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Mais, à la persécution des sophismes succède la persécution des sens la foi demeure intacte, et cependant les moeurs se dépravent. Ces chrétiens si austères, séduits par la volupté, se livrent à des désordres dont le nom même devoit leur être à jamais inconnu. La licence pénètre jusque dans le sanctuaire ; l'autel, le sacrifice est souillé par des mains indignes. Que deviendra le Christianisme ainsi profané? Tout à coup un principe vivifiant excite en cette masse corrompue une fermentation salutaire; tout change, tout se renouvelle; des apôtres enflammés d'un zèle divin font couler les larmes de la pénitence; l'ordre renaît avec la sainte discipline; partout se relèvent et fleurissent les vertus languissantes; des prodiges de charité, des miracles. d'amour, étonnent de nouveau la terre consolée; l'esprit a triomphé de la chair

Ecclesia sentiat, et quid habeat sana doctrina. S. Aug. Conf. Lib. VII, chap. xix, no. 2.

une seconde fois, et l'Église retrouve ses enfans.

Qu'on ne se flatte pas néanmoins que cette paix soit durable: à peine quelques trèves de lassitude interrompent le combat de l'erreur contre la vérité, dont le pouvoir, quoique irrésistible sur l'entendement, ne s'étend pas toutefois jusqu'à détruire, par son propre effet, l'opposition d'une volonté pervertie. Sous l'empire même de l'évidence, l'homme demeure libre, non pas de se méprendre, mais de se révolter; non pas de ne point voir, mais de nier ce qu'il voit: liberté terrible qui, trop souvent réduite en usage, devient, pour quiconque sait penser, la preuve la moins équivoque du vice originel de notre nature, et tout ensemble l'explication des épreuves auxquelles la Religion a été perpétuellement soumişe depuis son origine. Sans cesse agitée

par quelque orage, il entre dans sa destinée, comme dans celle de l'homme,

de ne jamais jouir ici-bas d'un repos par

fait. L'orgueil, la licence, l'avarice, toutes les passions liguées contre elle, lui suscitent incessamment de nouvelies guerres, mais aussi lui préparent de nouveaux triomphes. Force étonnante de la société chrétienne! L'hérésie, tantôt souple, tantôt audacieuse, prend toutes les formes, se couvre de tous les masques, se plie et replie en tous sens pour ébranler ses dogmes; et constamment invariable dans sa doctrine, l'Eglise voit les sectes rebelles expirer l'une après l'autre à ses pieds: l'esprit d'indépendance, ou l'ambition de dominer, excite dans son propre sein des divisions suivies souvent de schismes déplorables; aussitôt de ses entrailles déchirées, mais toujours fécondes, sortent en foule de nouveaux enfans qui la consolent de ceux qu'elle a perdus des princes jaloux attentent à ses droits, et s'efforcent de troubler sa divine hiérarchie; malgré leurs violences et leurs ruses, son gouvernement, affermi par les coups qu'on lui porte,

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subsiste inaltérable, et se perpétue de siècle en siècle au milieu des déplacemens et des ruines des gouvernemens. humains semblable à ces antiques monumens de l'Egypte, dont l'Arabe vagabond, qui plante le soir, à l'abri de leur masse immobile, la tente qu'il enlèvera le matin, essaie de détacher en passant quelques pierres, et bientôt, fatigué d'un travail sans fruit, s'enfonce et disparoît dans des solitudes inconnues.

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Mais c'est maintenant par leur base que le Christianisme et le monde moral vont être attaqués. On a reconnu que l'Eglise et tous ses dogmes reposent sur l'autorité, comme sur un roc inébranlable. Aussitôt la multitude des sectaires, divisés sur tout le reste, s'unissent pour saper ce fondement de toutes les vérités. La réforme, à ce premier moment, est leur cri de guerre; plus tard, ce sera la philosophie. Ecoutez-les, ils viennent affranchir la terre des abus introduits par le temps ou par les passions, et gué rir l'esprit humain des préjugés qui l'obs

curcissent. Armés de ce prétexte séduisant, ils multiplient sans fin les destructions: la suprématie du chef de l'Eglise, l'épiscopat, l'ordre pastoral, les sacremens, le culte et ses saintes pompes, rien n'échappe à la hardiesse de leur zèle réformateur. Mutilant à l'envi la foi, et se hâtant, en quelque sorte, de se délivrer du tourment de croire comme du tourment d'obéir, ils proclament rapidement, dans leurs symboles éphémères, l'abolition de tous les dogmes religieux et sociaux. Luthériens, sociniens, déistes, athées, sous ces divers noms qui indiquent les phrases successives d'une même doctrine, ils poursuivent, avec une infatigable persévérance, leur plan d'attaque contre l'autorité. Ils nient les mystères du Christianisme; ils nient sa morale; ils nient son Auteur; «ils nient >> Dieu; ils se nient eux-mêmes. Là finit » la raison humaine (1)».

(1) Essai analytique sur les Lois de l'ordre social, par M. de Bonald.

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