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◄ Veuillez, Monseigneur, déposer de ma part aux pieds de Sa Sainteté ce faible hommage. Il sera bien accueilli, présenté par un Prélat que son zèle, sa fidélité et son attachement à sa personne ont rendu cher au Chef de l'Eglise. »

Mandements de NN. SS. les Evêques
POUR LE CARÊME DE L'ANNÉE 1852.

(Suite.)

Nous continuons le sujet que nous avons abordé dans notre premier compte-rendu.

Mgr l'Evêque de LIMOGES montre de quel principe découlent tous les maux qui minent la société :

La société est emportée par un mouvement d'innovation et de réforme, auquel on ne trouve rien d'analogue dans les siècles passés; elle dispose de forces matérielles immenses; eh bien! si on ne se hâte d'en appeler à Jésus-Christ, de le supplier de mêler sa grâce à ce mouvement, pour le régulariser et le diriger, d'accorder sa lumière à cette force aveugle, pour la purifier et la sanctifier, nul ne peut prévoir à quels désastres il nous sera donné d'atteindre.

Dans cette société, si profondément remuée par les révolutions, il y a deux parts: la part du mal et la part du bien. Au mal, il n'y a de remède que par le recours sincère et pratique à la religion de Jésus-Christ; au bien, il n'y a de consécration et d'accroissement que par une alliance intime, profonde, avec Jésus-Christ.

Que le mal ne soit guérissable que par Jésus-Christ, c'est une conviction qui règne désormais, même dans les esprits les plus prévenus contre la religion. Les conséquences poussées jusqu'à l'extrême nous ont ouvert les yeux sur le principe du mal; et aujourd'hui il est devenu évident pour tous que cette frénésie de jouissances et de plaisirs matériels, ces sauvages théories de spoliation et de communisme, lèpre effrayante qui s'est étendue de jour en jour sur le société, ne venaient que de l'indifférence religieuse, ou du matérialisme de l'incrédulité.

« Que voulez-vous? quand le pauvre, quand le travailleur, saturés de scandales, et poursuivis par une propagande impie, ont fini par se persuader que les espérances religieuses ne sont qu'une chimère, qu'il n'y a rien à attendre d'une autre vie; quand, à force de se séparer de Dieu, l'homme a vu baisser et s'obscurcir la lumière qui l'éclairait, quand tout ce qui s'appelle âme, justice, vérité, temps futur, éternité, est devenu problème ou ruine pour lui, il voit se dresser à la place de toutes ces choses perdues, une réalité d'autant plus saisissante, que rien ne lui fait contrepoids; il ne voit plus que le plaisir, et l'argent qui en est la clef; dépouillé de tout le reste, pauvre et nu, il se jette sur ce débris impur du naufrage universel, il s'y attache avec un enivrement désespéré, et dit à son âme, s'il se doute encore qu'il en ait une : Jouis, mange, rassasietoi, et puis meurs.

«Que lui répondrez-vous? c'est sa part à lui, c'est son droit suprême, c'est son devoir unique, puisqu'il ne connaît pas d'autre bonheur. Nous défions qu'en dehors des principes chrétiens on puisse réfuter ces systèmes subversifs. La foi en une autre vie est la seule explication logique des inégalités sociales.

Oh! hommes insensés, qui, pendant si longtemps, avez travaillé à ébranler

les croyonces du catholicisme, à discréditer la religion et ses prêtres, à ridiculiser les enseignements divins parmi le peuple, mesurez, si vous le pouvez, la profondeur de l'abîme que vous avez creusé, et reculez d'effroi!>

Cet état de démoralisation, auquel les mauvaises doctrines ont amené le peuple, attire les châtiments de Dieu, non-seulement sur les individus, mais sur les nations, ainsi que l'expose S. Em. Mgr l'Archevêque de Lyon :

Nous ne comprenons pas, nos très-chers Frères, cette dispensation mystérieuse de la justice divine. Mais ces profondeurs ne nous seraient pas impénétrables, si nous réfléchissions que les nations n'existeront plus comme nations au grand jour du jugement universel. Il n'y aura plus alors de société, comme il n'y aura plus de lien conjugal; il n'y aura plus d'alliance de familles : Neque nubent, neque nubentur. Les peuples ne se présenteront pas devant le tribunal redoutable du Juge suprême conduits par leurs chefs: il n'y aura plus d'armée marchant sous ses drapeaux. Toute souveraineté se sera évanouie devant la souveraineté infinie. Toute royauté aura disparu devant le Roi des rois. Toute splendeur humaine se sera éclipsée aux rayons de la splendeur divine. Le règne de Dieu sera arrivé. Tous les royaumes de ce monde seront rentrés dans le néant, pour faire place à celui de Jésus-Christ: Factum est regnum hujus mundi, Domini nostri et Christi ejus. Ce ne sera donc pas alors le temps du jugement des nations. Les âmes seules avec le cortége de leurs œuvres, comparaîtront devant le Fils de l'homme, pour répondre personnellement de leurs actions, du bien et du mal qu'elles auront faits.

