Chacun refte immobile & de crainte & d'hor-

reur,

Depuis que fous le glaive eft tombé l'Empereur.

Il n'est donc plus ?

ZAMTI.

IDAMÉ.

O Cieux !

ÉTAN.

De ce nouveau carnage

Qui pourra retracer l'épouvantable image?

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Son épouse, fes fils sanglans & déchirés...
O famille de Dieux fur la terre adorés!
Que vous dirai-je, hélas? Leurs têtes exposées
Du vainqueur infolent excitent les rifées;
Tandis que leurs fujets tremblans de murmurer
Baiffent des yeux mourans qui craignent de
pleurer.

De nos honteux foldats les alfanges errantes
A genoux ont jetté leurs armes impuiffantes.
Les vainqueurs fatigués dans nos murs affervis.
Laffés de leur victoire & de fang affouvis,
Publiant à la fin le terme du carnage,

Ont au lieu de la mort annoncé l'esclavage.
Mais d'un plus grand défaftre on nous menace

encor:

On prétend que ce Roi des fiers enfans du Nord,
Gengis-Kan, que le Ciel envoya pour détruire
Dont les feuls Lieutenans oppriment cet Empire,
Dans nos murs autrefois inconnu, dédaigné,
Vient, toujours implacable & toujours indigné,
Confommer fa colere, & venger fon injure.
Sa Nation farouche eft d'une autre nature
Que les triftes humains qu'enferment nos rem-

parts.

Ils habitent des champs, des tentes, & des chars; Ils fe croiraient gênés dans cette Ville immense. De nos Arts, de nos Loix la beauté les offenfe. Ces brigands vont changer en d'éternels déferts Les murs que fi long-temps admira l'univers. IDAMÉ.

Le vainqueur vient fans doute armé de la vengeance.

Dans mon obfcurité j'avais quelque espérance;
Je n'en ai plus. Les Cieux, à nous nuire attachés,
Ont éclairé la nuit où nous étions cachés.
Trop heureux les mortels inconnus à leur maître!

ZAMTI.

Les nôtres font tombés : le juste Ciel peut-être Voudra pour l'Orphelin fignaler fon pouvoir. Veillons fur lui, voilà notre premier devoir. Que nous veut ce Tartare?

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ZAMTI, IDAMÉ, ASSÉ LI, OCTAR, GARDE S.

OCTAR.

ESCLAVES, écoutez ; que votre obéïssance

Soit l'unique réponse aux ordres de ma voix.
Il reste encore un fils du dernier de vos Rois;
C'est vous qui l'élevez: votre foin téméraire
Nourrit un ennemi, dont il faut fe défaire.
Je vous ordonne, au nom du vainqueur des hu-
mains,

De mettre fans tarder cet enfant dans mes mains.

Je vais l'attendre: allez; qu'on m'apporte ce gage.

Pour peu que vous tardiez, le fang & le carnage
Vont encore en ces lieux fignaler fon courroux;
Et la deftruction commencera par vous.
La nuit vient, le jour fuit ; vous, avant qu'il fi-
niffe,

Si vous aimez la vie, allez, qu'on obéïsse.

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Ou fommes

IDA MÉ.

U fommes-nous réduits? ô monftres, & terreur !

Chaque inftant fait éclore une nouvelle horreur, Et produit des forfaits dont l'ame intimidée Jufqu'à ce jour de fang n'avait point eu d'idée. Vous ne répondez rien; vos soupirs élancés Au Ciel qui nous accable en vain font adreffés. Enfant de tant de Rois, faut-il qu'on facrific Aux ordres d'un foldat ton innocente vie!

ZAMTI.

J'ai promis, j'ai juré de conferver les jours.

IDAMÉ.

De quoi lui ferviront vos malheureux fecours? Qu'importent vos fermens, vos stériles tendreffes?

Etes-vous en état de tenir vos promesses ?
N'efpérons plus.

ZAMTI.

Ah, Ciel ! Eh quoi, vous voudrien

Voir du fils de mes Rois les jours facrifiés !

IDAMÉ.

Non, je n'y puis penser fans des torrens de larmes ;

Et fi je n'étais mere, & fi dans mes allarmes,

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