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haut point. Pour dompter ce monstre, il eut recours à la même prudence dont il avait usé pour terminer la guerre car, bien que ce qu'il avait fait lui donnât lieu d'attendre des Carthaginois une reconnaissance durable, il résolut d'abandonner des espérances douteuses et pleines de dangers, et prit le parti de retourner dans sa patrie, avant que le zèle de ses partisans se fût réfroidi, et que la fortune lui eût fait éprouver son inconstance. La plupart des hommes, en effet, ont dans la bouche le bien de la patrie, tandis qu'au fond du cœur ils songent beaucoup plus à leur intérêt privé. Aussi long-temps donc qu'ils peuvent accorder avec le salut de la république les moyens de conserver les honneurs et les richesses qu'ils possèdent, et d'en acquérir encore, ils témoignent pour elle le plus ardent amour; mais dès qu'ils courent le danger de se voir contraints de céder ces avantages à d'autres citoyens que la hauteur de leurs talens et l'importance de leurs services en rendent plus dignes, ils aiment beaucoup mieux écarter des hommes utiles au bien commun, que de souffrir des rivaux qui pourraient nuire à leur fortune.

XXX. A la vérité, tant qu'ils croient pouvoir se maintenir au niveau des autres, leur jalousie agit d'une manière moins ouverte et moins ardente; mais quand, laissés bien loin derrière, ils se sentent succomber sous le poids d'une comparaison qui met promptement à nu leur infériorité, et voient passer dans des mains étrangères les biens et les dignités après lesquels ils soupiraient, ce qu'ils désespèrent d'obtenir par leur mérite, ils s'appliquent à se l'assurer en calomniant et incriminant ceux qui y ont plus de droits. Il résulte de là que tout homme d'une haute capacité a beaucoup d'enne

stitutus, malitiam degenerum animorum acuit ipsa facilitate nocendi, quod insidiantibus magis expositus,` vel everti citra maximum laborem potest, vel citra periculum offendi. Xanthippum igitur hæc sagacissime perpendisse, quæ secuta sunt, evidenter affirmarunt. « Abnavigantem enim per quosdam a Carthaginiensibus immissos submersum ferunt, post acceptum beneficium illius auctorem gravatis exosisque, quo extincto famam etiam peregrina virtute servatæ civitatis expiraturam crediderint. >>

XXXI. Alii de fato Xanthippi non eadem; sed « punicam tamen perfidiam arguunt; datam enim discessuro navem veterem et rimarum plenam, sed ad speciem firmitudinis recens picatam : ceterum virum nequaquam decipientibus facilem, animadversa fraude, dissimulanter aliud navigium conscendisse, ereptumque periculo esse.» Non minoris perfidiæ, sed ob numerum peremptorum crudelitatis odio superior, iisdem temporibus perpetrata res traditur. Mercenarios enim ob navatam insigniter operam præmia paulo tumultuosius efflagitantes, in naves imposuerunt, facta spe alio quodam loco tributum ipsis iri, quod peterent. Sed a præfectis navium, quibus id negotii datum clam fuerat, in deserta quadam insula expositi relictique, quum omnis humanæ opis egenos, sine alimentis, sine navibus, neque

mis, et se trouve entouré de pièges. Du moins un naturel du pays est protégé contre ces intrigues par ses proches et ses amis; mais un étranger, qui est privé de cet appui, et contre qui la facilité de lui nuire aiguise la méchanceté des âmes basses, peut être abattu sans de grands efforts et offensé sans péril. La suite prouva évidemment qu'en effet aucune de ces réflexions n'avait échappé à Xanthippe; car on dit que, «< comme il gagnait le large, il fut submergé par des gens que les Carthaginois avaient envoyés après lui, ne pouvant supporter l'idée du service qu'il leur avait rendu, et croyant faire oublier par sa mort qu'ils devaient à la valeur d'un étranger le salut de leur république. »