Sur la terre, les peuples ont, comme peuples, des devoirs d'état à remplir, une vocation à suivre, une mission à accomplir. Dieu pèse leur vie dans la balance de sa justice; il scrute leurs œuvres de ce regard qui sonde les cœurs et les reins; juste et infaillible appréciateur de tout mérite, il leur demande un compte sévère de leur fidélité ou de leur infidélité aux obligations qui pèsent sur eux. Ont-ils respecté et défendu le principe tutélaire d'autorité, ou l'ont-ils chassé du sanctuaire où les siècles le vénéraient, pour le fouler aux pieds, le conspuer, et mettre à sa place l'idole de l'indépendance et de la révolte? Ont-ils rendu à Dieu l'honneur qui n'est dû qu'à lui seul, et ont-ils commencé toutes les actions de leur vie sociale par invoquer la protection de l'arbitre absolu de leurs destinées; ou bien ont-ils rougi de lui sur la terre et l'ont-ils banni de leur législation, de leurs traités, de leurs jugements, déclarant ainsi qu'ils voulaient rompre avec lui pour toujours? Ont-ils respecté l'enfance dans l'éducation, dans les livres, dans les arts; ou bien l'ont-ils livrée à des docteurs de mensonge, qui, en corrompant son esprit, devaient la mener à la corruption du cœur; et après l'avoir enivrée du venin de l'impiété, la plonger dans la fange du vice? Ont-ils entouré de leurs hommages la religion catholique, source de leur force, de leur grandeur et de leur civilisation; ou bien ont-ils oublié ce qu'ils devaient à leur mère et à leur nourrice, pour l'attacher au pilori de la honte et de la dérision, sur les théâtres, dans les livres, dans les académies, dans les musées, dans les chaires savantes? Se sont-ils servis de l'admirable invention de la presse pour propager les principes qui protégent la société et sauvent les empires; ou bien ont-ils laissé les plus coupables passions s'en emparer, pour répandre la contagion du mal sur tous les âges, sur tous les étals, sur toutes les conditions, cherchant à faire croire que le bon sens public ferait justice de ses excès, et saurait bien guérir les plaies qu'elle ferait? C'est pour juger les nations sur ces devoirs et ces péchés, N. T.-C. F., que le tribunal de Dieu se dresse sur la

terre. Après une discussion rigoureuse, le Seigneur ouvre sa main pour laisser tomber sur elles les récompenses réservées à leurs vertus, ou les châtiments mérités par leurs prévarications. Malheur aux peuples qui ne se mettent point en peine de chercher Dieu! Le ciel irrité punira leurs infidélités, afin qu'ils reconnaissent que l'erreur et la vérité ne sont pas une même chose, et qu'on ne doit pas les envelopper dans le même sentiment d'une dédaigneuse indifférence; et la sévérité des peines les forcera à publier la grandeur et la puissance de Dieu et la justice de ses jugements.

Mgr l'Evêque de POITIERS, considérant que la nature du remède doit correspondre à celle du mal, dit que c'est le retour vers Dieu qui sera le principe unique du salut :

Tout ce que nous voyons s'accomplir, continue l'éloquent Prélat, nous confirme dans cette conviction, N. T.-C. F., que nous sommes arrivés à une grande époque. La voix toute-puissante qui a dit au flot de l'océan : Tu viendras jusque-là, et tu n'iras pas plus loin, a marqué aussi une borne aux égarements et aux crimes des nations. Pour tout observateur attentif, c'est une des heures les plus solennelles de l'humanité que celle à partir de laquelle l'esprit d'un peuple prend une direction différente, remonte contre le courant des idées reçues, ressaisit les traditions trop longtemps abandonnées, adore ce qu'il avait brûlé, brûle ce qu'il avait adoré. Or, si les signes des temps ne sont pas trompeurs, nous disons que le milieu du dix-neuvième siècle a été prédestiné, dans les décrets divins, pour opérer la grande séparation de la lumière avec les ténèbres. La révolution qui a toujours marché en Europe depuis trois cents ans, et qui, a travers ses phases diverses, n'a jamais eu qu'un seul caractère, celui de la révolte contre Dieu, la révolution, dis-je, frappée à mort dès la fin du siècle dernier avec lequel elle a noyé son éclat dans le sang et dans la boue, a prolongé pourtant d'un demi-siècle le sombre crépuscule qui devait éclairer les dernières transes de son agonie. Désormais une autre période est commencée. L'aurore d'une ère meilleure s'est enfin levée, et l'horizon qui blanchit éclairera de ses feux naissants l'enfantement d'une société nouvel e. Ah! de grâce, ne faisons pas le procès au ciel, et n'allons pas l'accuser de colère, là où il ne faut que bénir son amour. Si Dieu n'a pas permis à notre siècle d'atteindre la moitié de sa course sans que des coups terribles fussent portés au scepticisme triomphant et au matérialisme satisfait; s'il a comme accumulé à l'entrée de la seconde moitié de ce même siècle les éléments les plus régénérateurs, je veux dire, les Conciles, les croisades (car l'expédition de Rome en est une), les Jubilés, les missions et tant d'autres merveilles de l'ordre religieux et surnaturel, plus importantes et plus significatives que les événements les plus retentissants de l'ordre politique, c'est qu'il a voulu écrire lui-même dans les fastes du monde cette grande date et la contre-révolution par excellence, qui est celle de la vérité contre le mensonge, de la foi contre le doute, de l'esprit contre la chair, de la vertu contre le péché.»

