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dre par des miracles (a), & que les hommes ne l'ont pas voulu écouter, il les abandonne fouvent à leur mauvaise volonté, pour les punir de leur endurciffement.

[La piece que je vous envoie (b) a été faite devant le Carême, & imprimée il y a plus d'un mois. On la trouva trop forte, & on a pris réfolution de la fupprimer, & d'en imprimer une autre plus adoucie. On y travaille préfentement, & on la doit envoyer imprimer (car on ne l'ofe pas faire à Paris) dans trois ou quatre jours. Mais comme il faut près de trois femaines pour la mettre en état d'être publiće, je ne fais s'ils ne nous contraindront point par leur violence de la publier telle quelle est maintenant. Je vous fupplie de m'en mander votre avis avec toute liberté ] (c).

(a) Ces miracles, dont parle M. Arnauld font ceux qui furent faits en 1656. par la Sainte Epine, dans le Monaftere de P. R. de Paris, dont le premier fur-tout étonna tout le monde, & arrêta pour un tems les effets de l'animofité des Jéfuites. (b) C'est l'écrit des Difficultés pronofées à l'Affemblée du Clergé &c.

(c) Les additions faites à cette lettre, & qui fe trouvent entre deux crochets, tirées des Mémoires de M. Hermant, L. XXV. Ch. XXIII.

font

La rce. du
T. VIII.

1661.

LETTRE CXIII.

Au même, M. HERMANT. Sur le renvoi des Penfionnaires de Port-Royal ; miracle arrivé fur Mademoiselle de Monglas à Port-Royal. (a).

CEft

'Eft un procédé bien extraordinaire que le renvoi des Penfionnaires. Mais ce qui eft encore plus étrange, c'eft qu'il n'y a perfonne en France 24 Avril qui ofe ouvrir la bouche pour se plaindre d'une fi manifeste injustice, & pour représenter l'injure qu'on fait à des époufes de J. C. de les condamner & de les traiter de la maniere la plus fcandaleuse du monde, fans les ouir & fans leur dire feulement pourquoi on les traite de la forte. Il faudroit avoir un cœur de tigre pour n'être pas touché des larmes de tant de pauvres enfans, qui fe jettent aux pieds des Religicufes qu'elles rencontrent, en les conjurant de ne les pas renvoyer. Ce ne font que foupirs & que fanglots dans toute cette maifon, &

(a) M. Arnauld dans le commencement de cette lettre mandoit ce qui s'étoit paffe la veille à Port-Royal, lorfque M. le Lieutenant Civil étoit venu apporter l'ordre, de la part du Roi, de renvoyer les Penfionnaires & les Poftulantes; avec défenfes exprelles d'en recevoir à l'avenir, tant pour y être élevées, que pour y être Novices. ]

quelque réfignées que ces filles puiffent être à la volonté de Dieu, il eft impoffible qu'elles ne foient pas faifies par le faififfement même de celles qu'on arrache d'entre elles par une fi grande barbarie. Cependant on ne croit pas que la rage des Jéfuites en demeure là. Il faut une entiere deftruction de cette maifon de Dieu, pour fatisfaire ces cruels enfans d'Efau, Qui dicunt exinanite, exinanite ufque ad fundamentum in eâ. Mais Dieu eft patient, parce qu'il eft éternel, & qu'il prépare des fupplices éternels à ceux qui fe réjouiffent d'être venus à bout de leur deffeins fanguinaires contre fes fidelles fervantes. J'ai le cœur fi ferré, que je ne faurois vous en dire davantage. Je ne fais fi tous ceux qui fe taifent font innocens, & fi une fi vifible oppreffion de l'Eglife ne demande de ceux qui y font en autorité, que des larmes impuiffantes.

J'ai reçu depuis deux jours une lettre de Mr. Le Caron, par laquelle il me mande que Mr. d'Amiens a dit ces propres paroles à fon Théologal: On me coupera plutôt le poing, que de foufcrire le Formulaire ; je n'obligerai perfonne à le foufcrire, feulement ne fouffrirai-je pas qu'on dogmatife contre le point de droit, & ne permettrai point qu'on difpute de celui du fait. S'il demeure dans cette pensée, il fera honte à beaucoup d'Evêques. Mais je ne fais fi l'on fe doit promettre grande fermeté d'un homme qui n'a point de véritable fond de vertu.

