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table suicide moral, plus criminel mille fois que celui qui ne détruit que le corps.

Que la brute, privée de réflexion, vive et meure sans s'inquiéter de l'avenir, cette insouciance est sa condition naturelle et nécessaire. Mais quand l'homme, doué de facultés incomparablement plus nobles, capable de s'élever à l'idée de Dieu, et d'embrasser l'infini par sa pensée, ses désirs et ses espérances, se précipite de cette hauteur dans Ja vile condition des bêtes, ne veut plus connoître, à leur exemple, que des penchans et des besoins et, dégoûté du partage immortel que lui assigna le Créateur, leur envie jusqu'au néant; cela confond, cela épouvante, et l'on n'a point de paroles pour exprimer l'horreur qu'inspire une si profonde dêgradation.

L'indifférence avengle est donc, sans contredit, l'état le plus avilissant où une créature raisonnable puisse tomber, Le seul cas où l'homme sage pût demeurer indifférent sur la Religion, seroit celui où nous n'aurions aucun intérêt de savoir si elle est vraie ou fausse, ou aucun moyen de nous en assurer. En d'autres termes, il faut, comme l'observe M. de Bonald, que les indifférens supposent qu'il n'y a dans la Religion, considérée en géné ral et dans toutes ses différences, ni vrai ni faux ; » ou que s'il y a vrai et faux, dans la Religion » comme en tout autre chose, l'homme n'a aucun

» moyen de les distinguer; ou qu'enfin la Religion, » vraie ou fausse, est également indifférente pour >> l'homme.

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>>> La supposition, continue le même écrivain, » que toutes les Religions sont indifférentes, n'est » pas soutenable en bonne philosophie. Il n'y a >> pas plus de philosophie sans un premier prin»cipe, cause de tous les effets moraux et physi »ques, qu'il ne peut y avoir d'arithmétique sans » une unité première, mère de tous les nombres; » ou de géométrie, sans un premier point géné>> rateur des lignes, des surfaces et des solides. Et >> comment supposer qu'il n'y ait pas vrar et faux » dans des Religions opposées entre elles, mais qui » pourtant sont partout le rapport vrai ou faux de >> Dieu à l'homme, et de l'homme à son sem» blable, la raison du pouvoir, la règle du devoir, » la sanction des lois, la base de la société ; lorsqu'il »y a vrai et faux partout où les hommes portent » leur raison ou leurs passions; vrai et faux en tout, » et même à l'Opéra, et jusque dans les objets les » plus frivoles de nos connoissances et de nos plai>> sirs? Mais s'il y a vrai et faux, ordre et désordre, » dans les diverses Religions considérées en géné»ral, peut-on supposer, en bonne philosophie, » que l'Être qui est l'intelligence et la vérité su»prêmes, ait refusé aux hommes, êtres intelligens » aussi, capables de connoître et de choisir, d'ai

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» mer ou de haïr, tout moyen de distinguer le vrai » et le faux dans les rapports qu'ils ont avec lui? » Et à quelle fin leur auroit-il donné cette ardeur » démesurée de connoître, et leur auroit-il permis » de découvrir les rapports qu'ils ont même avec >> les choses insensibles? Et si l'homme peut dis» tinguer le bien et le mal dans les diverses Reli»gions, comment supposer qu'il puisse rester in» différent à la vérité et à l'erreur, lui qui ne doit T rester indifférent sur rien, et chez qui l'indiffé»rence est même le caractère le plus marqué de la stupidité (1) »

Ces courtes observations du philosophe le plus profond qui ait paru en Europe depuis Malebranche, montrent déjà bien clairement l'absurdité des seuls principes sur lesquels on puisse fonder l'indifférence des Religions. En soumettant de nouveau ces principes à un examen rigoureux et détaillé, nous espérons ne laisser d'excuse ni à la crédulité qui les adopte, ni à la mauvaise foi qui feint de les adopter, Nous n'aurons besoin de talent: l'art quelquefois est nécessaire pour revêtir l'erreur des apparences de la vérité; mais veut-on rendre à celle-ci son éclat, il suffit d'abaisser le voile dont on s'efforçoit de la couvrir.

pas même

pas

pour

cela

(1) Sur la Tolérance des Opinions, par M. de Bonald, Spectateur françois au XIXe siècle, tom. IV, p. 72, 73,

Afin que le lecteur suive aisément la discussion, il convient qu'il en ait d'avance une idée nette, qu'il connoisse le but où il marche, et par quelle route il y doit arriver. Voici donc, en peu de mots, ce que nous nous proposons d'établir, et l'ordre dans lequel nous l'établirons.

On soutient que la Religion, vraie ou fausse, est indifférente pour l'homme; et nous prouverons que, supposé l'existence d'une vraie Religion, cette Religion est pour l'homme, considéré soit individuellement, soit en société avec ses semblables et avec Dieu, d'une importance infinie; d'où il suit qu'il a un intérêt infini à s'assurer s'il existe en effet une vraie Religion, et qu'il y a par conséquent une folie infinie à demeurer à cet égard dans l'indiffé rence. Pour éclaircir nos principes, en les appli quant à une Religion connue, nous supposerons en outre que le Christianisme est cette Religion véritable, dont il s'agit de montrer l'importance..

On soutient que toutes les Religions sont en elles-mêmes indifférentes; et nous prouverons qu'aucune Religion n'est indifférente en soi, ou qu'en toute Religion il y a bien ou mal, vérité ou erreur; qu'il existe nécessairement une vraie Religion, c'est-à-dire, une Religion d'une vérité ou d'une bonté absolue, et qu'il n'en existe qu'une seule d'où se déduit l'obligation de l'embrasser, s'il est possible de la reconnoître.

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On soutient que, s'il existe une véritable Religion, l'homme n'a aucun moyen de la discerner des Religions fausses; et nous prouverons que, dans tous les temps, les hommes ont eu un moyen facile et sûr de reconnoître la véritable Religion: d'où il résulte que l'indifférence n'est pas seulement un état déraisonnable, mais encore un état criminel.

Chacun sans doute restera juge, pour soi, de la force des preuves que nous allons développer. Nous ne contestons à personne ce droit naturel. Mais quiconque refuseroit d'examiner les fondemens de l'indifférence, ne pourroit être compté parmi les indifférens dogmatiques. Il se rangeroit, par cela seul, au nombre de ces insensés qui, voulant à tout prix confondre les terreurs de la conscience avec la répugnance de la raison, craignent de regarder en face la vérité, et se forment contre elle un triste rempart de ténèbres, foible défense contre le remords.

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