Il importe donc dans cette crise de la société de savoir où l'on marche et quelle est la véritable civilisation. Mgr l'Evêque d'ALger, après avoir établi que l'homme a été créé civilisé, que le péché l'a fait tomber de la plus haute civilisation dans la plus extrême barbarie, complète ainsi sa pensée :

C'en était fait de la race humaine, si le Créateur de l'homme n'eût pris en

pitié l'ouvrage de ses mains, et s'il ne lui eût promis un Rédempteur, par les mérites duquel il lui serait possible de se relever de sa chute.

Il est venu ce Rédempteur, N. T.-C. F., il est venu pour réformer la dignité de la substance humaine et pour relier le monde visible au monde invisible. Il est venu rendre à la vérité tout son empire; il s'est proclamé la vérité même; il a fondé son règne sur la sainteté de la vérité; il a promis aux hommes leur affranchissement par la vérité; il a juré que sa parole ne passerait pas et que rien ne pourrait effacer jamais un iota de la vérité; enfin il a fondé une Eglise qui est la colonne et le fondement de la vérité. Il a rappelé, à la pureté de sa primitive origine, le mariage, base de la famille, qui est elle-même la base de l'Etat; il a réglé tous les devoirs à la mesure de la charité; il a fait de la sainteté un précepte pour tous les siens; il leur a dit: Soyez parfaits, et il a couronné son enseignement par l'inévitable alternative du ciel et de l'enfer. Ses promesses, ses menaces, ses exemples, ses institutions, sa loi, ss grâce, voilà l'incomparable appui qu'il a donné à la vérité reconquise. Dans ce peu de mots, vous trouvez la notion de la civilisation chrétienne et aussi tout son mécanisme providentiel. Sa notion : vous connaissez maintenant le sens et la portée qu'il faut lui donner. La civilisation n'est pas un fleuve dont on descende le cours, en se laissant aller à la dérive du temps et sur lequel on puisse voguer, avec sécurité, en prenant la raison humaine pour pilote et le bien-être pour boussole. La civilisation est un torrent difficile que l'homme doit remonter, à l'aide de la foi. La civilisation, c'est l'homme agissant avec la plénitude de sa nature physique, intellectuelle et morale, mais sous la règle donnée à l'homme par Dieu et par Jésus-Christ, son Fils; c'est le développement des lois de la Création et de la Rédemption. Cela se comprend. Civiliser, c'est perfeciionner; or quelle perfection y a-t-il pour l'homme, ailleurs, que dans le retour graduel à sa nature primitive et réparée ? Hors de là, il peut y avoir des essais de civilisation, parce que l'homme reste encore avec la faible part d'intelligence et de force que lui a laissée le péché d'origine; là seulement peut se trouver la véritable civilisation; car son intelligence y est éclairée par la vérité infaillible, et sa force en même temps soutenue dans sa faiblesse et comprimée dans ses débordements, par la grâce de Jésus-Christ.

Le matérialisme développe exclusivement l'activité humaine au profit des jouissances de la terre. Que fait la religion? Oserait-on dire qu'elle condamne les jouissances légitimes, que vouée, tout entière, au culte de Dieu et à l'amour des choses éternelles, elle voit avec chagrin l'agriculture se développer, l'industrie s'épanouir, les sciences d'application devenir fécondes en découvertes, le bien-être descendre dans les masses, les conditions humbles s'améliorer et les conditions élevées s'affermir? Est-ce qu'elle n'accueille pas, avec empressement, tout ce qui constitue un progrès véritable? Est-ce qu'elle n'appelle pas sur les fruits de la terre les bénédictions du ciel? Est-ce que ce n'est pas elle qui a rendu au travail sa noblesse antique, en le déclarant, sous une forme ou sous une autre, obligatoire pour tous, et en plaçant la bêche aux mains du prêtre et du moine bénédictin, alors que le front de l'esclave se courbait seul et humilié sur les sillons? Est-ce que ce n'est pas elle qui a défriché les deux tiers de l'Europe? Est-ce que ce n'est pas elle qui a ouvert à toutes les infirmités, à toutes les douleurs des asiles plus somptueux que les palais des rois? Est-ce qu'elle n'a pas consacré à l'indigence tout ce qu'elle avait de plus pur, ses prêtres et ses vierges? Est-ce qu'elle n'a pas fait de la charité la première de toutes les vertus et le plus saint de tous les devoirs? Y a-t-il rien de plus pompeux que son culte, rien de plus majestueux que ses églises ? N'a-t-elle pas été la patronne des

