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SCENE

IV.

MARTIAN, AURÉLIE, CATILINA.

MARTIA N.

SEIGNEUR, Cicéron vient près de ce lieu fatal

Par fon ordre bientôt le Sénat fe raffemble.
Il prétend vous parler.

AURÉLIE.

Catilina! je tremble,

A cet ordre fubit, à ce funeste nom.

CATILINA.

Mon époufe trembler au nom de Cicéron!
Que Nonnius féduit le craigne & le revère:
Qu'il fletriffe à fon gré fon rang, fon caractere,
Qu'il ferve, s'il le veut ; je plaindrai fon erreur:
Mais de vos fentimens j'attends plus de gran-
deur.

Allez, fouvenez-vous que vos nobles ancêtres
Choififfoient autrement leurs Confuls & leurs
Maîtres.

Quoi! vous femme & Romaine, & du fang de
Néron,

Vous feriez fans orgueil & fans ambition?
Il en faut aux grands cœurs.

AURÉLI E.

Tu crois le mien timide

La feule cruauté te paraît intrépide;

Tu m'ofes reprocher d'avoir tremblé pour toi!

Le Conful va paraître, adieu, méconnois moi Apprends que cette épouse à tes loix trop fou mife,

Que tu devrois aimer, que ta fierté méprise, Qui ne peut te changer, qui ne peut t'attendrir, Plus Romaine que toi, peut t'apprendre à mou

rir.

CATILINA.

Que de chagrins divers il faut que je dévore! ́ Cicéron que je vois eft moins à craindre encore. oooooooo0000000000000000

SCENE V.

CICERON, CATILINA.

CICERON.

AVANT que le Sénat fe rassemble à ma voix

Je viens, Catilina, pour la derniere fois Apporter le flambeau fur le bord de l'abyfme Où votre aveuglement vous conduit par le cri

me:

CATILINA.

Qui, vous ?

CICERON.

Moi.

CATILINA.

C'eft ainfi que votre inimitié....

CICERON.

C'est ainfi que s'explique un refte de pitié;
Vos cris injurieux, votre plainte frivole

Ont affez fatigué les murs du Capitole.
Vous feignez de penfer que Rome & le Sénat
Ont avili par moi l'honneur du Confulat.
Concurrent malheureux à cette place infigne,
Votre orgueil l'attendoit: mais en étiez-vous
digne?

La valeur d'un foldat, le nom de vos ayeux,
Les prodigalités d'un jeune ambitieux,
Ces jeux & ces feftins qu'un vain luxe prépare
Etoient-ils un mérite affez grand, affez rare
Pour vous faire espérer de difpenfer des loix
Au Peuple fouverain qui régne fur les Rois?
A vos prétentions j'aurois cédé peut-être,
Si j'avois vu dans vous ce que vous deviez être.
Vous pouviez de l'Etat être un jour le foutien :
Mais pour être Conful, devenez citoyen.
Croyez-vous affaiblir ma gloire & ma puiffance,
En décriant mes foins, mon état, ma naiffance?
Dans ces temps malheureux, dans nos jours
corrompus

Faut-il des noms à Rome? il lui faut des vertus.
Ma gloire, & je la dois à ces vertus févéres,
Eft de ne rien tenir des grandeurs de mes peres:
Mon nom commence en moi : de votre honneur
jaloux,

Tremblez que votre nom ne finiffe dans vous.

CATILINA.

Vous abufez beaucoup, Souverain d'une ant

née,

De votre autorité paffagere & bornée.

CICERON.

Şi j'en avois ufé vous feriez dans les fers, Vous l'éternel appui des citoyens pervers Vous qui, de nos Autels fouillant les priviléges,

Portez jufqu'aux lieux faints vos fureurs facriléges,

Qui comptez tous vos jours, & marquez tous

vos pas

Par des plaifirs affreux, & des affaffinats; Qui fçavez tout braver, tout ofer, tout enfreindre;

Vous enfin qui fans moi feriez peut-être à craindre.

Vous avez corrompu tous les dons précieux Que pour un autre usage ont mis en vous les Dieux;

Courage, adreffe, efprit, graces, fierté fubli

me,

Tout dans votre ame aveugle est l'instrument du crime.

Je détournois de vous mes regards paternels, Qui veilloient aux deftins du refte des mortels: Ma voix que craint l'audace, & que le faible implore,

Dans le rang des Verrès ne vous mit pas encore;
Mais devenu plus fier par tant d'impunité,
Jufqu'à trahir l'Etat vous avez attenté.

Le défordre eft dans Rome, il eft dans l'Etrurie:
On parle de Prénefte, on fouleve l'Ombrie,
Les foldats de Sylla de carnage alterés,
Sortent de leur retraite, au meurtre préparés.
Mallius en Tolcane arme leurs mains féroces ;
Les coupables foutiens de leurs crimes atroces
Sont tous vos partisans déclarés, ou fecrets;
Par tout le noeud du crime unit vos intérêts.
Ah! fans qu'un jour plus grand éclaire ma juftice,
Sçachez que je vous crois leur chef ou leur com-

plice;

Que j'ai par tout des yeux qui percent vos deffeins;

Que malgré vous encore il eft de vrais Remains;

Que ce cortége affreux d'amis vendus au crime
Sentira, comme vous, l'équité qui m'anime.
Vous n'avez vu dans moi qu'un rival de gran-
deur:

Voyez-y votre Juge, & votre accufateur,
Qui va dans un moment vous forcer de répondre
Au tribunal des loix qui doivent vous confon-

dre;

Des loix qui fe taifoient sur vos crimes passés, De ces loix que je vange, & que vous renver Tez.

CATILINA.

Je vous ai déjà dit, Seigneur, que votre place
Avec Catilina permet peu cette audace;
Mais je veux pardonner des foupçons fi honteux
En faveur de l'Etat que nous fervons tous deux.
Je fais plus, je respecte un zéle infatigable,
Aveugle, je l'avoue, & pourtant eftimable.
Ne me reprochez plus tous mes égaremens,
D'une ardente jeuneffe impétueux enfans;
Le Sénat m'en donna l'exemple trop funefte;
Cet emportement paffe, & le courage refte.
Ce luxe, ces excès, ces fruits de la grandeur
Sont les vices du temps, & non pas de mon cœur.
Songez que cette main fervoit la République;
Que Tribun en Afie, & Préteur en Affrique,
J'ai, malgré nos excès & nos divifions,
Rendu Rome terrible aux yeux des Nations;
Moi, je la trahirois ! moi qui l'ai sçu défendre!
CICERON.

Marius & Sylla, qui la mirent en cendre,
Ont mieux feryi l'Etat & l'ont mieux défendu.
Les tyrans ont toujours quelque ombre de ver

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