Je ne fais comment j'oubliois à vous dire que pendant que les hommes oppriment les pauvres filles, Dieu leur donne des marques particulieres de fon amour. Mademoiselle de Monglas âgée d'environ treize ans, a eu de grands maux depuis deux ans, qui lui ont déboité tous les os du corps, & fur- tout la hanche étant rentrée en dedans du ventre depuis deux ou trois mois, une de fes jambes s'eft trouvée de quatre ou cinq grands doigts plus courte que l'autre, & quand elle fe mettoit à genoux, il falloit qu'elle mît un gros livre fous un de fes genoux, autrement elle eût été toute pliée d'un côté. Cela obligea à lui donner un foulier qui étoit plus haut que l'autre de quatre grands doigts, & il y a un mois qu'on fut encore obligé de le rehauffer. Etant dans cette incommodité & dans beaucoup d'autres encore, elle fit la femaine. fainte une neuvaine à St. Bernard, afin qu'il lui obtint de Dieu quelque foulagement à fes maux, pour pouvoir entrer au Noviciat, en ayant une très-grande & très-folide envie, quoique fort jeune, parce qu'elle a l'efprit fort avancé, & une piété toute extraordinaire pour fon âge. Elle s'eft trouvée beaucoup plus forte dans cette neuvaine, & mercredi dernier elle trouva tout d'un coup la jambe allongée, de forte que

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fon foulier l'incommodoit beaucoup, & en ayant pris deux égaux, il fe trouva qu'elle ne boitoit plus en aucune forte. Cela a continué depuis ce tems, & il y a apparence que cela continuera toujours. Comme elle n'a été vue dans fon mal par aucun Médecin de dehors, on ne peut pas faire autorifer ce miracle, mais il n'en eft pas moins grand, ni moins confolant pour celles qui le connoiffent: la ferveur de cette fille eft fi grande qu'on lui donnera demain l'habit (a).

(a) On trouve la réponse de M. Hermant aux deux lettres de M. Arnauld du 21 & 24 Avril, dans fes Mémoires, L. XXV. Chap. XXIII. Elle eft intéreffante.

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La 72e, du T. I. 3 Mai 1661.

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A Mr. DU HAMEL, Curé de S. Merry à Paris. Pour répondre à une lettre qu'il avoit écrite à M. Singlin, fur fa disposition au regard de la fignature du Formulaire.

ON

MONSIEUR,

N vient de me faire voir, comme vous l'aviez defiré, la lettre que vous avez écrite à Mr. Singlin (a). Je fuis touché autant que je le dois être de votre agitation & de vos peines, & je ne puis que je n'eftime le fond dont elles partent, qui eft (une tendresse de confcience tout-à-fait admirable, &) une frayeur très-louable de manquer à ce que vous devez à vos fupérieurs. Mais confidérez, s'il vous plait, mon très-cher Frere, que tous les Pasteurs de l'Eglife doivent dire avec St. II. Corint. Paul: non poffumus aliquid adverfus veritatem, fed pro veritate. Que fi vous devez craindre de défobéir à vos fupérieurs, vous ne devez pas moins appréhender de rendre témoignage contre un Evêque innocent, & de condamner mente en quelque forte par votre foufcription, des perfonnes à qui Dieu vous a uni d'une maniere très-particuliere, & à qui vous ferez bien la juftice de croire, [ qu'ils ne fe voudroient pas perdre pour] toutes les confidérations du monde, [& qu'ils ne s'opiniatreroient pas à dire ] que les Propofitions condamnées ne font point dans Janfénius, s'ils n'en étoient très-perfuadés. Vous favez d'une part qu'ils ont quelque lumiere en ces matieres, pour les avoir étudiées avec

(a) Mr. Singlin étoit fon Directeur.

foin;

foin; & que de l'autre ils ont affez de crainte de Dieu pour ne rien faire contre leur confcience. Je ne fais fi vous connoiffez beaucoup d'Evêques de qui vous puiffiez prétendre ces deux qualités néceffaires pour bien juger de ce point de fait, c'est-à-dire, s'ils ont bien étudié Janfénius, & s'ils font affez fermes pour préférer la vérité à tous les intérêts du monde. Pour moi je vous proteste devant Dieu, que je n'en connois aucun préfentement qui ait ensemble ces deux chofes. Je reconnois dans Mr. d'Alet & dans quelques autres cette derniere qualité; mais vous m'avouerez que ni lui, ni ces autres n'ont pas mis beaucoup de tems à étudier ces matieres qui font très-épineufes & très-difficiles; que prefque tous les autres, ou font entièrement vendus à la Cour, comme font ceux qui dominent dans l'Assemblée, ou n'ont pas la force de réfifter, avouant à leurs amis qu'ils font très-fâchés de faire ce qu'ils font, mais qu'ils ne veulent pas fe perdre. Je prends Dieu à témoin que je ne vous dis rien que de très-affuré; & je fuis certain que fi vous faviez comment les chofes fe font paffées dans cette Assemblée, vous n'auriez que de l'indignation, & non de la révérence pour un procédé fi rempli de violence & d'injustice.