beaux-arts, et ne leur a-t-elle pas dressé comme un temple dans ses souvenirs? A qui doit-on la conservation des chefs-d'œuvre de l'art antique? à la Papauté. Ainsi la religion développe, dans une juste mesure, le côté sensible de l'humanité. Mais prenez-y garde, N. T.-C. F., en même temps qu'elle accorde aux sollicitudes de l'homme une juste part dans le domaine des choses terrestres, elle ne cesse de lui dire que son bonheur suprême n'est pas dans le temps, qu'il ne faut pas attacher trop vivement son cœur aux choses dont on jouit avec le plus de droits, que la vie est fugitive comme une ombre, qu'il faut savoir se faire des amis dans le ciel, des richesses méme de l'iniquité, qu'il ne sert à rien de gagner tout l'univers, si l'on vient à perdre son âme, qu'au fond, bienheureux sont les pauvres d'esprit, et bienheureux ceux qui souffrent, qu'un léger instant de tribulations nous procure un poids immense de gloire: et, qu'après tout, chacun doit être content du sort que la Providence lui a fait, parce que si les conditions sont forcément inégales sur la terre, une récompense égale est promise au-delà de la tombe à tous ceux qui auront un mérite égal aux yeux de celui qui juge les justices. Et ainsi la vérité préserve-t-elle les uns de la corruption que trop souvent la richesse fait naître, et les autres des jalousies et des insurrections que soulève trop souvent la pauvreté.

« Le rationalisme, lui, prétend civiliser l'homme par l'intelligence et par la moralité. La religion refusa-t-elle jamais d'entrer dans cette voie? N'est-elle pas la vérité et la lumière par excellence? Jamais l'esprit humain s'est-il élevé si baut, a-t-il vu plus profond et plus loin que depuis et par le christianisme? Quelle morale pourrait se comparer à la sienne? On en convient; mais la religion ne cultive pas l'esprit pour lui-même et uniquement pour le faire briller dans le temps; elle ne veut pas seulement créer d'honnêtes gens, comme faisait le paganisme; elle veut des hommes vivant de la vie de la grâce, de la vie surnaturelle, d'une vie qui ne dise jamais en fait de vertu : C'est assez; d'une vie assez admirable pour paraître angélique à ceux qui en sont les témoins, et assez humble pour faire trembler encore ceux qui la pratiquent; d'une vie de foi qui élève le mobile des actions, d'une vie d'espérance qui les transfigure et d'une vie de charité qui les enflamme. Oh! montrez-nous un saint, et voilà le modèle des être civilisés! Montrez partout au monde des chefs vraiment chrétiens, et les peuples comprendront ce qu'on gagne à être placé sous un sceptre vraiment civilisateur: La religion chrétienne, qui ordonne de s'aimer, veut que chaque peuple ait les meilleures lois politiques et les meilleures lois civiles, parce qu'elles sont, après elle, le plus grand bien que les hommes puissent donner <et recevoir. Montrez-nous des sujets chrétiens, et une douce émulation de respect, de subordination nous ramènera l'âge d'or; montrez-nous des parents chrétiens, et les douceurs de la famille et la pureté des mœurs feront les nations heureuses; montrez-nous des maîtres et des ouvriers chrétiens, et le maître cessera d'exploiter l'ouvrier, et l'ouvrier de s'insurger contre le maître; montreznous des commerçants, des cultivateurs, des artisans chrétiens, et l'honnêteté, la probité, la confiance, l'énergie, la patience, vertus modestes, mais qui sont le nerf du succès, règneront dans les cœurs. Donnez-nous enfin une éducation chrétienne, vraiment chrétienne, de croyance, d'enseignement, d'exemple, et ces nuages formidables, où se forment à tout instant les foudres qui éclatent sur nos têtes, disparaîtront peu à peu pour faire place au radieux arc-en-ciel de la paix; et ainsi la vérité affranchira une seconde fois le monde. »

Mgr l'Evêque de Nîmes forme les mêmes désirs et nourrit les mêmes espérances:

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