VAMIR. M'as-tu pu méconnaître ? LE DUC. Ah Vamir! ah mon frere ! VAMIR. Ce nom jadis fi cher, ce nom me défefperė. LE DUC. Tu n'es plus que mon frere, & mon cœur te pardonne. Mais je te l'avouerai, ta cruauté m'étonne. VAMIR. Tu fais le malheur de ma vie : Je voudrais qu'aujourd'hui ta main me l'eût fa J'euffe aimé contre un autre à montrer mon courage, Vamir, que je te plains VAMIR. Je te plains davantage. De hair ton pays, de trahir fans remords Et le Roi qui t'aimait & le fang dont tu fors. LE DUC. Arrête, épargne-moi l'infame nom de traître. A cet indigne mot, je m'oublirais peut-être. Non, mon frere, jamais je n'ai moins mérité Le reproche odieux de l'infidélité. Je fuis prêt de donner à nos triftes Provinces, A la France fanglante, au refte de nos Princesa L'exemple augufte & faint de la réunion, Après l'avoir donné de la divifion. VAMIR. Toi, tu pourrais.... LE DUC. Ce jour qui femble fi funefte Des feux de la difcorde éteindra ce qui refte, Tout eft changé, ton frere eft trop heureux à V AM I R. Jé le crois: on difait que d'un amour extrême Violent, effrené, (car c'est ainfi qu'on aime) Ton cœur depuis trois mois s'occupait tout entier... LE DUC. J'aime : oui, la renommée a pu le publier; Oui, j'aime avec fureur. Une telle alliance Semblait pour mon bonheur attendre ta préfence. Oui, mes reffentimens, mes droits, mes alliés, Gloire, amis, ennemis, je mets tout à fes pieds. (A fa fuite.) Allez, & dites lui que deux malheureux freres Jettés par le deftin dans des partis contraires, Pour marcher déformais fous le même étendart, De fesyeux fouverains n'attendehrqu'unregard. (AVamir.) Neblâme point l'amour où ton frere eft en proie: Pour me juftifier, il fuffit qu'on la voie. VA MIR Cruel!... elle vous aime? LEDU.C Elle le doit du moins: In'était qu'un obftacle au fuccès de mes foins: Al n'en eft plus, je veux que rien ne nous lépare VA MIR.. Quels effroyables soups le cruel me prépare! Ecoute; à ma douleur. ne veux-tu qu'infulter? Me connais-tu? Sçais-tu ce que j'ofais tenter? Dans ces funeftes lieux fçais-tu ce qui m'améne EE DUC. Oublions ces fujets de difcorde & de haine. SCENE V. LE DUC DE FOIX, VAMIR, AMÉLIE.. AMÉLIE. LEL! qu'est-ce que je vois? Je me meurs! LE D'U C. Ecoutez: Mon bonheur. eft venu de nos calamités, frere; Sa préfence à mes yeux vous rend encor plus chere: Et vous, mon frere, & vous, foyez ici témoins, Soumis & fubjugué, je l'offre à fes appas. ge. Vous aimez; vous fervez une Cour qui m'ou trage; Eh bien! il faut céder; vous difpofez de moi, L'amour, qui, malgré vous, nous a faits l'un pour l'autre, Ne me laiffe de choix, de parti que le vôtre. Vous, courez, mon cher frere; allez de ce mo ment Annoncer à la Cour un fi grand changement. Soyez libre, partez; & de mes facrifices Allez offrir au Roi les heureuses prémices. Puiffai-je à fes genoux présenter aujourd'hui Celle qui m'a dompté, qui me ramene à lui, Qui d'un Prince ennemi fait un fujet fidéle, Changé par fes regards & vertueux par elle! VAMIR (à part. ) Il fait ce que je veux, & c'eft pour m'accabler. Prononcez notre arrêt, Madame; il faut parler. LE DUC. Eh! quoi, vous demeurez interdite & muette ? Faut-il encor ma vie, ingrate? elle est à vous. AMÉLIE. Je demeure éperdue, & tout ce que je vois |