Mais je punis la foeur & je cherche le frere; Pliftène me feconde; en un mot, il vous fert: Notre ennemi commun fans doute eft découvert. Vous frémiffez, Madame.... CLITEM NESTRE. O nouvelles victimes! Ne puis-je refpirer qu'à force de grands crimes? Egifte, vous fçavez, que j'ai privé du jour.... Le fils que j'ai nourri périroit à fon tour! Ah! de mes jours ufés, le déplorable refte, Doit-il être acheté par un prix fi funefte?... ÉGISTE. Songez.... CLITEMNESTRE. Non, laiffez-moi dans ce trouble mortel Confulter de ces lieux l'Oracle folemnel. ÉGISTE Madame, à mes deffeins mettra-t-il des obftacles? Qu'attendez-vous ici des Dieux & des Oracles? Au jour de notre hymen furent-ils écoutés ? CLITEM NESTRE. Vous rappellez des temps dont ils font irrités. De mon cœur étonné vous voyez le tumulte ; L'amour brava les Dieux, la crainte les confulte: N'infultez point, Seigneur, à mes fens affaiblis Le temps qui change tout, a changé mes efprits Et peut-être des Dieux la main appéfantie Se plaît à fubjuguer ma fierté démentie: Mais une fille efclave, un fils abandonné, L'idée en eft horrible; & je fuis mere encore. • ÉGISTE. Vous êtes mon épouse, & fur tout vous régnez; Rappellez Clitemneftre à mes yeux indignés ; Ecoutez-vous du fang le dangereux murmure, Pour des enfans ingrats qui bravent la nature? Venez; votre repos doit fur eux l'emporter. CLITEMNESTRE. Du repos, dans le crime; ah, qui peut s'en flatter! Fin du premier Ade. PILADE, où fommes-nous ? en quels lieux t'a conduit Le malheur obftiné du deftin qui me fuit? A peine as-tu caché fous ces rocs escarpés PILADE. J'ignore en quels climats nous jette la tempête Qui t'a livré le fils, qui t'a promis le pere, ORESTE. Ce Dieu dans fa colere a repris fes bienfaits, Sa faveur eft trompeuse, & dans toi je contemple Des changemens du fort un déplorable exemple. As-tu dans ces rochers qui défendent ces bords, Où nous avons pris terre après de longs efforts? As-tu caché cette urne & ces marques funèbres, Qu'en des lieux détestés, par le crime célebres Dans les champs de Micène où régnoient mes aïeux, 9 Nous devions apporter par les ordres des Dieux, Cette urne qui contient les cendres de Pliftène, Ces dépôts, ces témoins de vengeance & de haine, Qui devoient d'un tyran tromper les yeux cruels? PILADE. Oui, j'ai rempli ces foins. ORESTE. O décrets éternels!' Quel fruit tirerons-nous de notre obéïffance ?' Ami, qu'eft devenu le jour de la vengeance ? Reverrai-je jamais ce Palais, ce féjour, Ce lieu cher & terrible où j'ai reçu le jour ? Où marcher, où trouver cette fœur généreuse, Dont la Gréce a vanté la vertu courageufe, Que l'on admire, hélas! qu'on n'ofe fecourir ; Qui conferva ma vie, & m'apprit à fouffrir; Qui, digne en tous les temps d'un pere magna nime, N'a jamais fuccombé fous la main qui l'oppri me? Quoi donc, tant de héros, tant de Rois, tant d'Etats, Ont combattu dix ans pour venger Ménélas ; PILADE. و Regarde ce Palais, ce Temple, cette tour Ce tombeau, ces cyprès, ce bois fombre & fauvage, De deuil & de grandeur tout offre ici l'image. ORESTE. Il gémit; tout mortel eft-il né pour fouffrir? |