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de l'erreur; je suis venu lui apporter la vérité ; voilà mon titre : quiconque aime la vérité m'écoute. Mais déjà ce mot n'a plus aucun sens pour une raison pervertie; il est nécessaire qu'on le lui explique: Qu'est-ce que la vérité? demande le juge distrait et stupide; et, sans attendre la réponse, il sort, déclare qu'il ne trouve rien de condamnable dans l'accusé, et le livre avec indifférence à la multitude pour en faire son jouet, et bientôt sa victime (1).

Ce drame, profond dans sa simplicité, comme tout ce que renferme l'Evangile, peint mieux que de longs discours, cette défaillance morale, cette espèce de mort intellectuelle, où tombent les hommes et les peuples, lorsque, cessant d'être trompés par les illusions de l'erreur, ils refusent obstinément de céder à la convic tion de la vérité. « Telle est, s'écrioit il y » a peu d'années un orateur éloquent,

(1) Vid. Joan. c. xviii, f. 37, 38.

>> telle est aujourd'hui la grande plaie de >> l'Eglise, ou, pour nous servir d'une » expression des Livres saints, sa plaie dé» sespérée, desperata est plaga ejus (1). >> Car, que pouvons-nous opposer à cet » état de choses? Il est possible de résister » à la violence et à la force ouverte; mais » qu'opposer à ces armes invisibles qui » échappent à toute espèce de lutte, l'in>> souciance et le dédain, et comment >> chasser l'impiété de ce dernier poste, » où, fatiguée de combats, elle a fini par >> se retrancher? Nous connoissons bien » le remède aux maladies du corps; mais » le remède à cette maladie épidémique » des esprits, qui le trouvera? On peut >> savoir comment guérir un malade qui » désire sa guérison; mais celui qui ne » veut pas guérir, et ne sait pas même >> s'il est malade; mais celui qui, aux » portes de la mort même, a toute la >> confiance et la sécurité de la santé, par

(1) Mich. 1, 9.

» où le prendre, et qui le sauvera? Nous >> savons comment on peut réfuter une >> erreur ou défendre un dogme; mais >> quelle réfutation reste-t-il donc à faire, » ou quelle instruction reste-t-il à donner >> quand le doute prend la place de tout, >> et que le premier dogme est le mépris » de tous les dogmes? Nous connoissons » le frein que l'on peut mettre au fana>> tisme religieux, puisqu'on le trouve > dans la Religion même; mais comment » arrêter le fanatisme philosophique? >> Où sera donc son contre-poids, et » comment faire entendre raison à des >> hommes qui n'ont pour règle de toute

» vérité que leur propre raison, et qui,

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» comme ces pharisiens follement pré» somptueux dont il est parlé dans saint >> Jean, nous disent froidement et dogma>>tiquement: Nous sommes sages, parce >> que nous sommes sages, et nous voyons >> parce que nous voyons: Quia vide» mus (1)? Enfin nous pouvons arrêter

(1) Joan. ix, 41.

>> un torrent dans sa course impétueuse; >> mais ces eaux bourbeuses et stagnantes >> d'une corruption raisonnée qui se com. >> plaît dans son repos, et ne laisse de » l'énergie que pour l'intrigue et la cupi» dité, qui les remuera? et quel autre que » Dieu, par un miracle singulier de sa » miséricorde, peut nous tirer de cette >> torpeur indéfinissable qui déconcerte » à la fois, et les observations des sages, » et la sollicitude des pasteurs; et de ce >> marasme moral contre lequel ne peu>> vent rien, ni la force de la raison, ni » la force du zèle, ni la force des lois, ni » la force des armes (1) ».

Incompréhensible stupeur des hommes de notre temps! Plus ils sont frappés, plus ils s'endurcissent; plus la vérité fait d'efforts pour les ramener à elle, plus ils sont indifférens à la vérité. Qu'ils meurent donc, puisqu'ils veulent mou

(1) Lettre pastorale de Mr. l'Evêque de Troyes, à l'occasion de son entrée dans son diocèse, p. 11.

rir! mais ôtons-leur du moins toute excuse; mettons à découvert leur inconséquence et leur déraison; forçons-les de rougir de l'idole à laquelle ils sacrifièrent tout, vérité, vertu, et la vie même.

Nous aurons atteint ce but, si nous démontrons que l'indifférence en matière de religion, qu'on préconise comme le dernier effort de la raison et le plus précieux bienfait de la philosophie, est aussi absurde dans ses principes que funeste dans ses effets. Or, nous espérons environner de tant d'évidence ces deux propositions, que ceux même qui conserveroient le triste courage de les nier, ne tenteront même pas de les combattre avec l'arme du raisonnement.

Et d'abord, rien n'est plus absurde que l'indifférence, parce qu'elle ne peut raisonnablement reposer que sur ces deux principes: Que nous n'avons aucun intérêt à nous assurer de la vérité de la Religion; ou qu'il est impossible de découvrir la vérité qu'il

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