Au milieu du Sénat qu'il vient de convoquer ; Je vois qu'il prévient tout & que Rome alarmée. CATILINA. Prévient-il Mallius? prévient-il mon armée ? Connaît-il mes projets ? fçait-il donc fans effroi Que Mallius n'agit, n'eft armé que pour moi? Suis-je fait pour fonder ma fortune & ma gloire Sar un vain brigandage, & non fur la victoire? Va, mes deffeins font grands autant que mefurés. Les Soldats de Sylla font mes vrais Conjurés. Quand des mortels obfcurs ou de vils téméraires D'un complot mal tiffu forment les nœuds vul gaires, Un feul reffort qui manque à leurs piéges tendus Détruit l'ouvrage entier, & l'on n'y revient plus: Mais des mortels choifis, & tels que nous le sommes, Ces deffeins fi profonds, ces crimes des grands. hommes, Cette élite indomptable & ce fuperbe choix Des descendans de Mars & des vainqueurs des Rois, Tous ces refforts fecrets dont la force affurée Voilà notre deftin, eft-ce à nous à rien craindre? CETHEGUS. Sous le nom de Céfar, Prénefte eft-elle à nous? CATILINA. C'est là mon premier pas; c'est un des plus grands coups Qu'au Conful incertain je porte en affurance. La moitié du Sénat croit Nonnius complice. J'ai droit de l'efpérer; mais dans cette entreprife S'il eft quelque péril que je dois dédaigner, Ne fouffrons en ces lieux rien qui touche notre ame: Je fais partir de Rome & mon fils & ma femme Et dégagé des foins d'un trop tendre intérêt... 000000 000000000000000000 CATILINA, AURÉLIE, CÉTHEGUS. AURÉLIE, une Lettre à la main. LIs ton fort & le mien, ton crime & ton arrêt; Voilà ce qu'on m'écrit. CATILINA. Quelle main téméraire ?. Eh bien ! j'y reconnois celle de votre pere. Lis. AURÉLI E. CATILINA lit. >>La mort trop long-temps a respecté mes jours. » Une fille que j'aime en termine le cours. »Je fuis trop bien puni dans ma trifte vieilleffe >> De cet himen affreux qu'a permis ma faibleffe; » Je fçais de votre époux les complots odieux: >> Céfar qui nous trahit veut m'enlever Prénefte, » Vous avez partagé leur trahison funefte, >> Repentez-vous, ingrate, ou périffez comme eux. (à Céthégus..) Mais comment Nonnius aura-t-il pû connaître, Des fecrets qu'un Conful ignore encor peut-être? CÉTHÉGU S. Ce billet peut nous perdre. CATILINA à Céthégus. (à Aurélie.) Il pourra nous fervir. Il n'eft plus temps de feindre, il faut tout éclair cir. Je vais armer le monde, & c'eft pour ma défense: Vous dans ce jour de fang marqué par ma puiffance, Voulez-vous préférer un pere à votre époux? Pour la dernière fois puis-je compter sur vous ? AURELI E. Eh bien? que prétends-tu ? CATILINA. Qu'à mon fort engagée Votre ame déformais ne foit point partagée : Prenez des fentimens tels qu'en avoient conçus L'épouse de Sylla, celle de Marius. Apprenez que mon Camp qui s'approche en filence Dans une heure au plus tard atteint votre présence. Que l'augufte moitié du premier des Romains S'accoutume à jouir des honneurs fouverains. Partez, & que mon fils destiné pour la guerre Soit porté dans vos bras aux vainqueurs de la terre; Ne rentrez avec lui dans ces murs abhorrés Que quand j'en ferai maître, & quand vous regnerez. AURÉLIE. Tu vas ce jour de Rome ordonner le carnage CATILIN A. Oui, de mes ennemis je vais punir la rage AURÉLIE. Commence donc par moi: Commence par ce meurtre, il eft digne de toi Frappe, ingrat : j'aime mieux avant que tout périffe Expirer par tes mains que vivre ta complice. My CATILINA.. Qu'au nom de nos liens votre efprit affermi..... Ne déféfpérez point un époux, un ami, Ma perte fut certaine au moment que mon cœur Reçut de vos confeils le poison féducteur; nir,. Qu'à tant d'atrocités l'amour ait pu fervir. L'amour me fit coupable, & je ne veux plus l'être, Je ne veux plus fervir les attentats d'un traître ; Je renonce à mes vœux, à toi même, à ta foi.. Mes mains, mes propres mains s'armeront con. tre moi: Frappe & traîne dans Rome embrafée & fu, mante,. Pour le premier exploit, ton épouse expirante.. |