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Ils foutiennent les Loix, avant de les abattre.

CATILINA.

Ah! fi vous foupçonnez ceux qui fçavent com battre,

Accufez donc Célar, & Pompée, & Craffus : Pourquoi fixer fur moi vos yeux toujours déçus? Parmi tant de guerriers dont on craint la puiffance

Pourquoi fuis-je l'objet de votre défiance? Pourquoi me choifir, moi? par quel zéle emporté?....

CICERON.

Vous même, jugez-vous ; vous l'avez mérité. CATILINA.

Non, mais j'ai trop daigné m'abaiffer à l'excu

fe;

Et plus je me défends, plus Cicéron m'accuse. Si vous avez voulu me parler en ami,

Vous vous êtes trompé, je fuis votre ennemi : Si c'eft en citoyen, comme vous je crois l'être: Et fi c'eft en Conful, ce Conful n'eft pas maître.. Il préfide au Sénat; mais je veux l'y braver.

CICERON.

J'y punis les forfaits, tremble de m'y trouver
Malgré toute ta haine à mes yeux méprisable,
Je t'y protégerai, fi tu n'es pas coupable:
Fuis Rome, fi tu l'es..

CATILINA.

C'en eft trop, arrêtez ;

'eft trop fouffrir le zéle où vous yous emportez,

De vos vagues foupçons j'ai dédaigné l'injure ; Mais après tant d'affronts que mon orgueil endure

Je veux que vous fçachiez, que le plus grand de tous ,

Eft d'être protégé d'un homme tel que vous.

SCENE VI

CICERON.

LE traître penfe-t-il à force d'infolence;

Par fa fauffe grandeur prouver son innocence Tu ne peux m'imposer, perfide, ne crois pas Eviter l'œil vangeur attaché fur tes pas. 000000000000000000000000. SCENE VI

CICERON, CATON.

CICERON.

EH bien, fage Caton, Rome eft-elle en défen

fe?

CATON..

Vos ordres font fuivis, ma prompte vigilance A difperfé déjà ces braves Chevaliers

Qui fous vos étendarts marcheront les premiers; Mais je crains tout du peuple & du Sénat luimême.

Du Sénat ?

CICERON

CATON.

Enyvré de fa grandeur fuprême,

Dans la divifion il se førge des fers.

CICERON.

Les vices des Romains ont vengé l'univers.
Je le fçais, je le vois, la liberté chancelle.
Mais Rome a des Catons, j'efpere encor pour
elle.

CATON.

Ah! qui fert fon pays, fert fouvent un ingrat.
Votre mérite même irrite le Sénat:

voit d'un œil jaloux un éclat qui l'offense.

CICERON.

Les regards de Caton feront ma récompense.
Au torrent de mon fiécle, à fon iniquité,
J'oppose ton fuffrage & la poftérité.
Failons notre devoir, les Dieux feront le refte.

CATON.

Eh! comment réfifter à ce torrent funefte?
Quand je vois dans ce Temple aux vertus élevé
L'infame trahifon marcher le front levé?
Croit-on que Mallius, cet indigne rébelle,
Ce Tribun de foldats, fubalterne infidéle,
De la guerre civile arborât l'étendart?
Qu'il osât s'avancer vers ce facré rempart?
Qu'il eût pu fomenter ces ligues menaçantes,
S'il n'étoit foutenu par des mains plus puiffan-

tes:

Si quelque rejetton de nos derniers tyrans, N'allumoit en fecret des feux plus dévorans?

Les premiers du Sénat nous trahiffent, peut

être.

Des cendres de Sylla, des tyrans vont renaître. Céfar fut le premier que mon cœur soupçonna : Oui, j'accufe Céfar.

CICERON.

Et moi, Catilina.

De brigues, de complots, de nouveautés avide, Vafte dans les projets, impétueux, perfide, Plus que Céfar encor je le crois dangereux, Beaucoup plus téméraire, & bien moins géné

reux;

Avec art quelquefois, fouvent à force ouverte,
Vain rival de ma gloire, il conspira ma perte.
Aujourd'hui qu'il médite un plus grand attentat,
Je ne crains rien pour moi, je crains tout pour
l'Etat.

Je viens de lui parler, j'ai lu fur fon visage,
J'ai vu dans fes difcours fon audace, fa rage,
Et la fombre hauteur d'un efprit affermi,
Qui fe laffe de feindre, & parle en ennemi.
Je préviendrai fa rage.

CATON.

Oui, le crime eft dans Rome Mais pour fauver l'Etat il fuffit d'un grand homme.

CICERON.

Si Caton me feconde il fuffit de nous deux, Les méchans réunis en font moins dangereux. Céfar peut confpirer; mais je connois fon ame Je fçais quel noble orgueil le domine & l'en flamme:

Ce cœur ambitieux ne peut être abbatu,

Jufqu'à fervir un lâche,

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Il aime Rome encore ; il ne veut point de maî

tre:

Mais je prévois trop bien qu'un jour il pourra l'être.

Si le traitre l'entraîne en fon parti fatal,
S'il fe joint à Céfar, il fe donne un rival:
Par leur défunion Rome fera fauvée.
Allons, n'attendons pas que de fang abreuvée
Elle tende vers nous fes languiffantes mains,
Et qu'on donne des fers au refte des humains.

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