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Armé contre mon maître, armé contre fon frere; Que de raifons!... Seigneur! c'est en vous que j'efpere.

Pardonnez... achevez vos deffeins généreux, Qu'il me rende à mon Roi, c'eft tout ce que je

veux.

Ajoutez cet effort à l'effort que j'admire, Vous devez fur fon cœur avoir pris quelqu'em

pire;

Un efprit mâle & ferme, un ami respecté
Fait parler le devoir avec autorité;
Ses confeils font des loix.

LISOIS.

Il en eft peu, Madame
Contre les paffions qui fubjuguent fon ame,
Et fon emportement a droit de m'alarmer.
Le Prince eft loupçonneux, & j'osai vous aimer;
Quels que foient les ennuis dont votre cœur
foupire,

Je vous ai déjà dit ce que j'ai dû vous dire :
Laiffez-moi ménager fon efprit ombrageux,
Je crains d'effaroucher fes feux impétueux,
Je fçais à quels excès irait fa jaloufie,

Quel poifon mes difcours répandroient fur fa vie; Je vous perdrois peut-être, & mes foins dangereux,

Madame, avec un mot feroient trois malheu

reux.

Vous, à vos intérêts rendez-vous moins contraire,

Pefez fans paffion l'honneur qu'il vous veut faire: Moi, libre entre vous deux, fouffrez que dès ce jour,

Oubliant à jamais le langage d'amour,

Tout entier à la guerre, & maître de mon ame

J'abandonne à leur fort & vos væœux & fa flam

me;

Je crains de l'outrager, je crains de vous trahir, Et ce n'eft qu'aux combats que je dois le fervir: Laiffez-moi d'un foldat garder le caractère, Madame, & puifqu'enfin la France vous eft chere,

Rendez-lui ce héros qui ferait fon appui. Je vous laiffe y penfer, & je cours près de lui. 000000000000000000000000

SCENE II.

AMÉLIE, TAISE.

AMÉLIE.

AH! s'il faut à ce prix le donner à la France; Un grand changement n'eft pas en ma puiffance;

Taïfe; & cet hymen eft un crime à mes yeux. TAISE.

Quoi! le Prince à ce point vous feroit odieux? Quoi! dans ces triftes temps de ligues & de haines

Qui confondent des droits les bornes incertaines,

Où le meilleur parti femble encor fi douteux, Où les enfans des Rois font divifés entr'eux, Vous qu'un aftre plus doux femblait avoir formée

Pour l'unique douceur d'aimer & d'être aimée, Pouvez-vous n'opposer qu'un fentiment d'hor

reur

Aux foupirs d'un hérés qui fut votre vengeur ?

Vous fçavez que ce Prince au rang de ses an~ cêtres,

Compte les premiers Rois que le France eut pour maîtres;

D'un puiffant appanage il eft né fouverain,
Il vous aime, il vous fert, il vous offre fa main
Ce rang à qui tout céde & pour qui tout s'oublie,
Brigué par tant d'appas, objet de tant d'envie,
Ce rang qui touche au trône, & qu'on mer à
vos pieds,

Peut-il caufer les pleurs dont vos yeux font noyés ?

AMÉLIE.

Quoi! pour m'avoir fauvée, il faudra qu'il m'opprime!

De fon fatal fecours je ferai la victime! Je lui dois tout fans doute, & c'est pour mon malheur.

TAISE..

Ceft être trop injuste.

AMÉLIE.

Eh bien, connais mon cœur Mon devoir, mes douleurs, le deftin qui me lie Je mets entre tes mains le fecret de ma vie, De ta foi déformais c'eft trop me défier, Et je me livre à toi pour me juftifier;

Vois combien mon devoir à fes vœux eft con traire;

Mon cœur n'eft point à moi, ce cœur eft à fon

frere.

TAISE

Quoi! ce vaillant Vamir

AMÉLIE.

Nos fermens mutuels

Devançaient les fermens réfervés aux Autels, J'attendais, dans Leucate en fecret retirée, Qu'il y vint dégager la foi qu'il m'a jurée, Quand les Maures cruels inondant nos déferts, Sous mes toits embrafés me chargerent de fers; Le Duc eft l'allié de ce peuple indomptable; Il me fauva, Taïfe, & c'eft ce qui m'accable. Mes jours à mon amant feront-ils réfervés ? Jours triftes, jours affreux qu'un autre a confer vés!

TAISE.

Pourquoi donc avec lui vous obftinant à feindre, Nourrir en lui des feux qu'il vous faudrait éteindre ?

Il eût pu respecter ces faints engagemens, Vous euffiez mis un frein à fes emportemensa

'AMÉLIE.

Je ne le puis; le Ciel pour combler mes miferes, Voulut l'un contre l'autre animer les deux freres

amir toujours fidèle à fon maître, à nos loix A contre un révolté vengé l'honneur des Rois. De fon rival altier tu vois la violence; Joppofe à fes fureurs un douloureux filence; Hignore du moins qu'en des temps plus heureux Vamir a prévenu fes deffeins amoureux : S'il en étoit inftruit, fa jaloufie affreuse Le rendroit plus à craindre & moi plus malheu

reuse.

C'en eft trop, il eft temps de quitter les Etats, Fuyons des ennemis; mon Roi me tend les bras. Bes prifonniers, Taïfe, à qui le fang te lie,›

De ces murs en fecret méditent leur fortie,
Ils pourront me conduire, ils pourront m'ef-

corter;

Il n'eft point de péril que je n'ofe affronter. Je hazarderai tout, pourvu qu'on me délivre De la prison illuftre où je ne fçaurois vivre. TAISE.

Madame, il vient à vous.

AMÉLIE.

Je ne puis lui parler

Il verroit trop mes pleurs toujours prêts à cou

ler.

Que ne puis-je à jamais éviter fa poursuite ! 900000000000000000000000

SCENE III.

LE DUC DE FOIX, LISOIS, TAISE;
LEDUC à Taïfe.

EST-CE elle qui m'échappe, eft-ce elle qui

m'évite!

Taïfe, demeurez, vous connoiffez trop bien Les tranfports douloureux d'un cœur tel que le

mien:

Vous fçavez fi je l'aime & fi je l'ai fervie!
Si j'attends d'un regard le deftin de ma vie ;
Qu'elle n'étende pas Fexcès de fon pouvoir
Jufqu'à porter ma flamme au dernier défespoir
Je hais ces vains refpects, cette reconnoiffance
Que fa froideur timide oppose à ma conftance -
Le plus léger délai m'est un cruel refus,
Un affront que mon cœur ne pardonnera plus

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