XXXI. D'autres racontent différemment l'aventure de Xanthippe, mais en accusant néanmoins les Carthaginois de perfidie. Selon eux, « on lui donna pour s'en aller un vaisseau vieux et plein de fentes, qu'on venait d'enduire de poix, pour qu'il parût être en bon état ; mais le Lacédémonien, qu'il n'était nullement facile de tromper, s'étant aperçu de la ruse, s'embarqua furtivement sur un autre navire, et se déroba au danger. » On rapporte qu'à la même époque ils commirent une action non moins perfide, mais bien plus odieuse, à raison du nombre des victimes de leur cruauté. Car, comme les soldats mercenaires réclamaient un peu hautement le prix du service important qu'ils avaient rendu, ils les embarquèrent sur des vaisseaux qui devaient les transporter dans un lieu où ils leur faisaient espérer qu'on leur paierait ce qu'ils demandaient. Mais ceux qui commandaient ces vaisseaux, suivant l'ordre qui leur avait été donné secrètement, les débarquèrent et les laissèrent dans une île déserte, où, privés de tout secours humain, sans

manere fames, neque abire pelagus sineret, fœdo horrendoque genere mortis, extabuerunt.

XXXII. Apud alios auctores facinus hoc ad superiora tempora referri reperio, quibus Syracusani bellum cum Pœnis habuere; nomenque mansisse infami deinceps insulæ, ut Ostodes (Ossuariam possemus dicere) vocaretur. Ea post Liparam, occidentem versus in alto mari sita est. Quæ facta quomodocunque aut quocunque tempore evenerint, a cetera Ponorum immanitate nihil abhorrens habent. Neque igitur mirandum est, qui in socios adjutoresque suos hoc animo fuerunt, si adversum hostes iidem se gesserunt inclementius. Quanquam profecto ceteros captivorum satis tolerabiliter habuisse feruntur quod et ipsi multos ex suis in potestate Romanorum esse sciebant, quos permutatione instituta cupiebant recipere.

XXXIII. Sed adversus M. Regulum neque abscondere iram, neque moderari potuere, quin omnibus modis vexarent virum angerentque; cibum enim præbebant, non qui vel voluptatis aliquid afferre sensibus, vel vigoris corpori posset; sed qui tenuissima refectione spiritum infelicis ad producendas ejus miserias detineret at acerbiores erant contumelia perpetuæ, inter quas consueverant creberrime elephantum aliquem adducere, cujus barritu exterritus, et invisa specie tortus, nec

vivres pour subsister, sans vaisseaux pour en sortir, ils périrent du genre de mort le plus déplorable et le plus affreux.

XXXII. D'autres auteurs placent ce fait dans des temps fort antérieurs. Selon eux, cette cruauté se commit durant la guerre que les Syracusains firent aux Carthaginois, et l'île en conserva même dans la suite l'infâme nom d'Ostode (ce que nous pourrions rendre par l'Ile aux os). Elle est située derrière Lipare, dans la haute mer vers l'occident. Mais de quelque manière et en quelque temps que la chose soit arrivée, l'inhumanité dont les Carthaginois ont donné des preuves en bien d'autres occasions, la rend très-vraisemblable. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner, qu'après s'être conduits de la sorte envers ceux qui étaient leurs alliés et leurs auxiliaires, ils aient porté encore plus loin la barbarie envers leurs ennemis. On convient, et le fait est vrai, qu'ils traitèrent assez humainement leurs prisonniers; mais c'est parce que, sachant qu'un grand nombre des leurs étaient au pouvoir des Romains, ils désiraient leur faire recouvrer la liberté, au moyen d'un échange.

XXXIII. Mais ils ne purent ni dissimuler leur colère contre M. Regulus, ni mettre de bornes aux mauvais traitemens et aux cruautés de tout genre qu'ils exercèrent contre sa personne. Ils lui donnaient en très-petite quantité des alimens insipides et sans substance, seulement pour empêcher ce malheureux de mourir, et pour prolonger ses souffrances. Mais ce qui lui semblait le plus amer, c'étaient les outrages dont ils ne cessaient de l'abreuver. Entre autres, ils avaient coutume d'amener à chaque instant devant lui un éléphant, dont les effroyables cris et l'épouvantable aspect ne laissaient ni

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