315 LE DUC DE FOIX, TRAGÉDI E. 000000000000000000000 000 ACTE PREMIER. SCENE I. AMÉLIE, LISOIS. LISOIS. SOUFFREZ qu'en arrivant dans ce féjour d'a larmes, Je dérobe un moment au tumulte des armes. Le grand cœur d'Amélie eft du parti des Rois: Contre eux, vous le fçavez, je fers le Duc de Foix, Ou plutôt je combats ce redoutable Maire, Et de Thierri fon maître ofe être protecteur. Le Duc de Foix ici nous tient fous la puiffance, J'ai de fa paffion prévu la violence, Et fur lui, fur moi-même & sur votre intérêt Je viens ouvrir mon cœur, & dicter mon arrêt. Ecoutez-moi, Madame, & vous pourrez con naître L'ame d'un vrai foldat digne de vous peut-être, Je fçai quel eft Lifois : fa noble intégrité LISOIS. Sçachez que fi dans Foix mon zéle me ramene, Je n'ai d'autre parti que celui de mon cœur, Mais il a des vertus qui rachetent fes vices: Eh! qui fçauroit, Madame, où placer fes fervi ccs, S'il ne nous falloit fuivre & ne chérir jamais Que des cœurs fans faibleffe, & des Princes parfaits? Tout le mien eft à lui; mais enfin cette épée, Dans le fang des Français à regret s'eft trempée. Je voudrais à l'Etat rendre le Duc de Foix. AMÉLIE. Seigneur, qui le peut mieux que le fage Lifois? Dans quel affreux parti s'eft-il précipité ! LISOIS. Je ne peux à mon choix fléchir fa volonté. lie, Confacrer à vos loix le refte de ma vie ; Je crus que vous pouviez, approuvant mon deffein, Accepter fans mépris mon hommage & ma main; Mais à d'autres deftins je vous vois réservée. Par les Maures cruels dans Leucate enlevée, Lorsque le fort jaloux portoit ailleurs mes pas, Cet heureux Duc de Foix vous fauva de leurs bras. La gloire en est à lui, qu'il en ait le falaire; Il a par trop de droits mérité de vous plaire; Il elt Prince, il eft jeune, il eft votre vengeur, Ses bienfaits & fon nom, tout parle en la faveur; La juftice & l'amour vous preffent de vous rendre: Je n'ai rien fait pour vous, je n'ai rien à prétendre. Je me tais.... cependant s'il faut vous mériter, Lifois ni vertueux, ni superbe à demi, Auroit bravé le Prince, & céde à fon ami. AMÉLIE. Qu'avec étonnement, Seigneur, je vous con temple! Que vous donnez au monde un rare & grand exemple!. Quoi ce cœur (je le crois fans feinte & fans dé tour ) Connaît l'amitié feule & fçait braver l'amour! Il faut vous admirer quand on fçait vous con naître, Vous fervez votre ami, vous fervirez mon maître ; D Un cœur fi généreux doit penfer comme moi Tous ceux de votre fang font l'appui de leur Roi. Eh bien, de vos vertus je demande une grace. LISOIS. Vos ordres font facrés ; que faut-il que je faffe Vos confeils généreux me preffent d'accepter Ce rang dont un grand Prince a daigné me flatter: Je ne me cache point combien fon choix m'ho nore, J'en vois toute la gloire, & quand je fonge encore Qu'avant qu'il fût épris de ce funéste amour Eft-ce à ma faible voix d'annoncer fon devoir ? menée ! Des armes de mon Roi la Ville environnée N'attend que des affauts, ne voit que des com bats; Le fang de tous côtés coule ici fous mes pas; * |