Il n'eft pas moins affuré que le Pape n'a jamais examiné cette question par lui-même, mais que tout ce qu'il en dit n'a été que fur la foi de fept ou huit Réguliers, dont les fuffrages, qui ont été imprimés, peuvent faire juger de leur fuffifance. Voilà, mon très - cher Frere, à quoi fe réduit cette autorité qui vous opprime. Ne croyez donc point que ce foit une action d'humilité, que de s'aveugler foi-même dans les chofes qui dépendent de la raifon & non de la révélation de Dieu; & furtout quand il s'agit de la réputation d'un tiers, qui nous doit être auffi chere que l'obéiffance que nous pouvons devoir à nos fupérieurs, en ces fortes de queftions qui ne regardent point la foi. Car enfin Dieu nous défend de condamner notre prochain, à moins que d'avoir des fujets capables de nous faire croire qu'il eft coupable; & l'autorité de tous les Evêques, dont prefque aucun n'a lu Janfénius (a), ne doit point avoir tant de force fur un esprit équitable pour lui faire croire qu'il a enfeigné les erreurs qu'on lui impute, que celle d'un grand nombre de Théologiens qui l'ont lu avec un très-grand foin, qui ont de la confcience, & qui ne gagnent rien à foutenir ce Prélat, que d'horribles perfécutions. On doit, pour lui faire justice, au moins douter

(a) Cela eft fi vrai qu'ils s'en vantoient en difant: Qu'il leur fuffifoit que le Pape eût dit que Janfénius avoit enfeigné l'héréfie qu'on lui imputoit.

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Denis

s'il les a enfeignées. Or dans le doute la charité oblige de ne point condamner, & de fufpendre fon jugement.

Mais ce qui caufe votre principale peine eft que vous vous êtes fouvent engagé de parole à vous rendre au jugement que feroit le Pape fur cette question de fait, & que même depuis la Bulle vous avez fouvent promis de la recevoir, quand elle vous feroit envoyée par vos fupérieurs légitimes. Souffrez, mon très-cher Frere, que je vous dife que fi j'étois en votre place, c'est ce qui me donneroit plus de fcrupule de figner; parce que j'appréhenderois que ce ne fût ce point d'honneur qui m'y engageât, & la crainte qu'on ne me reprochât d'avoir manqué à ma parole. Car vous jugez affez que ce n'eft pas par ces fortes d'engagemens que cette affaire fe doit décider. Si elle eft jufte, vous le devez faire, quand vous ne l'auriez jamais promis; & fi elle blesse la vérité & la juftice, vous ne le devez jamais faire quand vous l'auriez cent fois promis. Si les Propofitions ne font point dans Janfénius, quelque promeffe que vous ayiez faite de reconnoître qu'elles y font, vous n'en blessez pas moins la vérité en les y reconnoiffant. C'est donc par là feulement qu'il faut juger à quoi ces promeffes vous engagent; & vous devez craindre que ce ne foit même cet engagement, qui vous a fait trouver ces Propofitions dans Janfénius, quand vous l'avez lu. Car il eft certain, comme j'ai déja dit, qu'il faut beaucoup de lumiere & d'intelligence dans ces matieres, pour difcerner la vérité de l'erreur, & ne pas confondre la doctrine de la grace efficace, felon laquelle ces Propofitions peuvent être facilement entendues, avec les erreurs qu'elles enferment felon leur fens naturel. Et cependant qui ne trouve les Propofitions dans Janfénius que felon le fens de la grace efficace, ne les y trouve point; parce que le S. Siege a déclaré plufieurs fois, & les Jéfuites même le reconnoiffent, que la doctrine de la grace efficace n'eft point enfermée dans la condamnation de ces Propofitions.

C'est ce que je ne puis vous expliquer dans une lettre ; mais on a fait depuis peu un excellent livre où l'on fait voir avec tant d'éviRaymond. dence que Janfénius n'enseigne rien qui ne foit reconnu pour catholique par toute l'Eglife fur le fujet des cinq Propofitions, que toutes les perfonnes équitables en font maintenant perfuadées dans Paris; & que les Evêques de l'Affemblée, qui ont de la confcience, reconnoiffent qu'ils ont eu tort, & que ce qu'ils ont fait ne fe fauroit foutenir. C'est quoi, mon très-cher Frere, on vous conjure [au nom de Dieu,] de ne rien précipiter, [ & d'attendre au moins que vous ayiez reçu ce livre & encore d'autres écrits qu'on vous enverra;] afin que vous n'ayiez pas

pour

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